METZ, Cycle CLARA IANNOTTA : les 5 fév, 25 et 31 mars 2020. LA FABRIQUE SONORE… Son vif intérêt pour la fabrication des objets remonte à l’enfance quand son père architecte lui expliquait qu’il ne faut pas acheter ses jouets mais les fabriquer. Ce qui est mieux si l’on veut comprendre les mécanismes et élargir son propre imaginaire. Depuis Clara Iannotta (née à Rome en 1983) développe sa propre idée du son ; non pas à partir d’une instrumentation déjà établie, mais en fonction des objets qu’elle peut elle-même construire, et des nouveaux sons que ses « jouets sonores » permettent.
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Résidence à l’Arsenal de METZ
La fabrique sonore de Clara IANNOTTA
L’idée de base, préalable à toute pièce peut-être une vision, une expérience, une sensation. Pour le cas de MOULT pour orchestre, le noyau préliminaire a été l’observation pendant sa résidence à la Villa Medicis en 2019, des mues des araignées ; en particulier leur capacité à produire deux états tangibles de leur existence : la peau morte, du passé ; la nouvelle enveloppe, celle de leur nouvelle existence. Il s’en est suivi l’élaboration d’une partition qui mêle le son de l’orchestre aux champs sonores issus de cassettes préenregistrées (écoutez ici MOULT (2018-2019) pour orchestre : https://soundcloud.com/claraiannotta). L’immersion dans un univers sonore inédit est total : la force des ondes convoque le bruit des planètes et les micro craquements, presque organiques, évoquent le grouillement secret, imperceptible d’une vie continue, souterraine et présente (durée : presque 17mn).
La résidence qui lui a été offerte par l’Arsenal de Metz découle de l’enthousiasme de David Reiland, actuel directeur de l’Orchestre National de Metz à la suite de son écoute de « Dead wasps » en 2016. L’idée de proposer à Clara Iannotta d’écrire pour l’Orchestre National de Metz a germé chez l’un et l’autre ; le chef étant curieux de découvrir ce que l’approche hors normes de la compositrice romaine peut apporter aux musiciens de l’orchestre… Une interrogation qui devrait se concrétiser en septembre 2021 avec la création d’une nouvelle œuvre pour orchestre que la compositrice amorcera fin 2020 ; d’une durée d’environ 20 mn, la partition sera étroitement conçue aux côtés des instrumentistes de l’orchestre, précisément pour préparer leurs instruments en vue de la réalisation de l’œuvre. Dans le cadre de sa saison 2019 – 2020, la Cité Musicale METZ offre des conditions optimales aux interprètes et créatrices d’aujourd’hui, les laissant libres d’approfondir encore et encore la réalisation de leur travail. C’est le cas de la danseuse Sarah Baltzinger qui a créé son dernier ballet le 29 janvier « Don’t you see it coming ? » LIRE notre présentation de cette création qui explore le mythe de Barbe-Bleue. C’est aussi le cas de la joueuse de marimba Vasselina Serafimova qui présente comme Clara Iannotta une série de programmes de son cru, avec les partenaires et les complicités choisis, dont le nouveau programme « Time », réalisé in loco le 9 janvier dernier… LIRE notre article METZ, Arsenal : l’écrin des musiciennes.
ACTIONS PEDAGOGIQUES… Présente sur le territoire et dans la ville de Metz, la compositrice italienne associe étroitement les jeunes publics à sa quête des nouveaux sons. Elle fait de la pratique musicale, un voyage et une expérience. De quoi accrocher concrètement l’intérêt des jeunes. En atelier (3 février), autour de la notion de « jouets sonores », Clara Iannotta présente et explique son travail aux lycéens, certains n’étant pas musiciens : « ce qui est beaucoup plus intéressant et riche dans nos échanges car ils sont sans préjugés », précise la musicienne. Elle commente ce qui l’inspiré au cours de l’écriture de Dead wasps ; pourquoi il s’agit de concevoir puis fabriquer les instruments nouveaux ; le titre de cette pièce comprend 3 volets ; au départ, il s’agissait d’une commande afin d’inventer une suite à la Courante de la Partita de JS Bach ; après une analyse très fouillée de l’écriture, des sauts de notes, des échelles très rapides enchaînées, Clara Iannotta s’est intéressée aux glissandos ; elle en a déduit des images et des mondes sonores inédits, puis a identifié les gestes et la pratique nouvelle, adaptés aux cordes pour produire les sons. Sur le site de Clara Ianotta, il est possible d’écouter Dead wasps in the jam-jar (III) par la Quatuor Diotima (nov 2018) : ici : http://claraiannotta.com/2019/01/hear-dead-wasps-in-the-jam-jar-iii/
Illustration : Clara IANNOTTA © L Hossepied
L’ÉCOLE DE L’ÉCOUTE… En une démarche ludique et pédagogique, les lycéens messins comprendront à regarder et mesurer un son, à le questionner c’est à dire à deviner le geste qui le produit ; et la matière du « jouet sonore » dont il fait. « C’est un voyage interne dans le son, dans sa matérialité, sa densité, sa texture, sa genèse. Je ne m’intéresse pas à la temporalité musicale, c’est à dire à la notion de déroulement horizontal ; comment une note va d’un point A et à point B, ni à son développement, ni à l’enchaînement des sons différents. Avec les lycéens, j’aimerai regarder chaque son au microscope ; jauger, arpenter sa profondeur ; il s’agit d’une école de l’écoute ; il en résulte la découverte de craquements, de bruits, de dynamiques diverses. Mon approche est concrète. Avec les lycéens, je souhaite ensuite fabriquer les instruments qui produiront le son dont nous avons l’idée ; puis nous travaillerons de concert avec les élèves compositeurs du Conservatoire qui seront invités à composer pour les jouets sonores ainsi fabriqués », précise Clara Iannotta.
