TOURS, OpĂ©ra. Les 13, 15 et 17 avril 2018. BRITTEN : Songe dâune nuit dâĂ©tĂ© (A Midsummer Night’s Dream) plonge au cĆur de lâillusion amoureuse en labyrinthe des coeurs qui Ă©prouvent chaque protagonistes quâil soit souverain, comĂ©dien, homme ou fĂ©e, voire « rustre » (rustics)⊠Entre fable et drame tragique, lĂ©gende onirique et action théùtrale, Benjamin Britten (1913-1976) a conçu une suite musicale Ă la piĂšce de Shakespeare (créée dans les annĂ©es 1590) dâune toute autre inspiration que celle de son prĂ©dĂ©cesseur sur le mĂȘme sujet, Mendelssohn (dont il chantait adolescent la partie dâalto). La comĂ©die amoureuse cible la gravitĂ© de lâamour manipulateur, son oeuvre illusoire ; il ne rend pas heureux, il dĂ©sespĂšre les Ăąmes Ă©prouvĂ©es, trompĂ©es, Ă©garĂ©es. Comme The Rape of Lucrezia (Le Viol de LucrĂšce), Britten approfondit encore sa propre conception de lâopĂ©ra de chambre anglais, viscĂ©ralement théùtral, mais dâune fausse lĂ©gĂšretĂ© dans sa rĂ©alisation : Midsummer a Ă©tĂ© conçu pour le festival dâAldeburgh, fondĂ© 10 ans auparavant par Britten (1948).
Un opéra anglais, néo baroque (Purcellien)
sur les enchantements de lâamour
En 7 mois, le compositeur adapte le livret avec son compagnon (passant de 5 Ă 3 actes), le tĂ©nor Peter Pears ; puis met en musique la trame ainsi réécrite en octobre 1959. Au printemps 1960, tout est en place pour la crĂ©ation le 11 juin suivant, le nouvel opĂ©ra inaugure la nouvelle salle du festival le Jubilee Hall. Lâaccueil est mitigĂ©, car la lyre de Britten sâest comme conceptualisĂ©e, sur un mode allĂ©gorique, dâaprĂšs la passion et lâillusion shakespearienne. Sans sujet rĂ©aliste ou historique, par le seul biais du rĂȘve et dâun conte fĂ©erique, Britten aborde un thĂšme qui lui est cher : lâinnocence fragilisĂ©e; en lâoccurrence celle des elfes ; Ă la facĂ©tie des fĂ©es et des elfes, dâune insouciance magicienne, Britten oppose le monde des hommes, ici une troupe de comĂ©diens (les mortels impuissants face Ă lâamour) jouĂ©e par les « rustics » Ă lâoccasion du mariage de ThĂ©sĂ©e et dâHyppolyte qui rĂ©pĂštent une piĂšce sur la passion amoureuse (Pyrame et ThisbĂ©). Effet de mise en abĂźme, – théùtre dans le théùtre : mais câest bien les crĂ©atures fĂ©eriques, ObĂ©ron et son fidĂšle Puck, qui grĂące Ă un sortilĂšge, manipulent et enchantent tous ceux quâils veulent soumettre et envoĂ»ter. Dont la Reine Titania tombĂ©e amoureuse de lâĂąne Bottom (Acte II)⊠Sur les traces de Shakespeare, Britten rĂ©alise aussi un fabuleux théùtre entre la nuit et le songe, le monde du rĂȘve et celui de la rĂ©alitĂ© cynique et violente. Barbarie crasse des hommes, agilitĂ© ensorcelante et insouciante des elfes⊠tout se passe dans les bois Ă AthĂšnes. La nature ensorcelante et Ă©nigmatique, impĂ©nĂ©trable garde tout ses mystĂšres, de sorte que ses frondaisons et sa
