LILLE, ONL. MAHLER : Symph n°8, les 20 et 21 nov 2019. Alexandre Bloch emporte le National de Lille dans son dernier jalon mahlĂ©rien : la 8Ăš, dite des mille par rĂ©fĂ©rence au nombre de musiciens sur le plateau : un Everest pour tout maestro, et une sorte de Nirvana pour l’amateur de sensations symphoniques… Certes Mahler nâa Ă©crit aucun opĂ©ra. Pourtant la seconde partie de sa 8Ăš Symphonie dite des mille concentre tous les styles lyriques, sur un sujet que tous les Romantiques avant lui ont tentĂ© de traiter en musique : Faust. AprĂšs Berlioz et Schumann, Liszt et Gounod, Mahler met en musique en particulier la scĂšne finale du second Faust de Goethe afin dâaborder et dâĂ©lucider le mystĂšre et le sens de la vie terrestre.
Le volet exige pas moins de 8 solistes, en plus des deux choeurs adultes, du choeur dâenfants, de lâorchestre aux effectifs ahurissants⊠Symphonie opĂ©ra, cantate symphonique, la 8Ăš sâouvre en premiĂšre partie sur le texte de lâhymne particuliĂšrement dramatique « Veni Creator spiritus », ample priĂšre chantĂ©e en latin, Ă la gloire de Dieu, oĂč le compositeur se confronte Ă toutes les ressources du contrepoint.
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SYMPHONIE COSMOS : planĂštes et soleils en rotation
La partition cyclopĂ©enne est conçue en 2 mois et créée Ă Munich, le 12 sept 1910 sous la direction du compositeur. Câest son dernier concert public et son plus grand triomphe en Europe. Elle est constamment chantĂ©e (sauf lâouverture du second mouvement). La modernitĂ© de lâĆuvre tient surtout Ă son plan, sans Ă©quivalent auparavant, Mahler innovant littĂ©ralement une nouvelle architecture, par sĂ©quences, selon le sens du texte, Ă la façon dâun roman. A la diffĂ©rence des opus qui ont prĂ©cĂ©dĂ©, la 8Ăš nâa rien de tragique ni de subjectif : aucun doute, aucune angoisse, aucun trouble. PlutĂŽt lâaffirmation dâune joie intime et collective Ă lâĂ©chelle du cosmos. Car Mahler Ă©crit lui-mĂȘme au chef Mengelberg en aoĂ»t 1906 : « Imaginez lâunivers entier, en train de sonner et de rĂ©sonner. Il ne sâagit plus de voix humaines, mais de planĂštes et de soleils en pleine rotation ». Câest donc lâaboutissement de tout un cycle orchestral oĂč Mahler sâest battu avec la matiĂšre orchestrale ; sây impliquant personnellement ; au terme de lâaventure – odyssĂ©e, il rĂ©alise lâĆuvre final, total, synthĂšse et miroir dâune conscience aussi accomplie quâuniverselle. La 8Ăš symphonie est une symphonie cosmique. Et pour lâauditeur, lâune des expĂ©riences orchestrales les plus marquantes dont il puisse rĂȘver.
Les interprĂštes en expriment le sens et lâampleur avec dâautant plus de justesse quâils se sont jetĂ©s Ă corps perdus mais maĂźtrise totale et engagement permanent dans la rĂ©alisation des symphonies 1 Ă 8 depuis septembre 2018. Une expĂ©rience et une familiaritĂ© qui enrichissent encore leur approche du dernier vaisseau symphonique de Mahler, le plus impressionnant, le plus saisissant. 2 dates Ă©vĂ©nements Ă Lille.
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Mercredi 20 novembre 2019, 20h
Jeudi 21 novembre 2019, 20h
Lille â Auditorium du Nouveau SiĂšcle
RESERVEZ VOTRE PLACE
https://www.onlille.com/saison_19-20/concert/la-symphonie-des-mille-symphonie-n8/
Gustav Mahler
Symphonie n°8, dite âDes Milleâ
Direction : Alexandre Bloch
Sopranos: Daniela Köhler, Yitian Luan, Elena Gorshunova / âšAltos: Michaela Selinger, Atala Schöck / âšTĂ©nor: Ric Furman / âšBaryton: Zsolt Hajaâš / Basse Sebastian Pilgrim
Orchestre National de Lilleâš Â / Â Orchestre de Picardie
Philharmonia Chorusâš / Chef de chĆur : Gavin Carr
Jeune ChĆur des Hauts-de-France
Cheffe de chĆur : Pascale Dieval-Wils
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VIDEOS : les symphonies de MAHLER par lâOrchestre National de Lille / Alexandre BLOCH (intĂ©grales et explications par Alexandre Bloch):
Retrouvez toutes les symphonies de Mahler sur la chaĂźne Youtube ONLille ,
jusquâen avril 2020.
