jeudi 18 avril 2024

COMPTE-RENDU, critique, opéra. SAINT- ÉTIENNE, Opéra. Le 5 mai 2019. ISOUARD : Cendrillon. Orch.et chœur de l’Opéra de St-Étienne, Julien Chauvin.

A lire aussi
Jean-François Lattarico
Jean-François Lattarico
Professeur de littérature et civilisation italiennes à l’Université Lyon 3 Jean Moulin. Spécialiste de littérature, de rhétorique et de l’opéra des 17 e et 18 e siècles. Il a publié de Busenello l’édition de ses livrets, Delle ore ociose/Les fruits de l’oisiveté (Paris, Garnier, 2016), et plus récemment un ouvrage sur les animaux à l’opéra (Le chant des bêtes. Essai sur l’animalité à l’opéra, Paris, Garnier, 2019), ainsi qu’une épopée héroïco-comique, La Pangolinéide ou les métamorphoses de Covid (Paris, Van Dieren Editeur, 2020. Il prépare actuellement un ouvrage sur l’opéra vénitien.

ISOUARD-cendrillon-saint-etienne-opera-critique-opera-critique-concerts-classiquenews-classique-news-musique-classique-critique-compte-rendu-concerts-agenda-spectacles-operas-festivalsCOMPTE-RENDU, critique, opéra. SAINT- ÉTIENNE, Opéra. Le 5 mai 2019. ISOUARD : Cendrillon. Orchestre et chœur de l’opéra de Saint-Étienne, Julien Chauvin. Un petit bijou du XVIIIe siècle renaît de ses cendres grâce à l’opéra de Saint-Étienne, dans une mise en scène simple mais très efficace. Un casting quasi superlatif orchestré par de très jeunes musiciens sous la baguette experte de Julien Chauvin. Une magnifique redécouverte.

 

 

MAGNIFIQUE REDECOUVERTE
Une Cendrillon impériale

 

 

Représenté en 1810 au théâtre Feydeau, la Cendrillon de Nicolas Isouard précède de près de quatre-vingt-dix ans celle de Massenet et de sept ans celle, plus célèbre, de Rossini. On ne connaissait l’œuvre que grâce à un vieil enregistrement de Richard Bonynge qu’il convenait de dépoussiérer. Sans posséder l’ampleur et la richesse de ces deux illustres aînées, la version d’Isouard est loin de démériter. Les pages brillantes et séduisantes abondent, et l’opéra tout entier (malgré quelques coupures, notamment des chœurs) est superbement écrit. On est d’emblée enchanté par le duo des deux sœurs (« Arrangeons ces dentelles »), par la diction éloquente du précepteur (« La charité »), par l’irrésistible boléro du second acte de Clorinde (« Couronnons-nous de fleurs nouvelles »), l’air de bravoure de Tisbé du 3e acte, et surtout par la superbe romance de Cendrillon du premier acte (« Je suis modeste et soumise »), proprement envoûtante.

La mise en scène de Marc Pacquien est très réussie. Une simple maison bleu-gris construite autour d’un double escalier, laisse apparaître tour à tour le château du baron ou le palais du prince, quelques effets d’illusion (un balai qui bouge tout seul, une citrouille qui vole dans les airs, une canne qui apparaît comme par magie), les costumes ravissants et colorés de Claire Risterucci, et une direction d’acteur efficace contribuent à la grande réussite du spectacle.

La distribution est d’un très haut niveau, à commencer, par le rôle-titre. Anaïs Constans possède une voix souple et sonore, magnifiquement projetée, tandis que Jeanne Crousaud et Mercedes Arcuri jouent à merveille leur rôle espiègle avec un abattage vocal – les passages virtuoses abondent (duo : « Ah, quel plaisir, ah, quel beau jeu ») – qui force le respect. Jérôme Boutiller est toujours aussi impeccable : son chant d’une grande noblesse d’élocution fait mouche dans les passages d’une simplicité apparente (« Ayez pitié de ma misère »). Dans le rôle du faux prince, Riccardo Romeo ne démérite pas, même si sa diction laisse parfois à désirer, mais sa très belle présence scénique compense quelques (rares) défaillances vocales. La prestance de l’écuyer – qui se révèlera être le vrai prince – est l’un des atouts de Christophe Vandevelde : voix solidement charpentée, voce spinta d’un très grand naturel doublée d’un très beau jeu d’acteur, qualité qu’il partage d’ailleurs avec tous ses partenaires (les dialogues parlés sont très vivants et fort bien déclamés) ; une mention spéciale pour le formidable numéro du baron de Montefiascone, bellement incarné par Jean-Paul Muel, acteur extraordinaire qui porte pour une grande part le dynamisme communicatif de toute la partition.

Dans la fosse, la baguette expérimentée de Julien Chauvin défend avec conviction et justesse ces pages injustement oubliées en dirigeant une phalange d’une insolente jeunesse : l’orchestre est constitué des membres de l’Académie du C.C.R. de Saint-Étienne, qui révèlent avec bonheur leur très haut niveau d’exécution (on pardonnera quelques couacs des cors). Bonne nouvelle : des reprises de ce superbe opéra-féérie sont prévues prochainement avec l’orchestre « historiquement informé » de Julien Chauvin. À ne pas manquer.

 

 

 

 

___________________________

Compte-rendu. Saint-Étienne, Opéra de Saint-Étienne, Isouard, Cendrillon, 05 mai 2019. Anaïs Constans (Cendrillon), Jeanne Crousaud (Clorinde), Mercedes Arcuri (Tisbé), Riccardo Romeo (Le Prince Ramir), Jérôme Boutiller (Le précepteur Alidor), Christophe Vandevelde (L’écuyer Dandini), Jean-Paul Muel (Le baron de Montefiascone), Marc Paquien (Mise en scène), Julie Pouillon (Assistante à la mise en scène), Emmanuel Clolus (Décors), Claire Risterucci (Costumes), Dominique Brughière (Lumières), Thomas Tacquet (Chef de chant), Orchestre et Chœurs de l’Opéra de Saint-Étienne, Julien Chauvin (direction).

 

 

- Sponsorisé -
- Sponsorisé -
Derniers articles

CONCERT et CD : « DOLCE VITA », MARCO ANGIOLONI & l’ensemble Contrastes. PARIS, Bal Blomet, mercredi 8 mai 2024.

Délicieusement rétro, le programme "Dolce Vita" - que défend le jeune ténor italien MARCO ANGIOLONI - nous parle d’amour,...
- Espace publicitaire -spot_img

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img