vendredi 19 avril 2024

Tours. Grand-Théâtre, le 10 mars 2013. Verdi : Un Ballo in Maschera. Leonardo Caimi, Lianna Haroutounian, Tassis Christoyannis…Jean-Yves Ossonce, direction. Gilles Bouillon, mise en scène

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Après un Rigoletto en demi-teinte, l’Opéra de Tours met toutes les chances de son côté pour ce Bal Masqué : une scénographie simple et dépouillée, une distribution de haut niveau, et une direction musicale rendant justice à la partition. En somme, un hommage à Verdi tout à fait réussi.
Excellente idée que de remonter la mise en scène de Gilles Bouillon, d’une belle efficacité, aux décors et costumes intemporels, aussi discrète qu’efficace, laissant à la musique tout son pouvoir d’évocation sans jamais l’entraver.


Belle réussite verdienne

Les voix sont également à l’honneur, grâce à la présence du couple d’exception formé par Lianna Haroutounian et Tassis Christoyannis. La soprano franco-arménienne, que nous suivons depuis quelques années déjà, se révèle un authentique soprano lirico-spinto, parfaitement taillé pour les rôles verdiens. L’instrument sonne toujours aussi beau et personnel, grâce à une couleur reconnaissable, avec un grave sonore, un médium riche et corsé ainsi qu’un aigu puissant et rond, qualités magnifiées par une solide technique lui permettant autant de déployer de superbes forte que de ciseler des piani aérien dans son air du II. Et la musicienne n’est pas en reste, toujours engagée et sincère dans les émotions qu’elle dépeint. Sans surprise, c’est elle qui déchaîne les ovations du public au rideau final.
A ses côtés, le baryton grec s’affirme une fois encore comme un exemple de beau chant et d’intelligence musicale. Sans être véritablement le baryton Verdi exigé par la partition, dans cette salle à taille humaine il passe l’orchestre sans effort et peut ainsi se permettre de chanter ce rôle avec sa voix de baryton lyrique. Si certains passages manquent de largeur, on ne peut que s’incliner devant la franchise de son émission, qui rend compréhensible chaque syllabe, la solidité de son aigu, la maîtrise avec laquelle il conduit son souffle et son art des nuances. Son « Eri tu » se révèle ainsi poignant dans sa douleur, sans jamais sacrifier la beauté du chant. Un très grand artiste, qu’on a hâte de revoir.
Le reste de la distribution tient également très bien rang. Sans doute encore sous le coup de la grippe qui l’a terrassé la semaine durant, Leonardo Caimi incarne un Riccardo convainquant, étonnamment plus à l’aise dans les grandes tenues vocales que dans les passages d’écriture plus légère, comme si cette vélocité d’intonation l’empêchait de déployer pleinement sa voix. Lui manque encore une vraie ligne de chant sur le souffle pour s’affirmer réellement comme un ténor verdien, alors qu’il en aurait les moyens en soignant davantage son émission et sa technique plutôt que de faire confiance à sa seule robustesse sonore et son indéfectible énergie.
De son côté, Claudia Marchi donne vie à une inquiétante Ulrica, aux graves abyssaux parfaitement sonores et aux aigus dardés. Seul le médium semble manquer d’unité, comme si la transition entre les registres demeurait périlleuse, peut-être à cause de la recherche d’une émission plus large et plus appuyée qu’il ne faudrait.
Carton plein en revanche pour l’Oscar virevoltant de Mélanie Boisvert, naïf et complice à la fois, à la projection remarquable d’efficacité et aux aigus faciles et fruités. Les seconds rôles se révèlent tous à leur place, tenant leur emploi avec probité.
Fidèle à lui-même, le chœur de l’Opéra de Tours fait admirer une nouvelle fois son excellente préparation et son homogénéité admirable. Quant au travail de Jean-Yves Ossonce, il est encore à saluer, galvanisant son orchestre et magnifiant les sombres couleurs verdiennes sans jamais mettre en péril les chanteurs, leur apportant au contraire le soutien et la flamme nécessaire – d’autant plus dans cette production, les voix ont toutes les moyens de répondre aux intentions du chef –.
Triomphe du public aux saluts, la réussite verdienne qu’on attendait de l’Opéra de Tours pour cet anniversaire.

Tours. Grand-Théâtre, 10 mars 2013. Giuseppe Verdi : Un Ballo in Maschera. Livret d’Antonio Somma, d’après Scribe. Avec Riccardo : Leonardo Caimi ; Amelia : Lianna Haroutounian ; Renato : Tassis Christoyannis ; Ulrica : Claudia Marchi ; Oscar : Mélanie Boisvert ; Silvano : Ronan Nédelec ; Samuel : Lionel Sarrazin ; Tom : Tomislav Lavoie. Chœurs de l’Opéra de Tours ; Chef de chœur : Emmanuel Trenque. Orchestre Symphonique Région Centre-Tours. Jean-Yves Ossonce, direction musicale ; Mise en scène : Gilles Bouillon. Dramaturgie : Bernard Pico ; Décors : Nathalie Holt ; Costumes : Marc Anselmi ; Lumières : Michel Theuil ; Chef de chant : Vincent Lansiaux

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