Après une courte et nĂ©cessaire pause, nous passons de l’auditorium Ă l’Ă©glise abbatiale de l’Abbaye aux Dames. Nous changeons aussi de pĂ©riode, laissant derrière nous, les percussions d’Ars Nova, pour l’ensemble Nevermind, installĂ© en rĂ©sidence depuis septembre 2015. Ce Quatuor instrumental, formĂ© de quatre amis qui se sont rencontrĂ©s au CNSMD de Paris, se consacre Ă la dĂ©couverte ou Ă la redĂ©couverte de compositeurs mĂ©connus, voire totalement inconnus, de la pĂ©riode baroque française. C’est ainsi que le programme de ce nouveau concert dĂ©voile Louis-Gabriel Guillemain (1705-1770) et Jean-Baptiste Quentin (1690-vers1750); deux compositeurs inscrits au programme de leur dernier cd.
Nevermind en ascension : toujours plus haut, plus beau, plus vivant….
Pour dĂ©buter son concert, Nevermind prĂ©sente une Ĺ“uvre dĂ©jĂ connue du public : La PiĂ©montoise (4ème Ordre : Les Nations) composĂ©e par François Couperin (1668-1733). Si la direction de Jean Rondeau, depuis son clavecin, est discrète et ferme, la complicitĂ© des quatre instrumentistes lui rĂ©pond avec gourmandise : l’interprĂ©tation est rigoureuse, dynamique, entraĂ®nante ; les interprètes expriment ce voyage dĂ©signĂ© vers le PiĂ©mont. Le
cĹ“ur du concert, concerne d’abord Louis-Gabriel Guillemain (1705-1770); violoniste prodige, nommĂ© « violon ordinaire du Roi », Guillemain est aussi compositeur pour le violon, bien sĂ»r, mais aussi pour des ensembles de musique de chambre et pour orchestre.
En ce dĂ©but d’après midi, c’est la Sonate en quatuor n° 3 que nous propose Nevermind; l’écriture en est charmante, lĂ©gère quoique hardie et exigeante prĂ©figurant ce que sera celle de Mozart quelques annĂ©es plus tard. Avec Jean-Baptiste Quentin (1690-vers1750), contemporain de Guillemain, nous entrons dans un univers plus mystĂ©rieux; l’oeuvre de Quentin est confidentielle mais dense : seulement une vingtaine de recueils dont le dernier date de 1750. S’il disparaĂ®t cette mĂŞme annĂ©e, sa mort elle-mĂŞme reste inexplicable ; et on en ignore la date exacte ; Quentin n’en laisse pas moins des partitions qui gagnent Ă ĂŞtre connues. Compositeur vivant en plein cĹ“ur de la pĂ©riode baroque, il hĂ©rite des techniques de composition de ses prĂ©dĂ©cesseurs immĂ©diats, Lully ou Marin Marais par exemple et de ses contemporains, Campra ou Rameau entre autres. Avec le Concert Ă quatre parties (Ĺ“uvre XII, Largo) et la Sonate en quatuor n°3 (Ĺ“uvre XV), Nevermind nous propose deux Ĺ“uvres dont le style est très personnel; marquĂ© par ses illustres contemporains, Quentin ne les copie pas pour autant. Sa musique est certes rigoureuse mais les quatre complices en donnent une lecture dynamique, vivante, sans lourdeur.
Pour terminer, Georg-Philipp Telemann (1681-1767) : un auteur emblématique de la formation car les Quatre instrumentistes se sont rencontrés autour de Telemann qui a composé pour leur formation précise (flûte, violon, viole de gambe, clavecin) ; avec le Nouveau quatuor parisien n°6 en mi mineur, composé lors de son séjour parisien, Nevermind revient à un répertoire certes plus traditionnel mais tout aussi intéressant, alliant raffinement, tension, dramatisme élégant. Les interprètes honorent ainsi un compositeur qui leur a permis dès leurs débuts de s’affirmer : ses Quatuors parisiens sont écrits pour leur formation instrumentale : violon, flûte, viole et clavecin.
Le geste est dĂ©fricheur, Ă©clairant ce qui se cache ainsi Ă l’ombre des plus connus : Lully, Campra, Rameau ou Marin Marais. Avec Louis-Gabriel Guillemain (1705-1770) et Jean-Baptiste Quentin (1690-vers1750), NeverMind met en lumière deux hommes dont la musique n’a rien Ă envier Ă celle de leurs contemporains. Avec Couperin et Telemann, les Quatre apportent une touche «sĂ©curitaire» Ă un concert qui a le mĂ©rite de nous faire sortir des sentiers battus.
Saintes. Abbaye aux dames, le 9 juillet 2016. François Couperin (1668-1733) : La PiĂ©montoise (4ème Ordre : Les Nations), Louis-Gabriel Guillemain (1705-1770) : Sonate en quatuor N°3, Jean-Baptiste Quentin (1690-vers1750) : concert Ă quatre parties, Ĺ“uvre XII (largo), Sonate en quatuor n°3, Ĺ“uvre XV (1747), Georg-Philipp Telemann (1681-1767) : Nouveau quatuor parisien n°6 en mi mineur. Ensemble Nevermind (Anna Besson, traverse / Louis Creac’h, violon / Robin Pharo, viole de gamme / Jean Rondeau, clavecin).
APPROFONDIR : VOIR le reportage vidĂ©o dĂ©diĂ© au jeune ensemble Nevermind en rĂ©sidence Ă Saintes (fĂ©vrier 2016, premier concert : jouer les Baroques allemands, français, italiens…)