lundi 28 avril 2025

Opéra vu à la télé. Verdi: Rigoletto (Dresde, 2008) Arte, samedi 21 juin 2008. Damrau, Florez, Luisi…

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Opéra
Vu à la télé

Giuseppe Verdi: Rigoletto

Arte, samedi 21 juin 2008

En tête d’affiche, le ténor péruvien à l’aigu fluide
et fruité, au style élégant sans appui (Tonio de La Fille du Régiment,
Ernesto de Don Pasquale de Donizetti, mais aussi incontestable Almaviva
du Barbier de Séville de Rossini…), Juan Diego Florez, mais aussi la
soprano coloratoure Diana Damrau, actrice autant que cantatrice vive et
engagée sur la scène. A Dresde, après Lima, le ténor « ose » le Duc de
Mantoue du Rigoletto de Verdi.

Les fines bouches, pseudo spécialistes, grimaceront:
l’agilité et l’aisance vocale ne font pas tout, il faut aussi le
tempérament. Evidemment dès qu’il est dans l’arrière scène, Florez est
couvert par l’orchestre: la puissance n’est pas sa première qualité.
D’autant que le ténor se ménage et ne donne pas les suraigus tenus
qu’on espérait…. mais le style, l’aplomb séduisent: le chanteur
incarne bien l’ardeur juvénile et libidineuse du rôle, un être porté
par son désir et son besoin continu de jouissance… Entre ses bras, la
trop romantique Gilda, brûle et se consume, victime immolée sur l’autel
de la jouissance, la jeune femme perd tout, sacrifie tout , y compris
sa vie… telle est la malédiction qui s’abat sur le père, le bouffon
de la Cour ducale, Rigoletto, lequel perd ainsi ce qu’il a de plus
cher. En Gilda, Diana Damrau offre son angélisme fièvreux: elle désigne
l’héroïne romantique par excellence, avec une implication louable (son
« Caro nome » est juste, émotionel et d’une musicalité parfaite). Dans le
rôle titre, Željko Lučić campe un amuseur critique cynique et amer, un
Rigoletto, plien de rancoeur et d’impuissance, cachant sa fille comme
il peut, sans pourtant réussir à la préserver des mondanités
corruptrices… le métier est indiscutable, sans heurts ni failles. Du
tableau fantastique et tragique qui voit l’assassinat de la pauvre
amoureuse, retenons surtout l’impeccable jeune basse Georg Zeppenfeld:
carrure, ampleur et caractère, son Sparafucile a bien la mine
terrifinate d’un tueur à gages, sans état d’âme, froid et efficace.
Dans la fosse, Fabio Luisi, depuis le décès de Sinopoli, chef de la
phalange dresdoise, insuffle nerf et drame à la partition verdienne,
accentuant les contrastes de caractère, la violence et la sauvagerie de
l’opéra que la mise en scène de Nikolaus Lehnhoff, renforce davantage.
On sait quel lecteur fidèle de Wagner est le metteur en scène (Parsifal
entre autres). Fidèle à sa manière, entre expressionnisme et synthèse,
Lehnhoff souligne la laideur de la Cour (dans le premier tableau, foyer
d’un bestiaire à la fois fantastique et surréaliste, érotique et
sadique, à la Leonor Fini), l’innocence violée de Gilda (la tâche de
sang sur robe, pauvre et dérisoire victime dans l’océan des turpitudes
humaines), l’ivresse immorale du Duc aiguillonné par son désir, la
paternité lyrique et doloriste de Rigoletto. Le regard est vif, affûté,
mordant, aigre, amer, désillusionné… comme le rire de Rigoletto.
Production prenante.

Giuseppe Verdi (1813-1901): Rigoletto. Opéra
en 3 actes sur un livret de Francesco Maria Piave, d’après Le roi
s’amuse de Victor Hugo (1832). Créé à Venise, le 11 mars 1851.
Rigoletto : Željko Lučić. Gilda : Diana Damrau. Le Duc de Mantoue : Juan Diego Florez. Sparafucile : Georg Zeppenfeld. Maddalena : Sofi Lorentzen. Giovanna : Angela Liebold. Contessa Ceprano : Kyung-Hae Kang. Conte
Monterone : Matthias Henneberg. Matteo Borsa : Oliver Ringelhahn. Marullo : Christoph Pohl. Conte Ceprano : Sangmin Lee. il Paggio : Lin Lin Fan. Chœur de l’Opéra de Dresde (chef de chœur : Ulrich Paetzold). Sächsische Staatskapelle Dresden. Fabio Luisi, direction. Mise en scène : Nikolaus Lehnhoff.
Décors : Raimund Bauer. Costumes : Bettina Walter. Lumières : Paul Pyant. Chorégraphie : Daniel Dooner.

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