mardi 29 avril 2025

Stravinsky: L’Oiseau de feu, le sacre (Sokhiev, 2011)1 cd + 1 dvd Naïve

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Manque d’âpreté mais hédonisme clair et enchanteur, le geste de Sokhiev s’accomplit ici avec une magistrale aisance, confirmant l’excellence de l’Orchestre du Capitole.

En fragments sélectifs plutôt que porteur d’intégrales dramatiquement restituées, le programme relève d’une démonstration musicale certes admirablement maîtrisée mais où la fièvre et la sueur manquent durablement.


Séduits mais pas chavirés…

L’Oiseau de feu tout d’abord, en version allégée: paraissent bien l’éclat de l’oiseau lors de ses apparitions magiques et fantastiques; la tendresse nonchalante de la ronde de la princesse (cor, flûte, clarinette, hautbois y sont fabuleux): le pur sentiment d’amour s’y déverse avec un miel sonore d’une exceptionnelle volupté. Mais la danse infernale de Katchei manque aussi de terreur et de force diabolique: le chef atténuant l’expressionnisme symboliste du tableau vers un paysage sonore d’une beauté confondante. L’engagement et la précision des instrumentistes sont irréprochables et l’on aurait souhaité une caractérisation plus délirante: la danse infernale tourne à la valse de Ravel: un débraillé somptueux mais sans la mécanique tragique pourtant présente dans l’esprit de ce tableau clé. Enchaîner ensuite la berceuse, sans les autres épisodes, tourne à la sélection de démonstration. Dommage, cette première partie par son côté fragmentaire (malgré la  » science  » des musiciens, cf. la berceuse finale) manque de force comme de continuité dramatique.

Avec Le Sacre, l’approche se nuance davantage, la vision s’enrichissant d’une valeur nouvelle: le mystère et le rêve. L’intro est en cela remarquable d’intonation: ivre, ritualisée… le chef perçoit sous la prière collective, enchaînement des bois et des vents bavards et de plus en plus mordants (clarinettes, trompettes bouchées…), la mécanique d’une hallucination qui bascule dans la transe (cordes)… Sokhiev libère l’énergie en canalisant chaque détail qui fait sens sur le plan instrumental:la vitalité croissante trouve un relief délectable en une palette de timbres scrupuleusement détaillés. Mais là encore on aurait souhaité un regard dramatique plus abouti, davantage passionné et démentiel; les tableaux superbement caractérisés se succèdent (caquetage puis transe de l’intro, syncopes désarticulées des augures, marches graves du jeu de rapt…). Encore une fois, la maestrià sonore et l’excellente performance des solistes ne font pas ici une lecture globalement architecturée; le chef semble lire la partition en nous détaillant absolument tout, sans atteindre à un souffle ou à un quelconque parti dramatique personnel. C’est du Boulez plus que du Bernstein. L’olympisme de Sokhiev évite toute sauvagerie dyonisiaque. C’est notre réserve d’ordre poétique et expressive pour une approche qui reste pourtant passionnante par son fini et sa somptuosité instrumentale.

Stravinsky: L’oiseau de feu, Le sacre du printemps. Orchestre national du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev, direction. Enregistré à Toulouse, Halle aux grains, septembre 2011. 1 cd + 1 dvd Naïve. Référence Naïve V 5192.

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