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PrĂ©sentation par lâOrchestre National de Lille :
Pour la premiĂšre en 1910, il fallut construire une estrade spĂ©ciale dans la salle afin de pouvoir accueillir lâensemble des musiciens. NĂ©cessitant deux chĆurs dâadultes, un chĆur dâenfants, huit solistes et un immense orchestre symphonique, la Symphonie n°8 dite âDes Milleâ est la symphonie la plus dĂ©mesurĂ©e, la plus folle du cycle dans laquelle Mahler nous emporte dâun Veni creator ravageur Ă une scĂšne faustienne qui mĂ©lange tous les genres musicaux connus. Venez vivre le gigantisme de cette Ćuvre unique qui rĂ©unira plus de 300 artistes sur scĂšne sous la direction dâAlexandre Bloch. Lors de la premiĂšre Ă Munich, Thomas Mann et Stefan Zweig, prĂ©sents dans le public, en Ă©taient restĂ©s sidĂ©rĂ©s.
The Symphony of a Thousand
Symphony No. 8, known as âThe Symphony of a Thousandâ, is the most monumental of Mahlerâs symphonies. With its two adult choirs, childrenâs choir, eight soloists and immense symphony orchestra, this unique work has strucken since its very premiĂšre in 1910.
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Autour du concert
Ă 18h45
Rencontre mahlérienne
20 novembre 2019:
Bertrand Dermoncourt, directeur de la musique de Radio Classique et auteur du Retour de Gustav Mahler réunissant deux textes de Stephan Sweig
21 novembre 2019 :
Christian Wasselin auteur de Mahler : La Symphonie-Monde
En partenariat avec la
MédiathÚque Musicale Mahler
(entrĂ©e libre, muni dâun billet du concert)
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Symphonie n°8 de Gustav Mahler – PLAN
Du polyphonique saisissant, du dramatique lyrique
Mahler nâa pas composĂ© dâopĂ©ras proprement dit ; mais le directeur de lOpĂ©ra de Vienne qui a connu comme peu le rĂ©pertoire lyrique de Mozart et Beethoven Ă Wagner et Strauss, a finalement Ă©crit son drame lyrique dans la seconde partie de la 8Ăš, inspirĂ© de la scĂšne finale du Faust de Goethe : vision et action spectaculaire qui imagine le hĂ©ros tant Ă©prouvĂ©, atteindre dĂ©lices et repos des bĂ©atitudes cĂ©lestes. Dans les plus hautes sphĂšres, anges, angelots, enfants bienheureux chantent, favorisent et accompagnent lâĂ©lĂ©vation et la mĂ©tamorphose (chrysalide devenue ange sanctifiĂ©) de lâĂąme de Faust vers son dernier asile⊠alors que les Enfants bienhereux contemple le corps du Faust qui sâĂ©lĂšve toujours, Marguerite paraĂźt, implore Marie, dâaccueillir cette Ăąme nouvelle, morte et ressuscitĂ©e, Ă©ternellement jeune.
AprĂšs le monumental Veni Creator dont la force expressive, la complexitĂ© maĂźtrisĂ©e de lâĂ©criture (ocĂ©an contrapuntique oĂč domine une double fugue) la sonoritĂ© colossale doivent saisir au sens strict selon les mots du compositeur le spectateur auditeur, place Ă un cycle fraternel et compassionnel, la deuxiĂšme partie de la 8Ăš, Ă©pisode Ă©blouissant sur le plan de lâĂ©criture orchestrale et vocale, dans lequel Mahler rĂ©tablit le lien avec lâhumanitĂ©.
Pour plus dâunitĂ©, le Faust cite certains thĂšme du Veni Creator qui a prĂ©cĂ©dĂ©. Lâarchitecture en est un triptyque : Andante, Scherzo, Finale, ou introduction, exposition en 3 parties, dĂ©veloppement en 3 sections, Ă©pilogue.