forĂȘt de vĂ©nĂ©rables, dessinent comme un labyrinthe enchantĂ©, rituel de passage pour toute Ăąme qui sây aventure, et donc sây perd, pour devenir fou ou se reconstruire. Câest selon. Finalement, sortilĂšges et disputes ayant croisĂ© et mĂȘlĂ© les espĂšces et les genres, se dissolvent, avec en fin dâaction, un retour Ă lâordre et Ă lâĂ©quilibre : les couples vĂ©ritables (de dĂ©part) se reforment, et la piĂšce dont on avait Ă©voquĂ© les rĂ©pĂ©titions par les acteurs perdus dans les bois, peut en effet ĂȘtre reprĂ©sentĂ©. Pour Britten, la rĂ©alitĂ© câest donc le théùtre. Dâailleurs il fait de lâacte II, la synthĂšse de sa conception trouble et riche, puissante et onirique Ă la fois de lâopĂ©ra : entre sommeil, violence, magieâŠ
BRITTEN, Un SONGE D’UNE NUIT DâETE,
A Midsummer nightâs Dream
Nouvelle production
TOURS, Opéra / Grand Théùtre
Vendredi 13 avril 2018 – 20h
Dimanche 15 avril 2018 – 15h
Mardi 17 avril 2018 – 20h
RESERVEZ VOTRE PLACE
http://www.operadetours.fr/a-midsummer-night-s-dream
Grand Théùtre de Tours
34 rue de la Scellerie
37000 Tours
02.47.60.20.20
theatre-billetterie@ville-tours.fr
Opéra en trois actes, Op.64
Livret de Benjamin Britten et Peter Pears d’aprĂšs William Shakespeare
Créé le 11 juin 1960 au Festival d’Aldeburgh
Nouvelle production
Coproduction OpĂ©ra de Tours et Conseil DĂ©partemental dâIndre-et-Loire
PremiĂšre reprĂ©sentation Ă lâOpĂ©ra de Tours
Direction musicale : Benjamin Pionnier
Mise en scĂšne : Jacques Vincey
Décors : Mathieu Lorry-Dupuy
Costumes : Céline Perrigon
LumiĂšres : Marie-Christine Soma
Oberon : Dimitry Egorov
Tytania : Marie-Bénédicte Souquet
Puck : Yuming Hey
Theseus : Thomas Dear
Hippolyta : Delphine Haidan
Hermia : Majdouline Zerari
Helena : Deborah Cachet
Lysander : Peter Kirk
Demetrius : Ronan Nédélec
Bottom : Marc Scoffoni
Quince : Ăric Martin-Bonnet
Flute : Carl Ghazarossian
Snout : Raphaël Jardin
Starveling : Yvan Sautejeau*
Snug : Jean-Christophe Picouleau*
Au sommet de cette pyramide onirique, rĂšgnent les fĂ©es et le roi ObĂ©ron dont la noblesse innĂ©e sâexprime dans le choix des airs Ă numĂ©ro, formes fermĂ©es, nobles et savantes, dignitĂ© formelle Ă laquelle rĂ©pondent les timbres rares des instruments choisis : clavecin, xylophone, glockenspiel ⊠sans omettre la voix de haute-contre du personnage dâOberon, lui-mĂȘme. Une tessiture racĂ©e, royale qui dit un monde supĂ©rieure non par le pouvoir quâon lui assigne mais grand par sa vertu imaginative et facĂ©tieuse. Face Ă la sociĂ©tĂ© des magiciens, Britten expose la rusticitĂ© rustre des « rustics » donc, qui sâexpriment en rĂ©citatifs libre ponctuĂ©s de percussions brutes dans des registres plutĂŽt graves. A leurs cĂŽtĂ©s, les amants accordent leurs voix enivrĂ©s aux instruments de lâorchestre classique et romantique (cordes et bois) : Lysander, Demetrius, Hermia, Helena, sont moins comĂ©diens que figures de lâamour contrariĂ©, Ă©prouvĂ©, empĂȘchĂ© puis retrouvĂ©. Chacun dans son errance nocturne et sylvestre, incarne le pion dâun Ă©chiquier qui surclasse toutes les piĂšces (quatuor du II)
Celui qui se distingue par sa malice divine, sa fluiditĂ© spirituelle et habile, le maĂźtre des illusions qui permet au Roi des elfes de rĂ©gner sans partage, câest son double comique, Puck. RĂŽle parlĂ©, il passe dâun monde Ă lâautre, sait sâen faire comprendre, associĂ© Ă un duo sonore trĂšs caractĂ©risĂ© (caisse claire et trompette).
Outre une caractĂ©risation instrumentale de chaque personnage raffinĂ©e Ă lâextrĂȘme, Britten cite souvent celui qui est son modĂšle pour lâopĂ©ra, Purcell.
