mercredi 7 mai 2025

Maurice Ravel: le piano de Ravel. Alexandre Thaurad France Musique, le 3 septembre 2009 à 20h

A lire aussi
Maurice Ravel

Oeuvres pour piano

Alexandre Tharaud, piano

France Musique
Le 3 septembre 2009 à 20h

Le Piano de Ravel

S’agissant du piano de Ravel, comme dans sa musique instrumentale ou lyrique l’écriture défend sans rien y paraître, une réforme en douceur, un néoclassicisme appuyé, hommage à Couperin ou à Haydn, mais l’audace harmonique et les nouveautés techniciennes sont bien là, attestant d’un tempérament hors du commun.
Pourtant Maurice Ravel ne fut pas un pianiste virtuose (il reconnaissait lui-même avoir des difficultés pour jouer Miroirs, demandant par exemple à Gaby Casadesus de les enregistrer à sa place…
Le Tombeau de Couperin est une relecture personnelle, réformatrice et là encore, toute en délicatesse opérée sur la Suite de danses Baroque. Revisitée, modernisée,… le classicisme des 17 et 18è résonne chez Ravel comme une toile diaphane mais raffinée (par sa couleur), facétieuse par la liberté de sa touche, ombres suggestives et pourtant d’une forte présence d’un Watteau…
Ravel y relit la fugue et surtout la forlane, danse emportée d’un regard d’autant plus espiègle voire capricieux qu’il s’agit d’une danse de courtisane, de commerciales aguicheuses… (précisément inspirée de la Forlane du 4è Concert Royal, 1722). Distance mais pas froideur, suprême élégance, activité et nostalgie… surtout pudeur et raffinement: le style de Ravel ne semble pas avoir été mieux inspiré que par le motif baroque.

Compositeur pianiste

Le pianiste est certes précoce (il apprend dès 6 ans auprès d’Henry Ghys en 1882 les premiers rudiments de l’instrument), mais pas virtuose. La formation suit sous le regard d’Emile Descombes, élève de Chopin, et au Conservatoire avec Charles Wilfrid de Bériot, fils de La Malibran et du violoniste Charles de Bériot. Mais Ravel est congédié pour absentéisme et manque d’assiduité dans l’écoute. Le Compositeur qui se révèle alors a néanmoins besoin du piano pour écrire et trouver ses inimitables harmonies … il perfectionne sa technique auprès de l’espagnol Santiago Riera. Trop peu régulier au clavier, raide dans l’utilisation de ses poignets, Ravel sonnait « sec » et court, selon les témoignages (pas forcément les plus objectifs).
A défaut d’une digitalité fluide, le compositeur savait cependant faire flotter les sons, et « répandre » ses divins accords harmoniques.
Pour Ravel, le piano est un laboratoire auquel il doit beaucoup. Dans l’exigence de l’écriture, le compositeur trouve ses propres procédés: mains superposées, placages d’accords, guirlandes flamboyantes de notes accumulées, dispersion apparente mais complexe des rythmes mêlés, indépendance des plans (Miroirs et Gibet de Gaspard de la nuit), avec dans ses nombreux grands écarts, une affection particulière (signature) pour l’intervalle de seconde (peut-être en liaison avec la conformation de ses pouces – « un peu carrés du bout »-, particulièrement véloces et agiles pour les glissandis (Alborada del gracioso)…
Inspiré et conseillé aussi par Ricardo Vines, autre concertiste espagnol approché, Ravel développe une technique lisztéenne, emblématique des richesses en sonorité (Jeux d’eau où se révèle aussi l’influence de Saint-Saëns qui fut un immense concertiste et dans lesquels le crescendo et l’accelerando doivent être joués à la liszt). Miroirs quant à eux évoquent la leggierezza de Liszt (toujours) et de Debussy. Ravel sait aussi manier le pastiche comme peu avant lui: souvenir et manière de Borodine, de Chabrier… tout souvenir et hommage à des êtres chers ou admirés résonne avec intensité sous sa plume ciselée. Comme nous le montre le programme de ce concert captivant, sous les doigts d’un pianiste visiblement habité par l’univers ravélien.

Concert donné le 17 juin 2009 au Théâtre des Champs-Elysées à Paris,
dans le cadre de Piano aux Champs-Elysées

Maurice Ravel

A la manière de…Chabrier
Menuet antique
Sérénade grotesque
Miroir
Jeux d’eau
Le Tombeau de Couperin
A la manière de…Borodine
Sonatine en fa mineur
Prélude en la mineur
Menuet en ut dièse Majeur : 1904, inédit
Menuet sur le nom de Haydn
Valses nobles et sentimentales
Pavane pour une infante défunte
Gaspard de la nuit

Alexandre Tharaud, piano

Derniers articles

STREAMING, documentaire, ARTE. les 150 ans de la création de CARMEN, naissance d’un mythe, Dim 1er juin 2025 sur ARTE.TV

L’anniversaire Carmen dont la création à Paris eut lieu début mars 1875 quelques semaines avant la mort de son...

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img