En ouverture (poco adagio), Mahler Ă©voque la solitude de Faust dans la montagne (prĂ©mices du Chant de la terre). Arbres, lions muets, asile dâamourâŠ
EXPOSITION
AprĂšs le chĆur (Waldung, sie schwankt heran),
PATER ECSTATICUS et PATER PROFUNDUS entonnent leur couplet.
EXTATICUS : proie de lâamour Ă©ternel
PROFUNDUS : témoin du miraculeux amour
Le choeur des anges, portant lâessence de Faust, amorcent le 2Ăš Ă©pisode de lâexposition (« celui qui cherche et sâefforce dans la peine, sera sauvé » ;
Puis, se succĂšdent le chĆur des enfants bienheureux
(trÚs haut dans les cimes : « celui que vous vénérez, vous le verrez »),
le choeur des angelots qui ouvre le SCHERZO
(Jene rosen / les roses des pĂ©nitentesâŠ).
Le choeur avec alto solo (Uns bleibt ein Erdenrest)
marque la 3Ăš et derniĂšre sĂ©quence de lâexposition
(le pur et lâimpur mĂȘlĂ© dans un cĆur, ne peuvent ĂȘtre dissociĂ©s
que par lâamour).
DEVELOPPEMENT
Le dĂ©veloppement dĂ©bute avec le choeur des angelots (Ich spĂŒre soeben)
Le choeur des enfants bienheureux (Freudig empfangen wir) qui débouche sur
1- LâHYMNE A LA VIERGE (Mater dolorosa) du DOCTEUR MARIANUS :
« Hochste Herrscherin der Welt », témoin de la splendeur mariale (splendide et magnifique, la reine du ciel) ;
repris par le choeur (Jungfrau, ren im schönsten Sinne /Vierge pure, sublimeâŠÂ »).
SâĂ©panouit alors le thĂšme de lâAmour, pour violon et harmonium (mi maj),
pour lâentrĂ©e de la Mater dolorosa
2- Choeur dâhommes (Dir, der UnberĂŒhrbaren)
MATER GLORIOSA : Choeur des PĂ©nitentes (Du Schwebst zu Höhen / Tu vogues vers les hauteurs, si mj), – apothĂ©ose de Marie, auxquelles succĂšdent
MAGNA PECCATRIX : Saint-Luc (Bei der Liebe : elle lave et parfume les pieds du Christ)
MULIER SAMARITANA : Saint-Jean (Bei dem Bronn) : elle abreuve les lĂšvres du Sauveur
MARIA AEGYPTIACA (Bei dem hochgeweithen Orte / Par le lieu saintement consacré)
puis unies en TRIO (Die du grossen SĂŒnderinnen / accordes le pardon Ă FaustâŠ).
La PĂȘcheresse MARGUERITE implore Marie (Neige, neige, rĂ© maj) : sauve Marie, Faust
Choeur des enfants bienheureux
La PĂȘcheresse implore encore Marie (Vom edlen Geisterchor, si b maj)
avec point culminant (trompette du Veni Creator).
3- MATER GLORIOSA (Komm! Hebe dich zu höhern SphÀren, mi bémol)
repris par
DOCTOR MARIANUS (Blicket auf !), repris par le choeur
Postlude orchestral
EPILOGUE / FINALE
AprĂšs un mystĂ©rieux prĂ©lude orchestral, sâaffirme le presque imperceptible murmure du choeur mystique (Alles vergĂ€nglische ist nur ein Gleichnis)
Immense et progressif crescendo sur le thĂšme du Veni Creator. LĂ encore, encensant la Vierge, source de toute misĂ©ricorde et divinitĂ© la plus admirable, « lâimparfait trouve lâachĂšvement ; lâineffable devient acte ». Et « lâEternel FĂ©minin » porte toujours plus haut.
Comme jamais auparavant, Mahler Ă©chafaude une Ă©criture qui lui est propre ; oĂč la forme respecte le sens et les enjeux de chaque situation dramatique. Moins dâeffet de masse. Mais une Ă©criture « romanesque » et purement dramatique voire opĂ©ratique qui suit le sens de lâaction dramatique, celle du Faust de Goethe ; selon lequel le hĂ©ros moderne (romantique) vit une expĂ©rience spirituelle, dans lâadoration de la Vierge, qui lui permet dâĂȘtre transcendĂ©.