vendredi 29 mars 2024

Paris. Opéra Comique, le 21 décembre 2012. Noverre, Rodolphe: Renaud et Armide, Médée et Jason. L’Éventail, Marie-Geneviève Massé. Le Concert Spirituel. Hervé Niquet, direction

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La compagnie de danse baroque « L’Éventail » présente ce soir les ballets de Noverre, Renaud et Armide et Médée et Jason, grâce au soutien du Centre de Musique Baroque de Versailles (dont la production marque la fin de sa remarquable saison musicale 2012), le Palazzetto Bru Zane de Venise (Centre de musique romantique française) et l’Opéra Comique de Paris.

Jean-Georges Noverre (1727-1810) est le véritable père de la danse moderne et le créateur des ballets d’action, précurseurs des ballets narratifs de l’ère romantique. Si ses ballets sont tombés dans l’obscurité malgré d’illustres collaborations (avec Rameau, Gluck et même Mozart!), ses Lettres sur la danse et sur les ballets publiés en 1760 sont en vérité, la bible de la danse classique. Nous nous réjouissons de pouvoir assister à la création des deux ballets présentés ce soir par la chorégraphe Marie-Geneviève Massé d’après Noverre, avec une mise en scène de Vincent Tavernier et les décors d’Antoine Fontaine.


L’enchantement des sens ou le classicisme réinterprété

La soirée commence avec Renaud et Armide, sorte de ballet-pantomime héroïco-féerique. La musique simple et descriptive, surtout efficace, de Jean-Joseph Rodolphe (compositeur fétiche de Noverre) est interprétée par les excellents musiciens du Concert Spirituel sous la direction d’Hervé Niquet. La chorégraphie de Genneviève Massé est très astucieuse et d’un entrain singulier. Si nous sommes loin de la danse du 18ème siècle, le ballet ensorcèle avec un certain contrepoint du mouvement. Noah Hellwig en Renaud est souple et sa petite batterie impressionnante, son cabriolé et ses sauts un peu moins. L’Armide de Sabine Novel est virtuose, d’un tempérament éclatant. Tous les danseurs font preuve d’un excellent travail des mains, surtout les habitants de mers.

Ensuite paraît le chef-d’œuvre de Noverre, le ballet tragique Médée et Jason. Ici la musique est un heureux pastiche de morceaux de la plume de Rodolphe, Berton, Dauvergne, Grétry et Vogel (ouverture). Le tout d’une puissance dramatique étonnante. Le Concert Spirituel est solennel et enragé à la fois, accentuant avec un brio presque romantique toute l’action du plateau. Émilie Brégougnon est une Créüse pétillante et pleine de grâce. Le Jason d’Adrian Navarro fait des sauts formidables mais il peine aux entrechats. La Médée de Sarah Berreby est très équilibrée avec une danse excellente et une présence sur scène à la fois glaciale et endiablée. Les scènes de foule et les rôles secondaires impressionnent également. Remarquons l’allégorie du Fer interprétée par Bruno Brenne en un athlétisme virtuose, comme le corinthien/la furie de Romain Arreghini d’un magnétisme et d’un naturel, plutôt séduisants.

Le splendeur de cette production est dû certainement à la convergence du talent des réalisateurs. L’authenticité des costumes d’Olivier Bériot, exotiques et diversifiés pour Renaud et Armide (effet saisissant de la symphonie de couleurs, originalité créative des formes), raffinés et archaïques pour Médée et Jason s’avère mémorable.
Les décors d’Antoine Fontaine fascinent davantage ; ils captivent et engagent les yeux des spectateurs par leur beauté tout-à-fait magique. La mise en scène de Vincent Tavernier est intelligente et d’une pertinence dramaturgique d’actualité. Remarquons ainsi le très bel et efficace positionnement du peuple corinthien et des furies pendant l’action. Seul bémol attristant, les costumes du peuple visibles sous les costumes de furies des danseurs.

Ce merveilleux partenariat (re)met en valeur le nom de Jean-Georges Noverre. Pour le ravissement des amateurs de la danse ou celui le plaisir d’un public général sensible au langage contemporain, la compagnie L’Éventail se montre idéalement inspirée cette fois-ci par le classicisme du 18ème siècle. Nous n’oublierons plus que la Journée Internationale de la Danse se célèbre chaque 29 avril en commémoration de la naissance du père de la danse moderne, Jean-Georges Noverre.

Paris. Opéra Comique, le 21 décembre 2012. Jean-Georges Noverre, Rodolphe: Renaud et Armide, Médée et Jason. Compagnie L’Éventail, Marie-Geneviève Massé. Le Concert Spirituel. Hervé Niquet, direction.

Illustration: Sarah Berreby dans le rôle de Médée (DR)
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