Obéron, Titania et Puck avec des fées
par le peintre William Blake, vers 1786 (DR)
SYNOPSIS
Acte I
Dans un bois prĂšs d’AthĂšnes, Puck, interrompt le chant des fĂ©es : il annonce l’arrivĂ©e d’ObĂ©ron et de Titania, qui se disputent : en effet ObĂ©ron souhaite prendre Ă son service un jeune indien dont Titania a fait son page, mais elle le lui refuse. Leur querelle Ă©branle lâharmonie qui rĂ©gnait jusque lĂ . Oberon dĂ©voile son arme dâe soumission massive ; il missionne Puck dâutiliser une herbe magique dont le suc, versĂ© sur les paupiĂšres d’une personne endormie, la rendra amoureuse de la premiĂšre crĂ©ature quâil verra.
Les amants : les fiancĂ©s Lysandre et Hermia fuient AthĂšnes et trouvent refuge dans les bois : Hermia refuse dâĂ©pouser DĂ©mĂ©trius, imposĂ© par son pĂšre. DĂ©mĂ©trius les poursuit, suivi par HĂ©lĂšne qui est amoureuse de lui (et quâil Ă©carte toujours).
Puck a trouvĂ© la fleur magique ; obĂ©issant au vĆu dâObĂ©ron; il versera le suc sur les yeux de Titania et dâun « jeune dĂ©daigneux » (DĂ©mĂ©trius) que Puck identifie Ă son costume d’AthĂ©nien.
CHASSĂ-CROISĂ⊠De leurs cĂŽtĂ©s, les acteurs prĂ©parent les rĂ©pĂ©titions de la piĂšce Pyrame et ThisbĂ© pour cĂ©lĂ©brer le mariage de ThĂ©sĂ©e : Bottom jouera Pyrame. Les fuyards Lysandre et Hermia se reposent dans les bois. Puck prend Lysandre endormi pour DĂ©mĂ©trius : il verse le suc sur ses yeux. HĂ©lĂšne qui sâapproche de Lysandre, le rĂ©veille ; il tombe aussitĂŽt amoureux dâelle. Elle s’enfuit, poursuivie par Lysandre. Hermia s’Ă©veille Ă son tour et recherche Lysandre qui a disparu.
De son cĂŽtĂ©, profitant du coucher et de lâendormissement de la Reine des fĂ©es Titania, Oberon verse lui-mĂȘme le suc fatidique sur les yeux de la jeune femme : la souveraine rivale et ennemie se rĂ©veillera quand un « vil s’approchera ».
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Acte II
AprĂšs un prĂ©lude qui plonge dans le mystĂšre de la nuit et du rĂȘve de la forĂȘt, les comĂ©diens rĂ©pĂštent leur piĂšce. Puck surgit et affuble sans quâil ne sâen aperçoive, une tĂȘte dâĂąne Ă Bottom, – toujours satisfait de lui-mĂȘme : Titania qui se rĂ©veille le voit et tombe amoureuse de lui. La reine ordonne Ă ses servantes fĂ©es de servir son nouveau favori : les deux sâendorment sereinement (Fussli a peint leur Ă©treinte : lâĂ©lan de la reine, lâivresse de lâĂąne Bottom qui ne sait pas bien ce quâil lui arrive).
ObĂ©ron qui sâaperçoit que Puck sâest trompĂ©, verse le suc magique sur les yeux de DĂ©mĂ©trius endormi. Paraissent Lysandre et HĂ©lĂšne : rĂ©veillĂ©, DĂ©mĂ©trius voit HĂ©lĂ©na et en tombe Ă nouveau amoureux. Sâen suit une violente dispute entre les amants : Oberon et Puck ont semĂ© le vent du dĂ©sordre amoureux. Puck reverse le suc sur les yeux de Lysandre.
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Acte III
AnimĂ© par la culpabilitĂ© face au chaos quâil a suscitĂ©, ObĂ©ron dĂ©cide de libĂ©rer Titania du sortilĂšge : elle Ă©carte immĂ©diatement lâĂąne de sa vue, horrifiĂ©e : ObĂ©ron la console et les souverains se rĂ©concilient. Idem pour les amants qui rient en se racontant leurs rĂȘves respectifs, cependant que Bottom, ayant recouvrĂ© sa vrai tĂȘte, rejoint ses partenaires comĂ©diens.
Le duc annonce ses noces avec Hippolyte : les quatre amants confessent leur faute et seront mariĂ©s dans le mĂȘme temps. Puis aprĂšs le souper, les comĂ©diens jouent la tragĂ©die de Pyrame et ThisbĂ©. ComblĂ© le duc refuse lâidĂ©e dâun Ă©pilogue. Les fĂ©es concluent lâopĂ©ra, cĂ©lĂ©brant la paix revenue.