JOUETS MOTORISÉS : la « e-bow machine »… L’inventivité sonore de Clara Iannotta sait aussi détourner les instruments classiques. A partir du clavecin dont elle n’aime pas le son, ni son timbre, ni sa durée trop courte, la compositrice s’est intéressée à l’apport des ondes magnétiques révélées par l’utilisation des aimants agissant autour des cordes et qui produisent des ondes sonores sans contact (écoutez « Improvisation with my e-bow circuit machine, déc 2019 » ; ici : https://soundcloud.com/claraiannotta). Le geste né du e-bow permet de produire une vague sonore particulièrement stable et puissante (l’inverse du clavecin). C’est l’apport des instruments motorisés, autre voie de recherche que développe la compositrice avec la complicité de son partenaire depuis 2014, l’ingénieur Jan Bernstein. L’onde se déploie comme un rayon continu, comme un faisceau saisissant par son intensité ; la machine permet de régler au millimètre la fréquence, et dans sa hauteur et dans sa longueur. Clara Iannotta en contraste et pour enrichir encore la texture de la matière sonore ainsi produite, ajoute des frottements, des enroulements percussifs qui semblent se cristalliser sur l’onde… Le spectre expressif de ce champs électromagnétique est spectaculaire et hypnotique. De quoi renforcer la place de l’Arsenal de METZ tel un laboratoire musical, le lieu des expérimentations imprévues. Et si désormais les nouvelles voies de la recherche musicale contemporaine montraient leurs visages à Metz ? Cycle à suivre.
AGENDA : les concerts de CLARA IANNOTTA à venir à METZ
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REVERIES ITALIENNES
mer 5 février 2020, 20h
Arsenal Salle de l’Esplanade
Produire de nouveaux univers sonores, réinventer les formes du concert… la quête des compositeurs contemporains italiens Clara Iannotta et Francesco Filidei, « figures de la nouvelle génération », s’avère passionnante. L’Ensemble Linea permet la réalisation des sonorités envisagées, « innover en transformant des objets en instruments et mettre l’inventivité au service du spectacle ». Ainsi le concert conçoit le jeu comme terreau d’expérimentation et renforce le pouvoir onirique de la musique. C’est le cas des deux œuvres de Clara Iannotta à l’affiche de ce concert dont l’envoûtant Eclipse Plumage…
Durée : 1h10 – Ensemble Linea, direction : Jean-Philippe Wurtz
ECLIPSE PLUMAGE (2019)
Pour la première fois à Metz, Clara Iannotta travaille avec l’ensemble électronique Linea, un collectif qu’elle connaît mais avec lequel elle n’avait encore jamais réalisé de programmes. Eclipse Plumage est une nouvelle réflexion / recherche sur le parcours sinusoïdal des ondes, en un jeux de vibrations et de distorsions, selon que les aimants se rapprochent des cordes. En jouant sur le dessin des crêtes, l’intensité des pulsations, la compositrice semble dilater l’espace et le temps, les replier en une suite de signaux dont elle modifie constamment l’amplitude et la fréquence, mais en demeurant toujours dans la verticalité du son. Ici aucune recherche sur le développement temporel, l’idée d’une construction logique comme d’un déplacement mélodique ou harmonique cadré et formaté. Clara Iannotta met en lumière la notion des temporalités non fixes et jamais semblables. D’ailleurs pour elle, l’idée d’un temps identique n’existe pas. Il y a des temporalités multiples, simultanées. Pas de temps universel. Il semble que le matériau sonore s’organise en failles vertigineuses où s’engouffrent et se libèrent des éclats de matières sonores mobiles ; où surgissent aussi des hululements sourds évoquant toujours ce rapport trouble dans l’imaginaire de la compositrice, entre bruits abstraits et cris du vivant. La réalisation est toujours saisissante. Ecoutez ici Eclipse plumage (2019) : https://soundcloud.com/claraiannotta
(durée : 18mn).
Programme :
Francesco Filidei : Finito ogni gesto, Ballata 3
Clara Iannotta : ECLIPSE PLUMAGE – D’après Troglodyte Angels Clank By
RESERVEZ ici :
https://www.citemusicale-metz.fr/agenda/reveries-italiennes
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MIGRANTES
mer 25 mars 2020, 20h
Arsenal Salle de l’Esplanade
Engagé sur le front des métissages culturels et de la création, l’Ensemble Linea propose dans « Migrantes », un concert abordant les thèmes de la migration et de l’égalité des genres. « Composé d’œuvres écrites par des femmes originaires d’Asie, du Moyen Orient, d’Océanie ou d’Europe, ce programme rend hommage à la richesse des croisements culturels et au courage, à l’humanité et à la force de femmes artistes qui, partout dans le monde, tentent de faire entendre leur propre voix et celle d’une culture imprégnée de métissages ». Clara Iannotta ouvre ce concert avec « Paw-marks in wet cement (ii) », partition sur la mémoire.
Durée : 1h – Ensemble Linea, direction : Jean-Philippe Wurtz / contrebasse : Florentin Ginot
Clara Ianotta présente sa nouvelle version du Concerto pour piano ; il ne s’agit pas d’une œuvre concertante classique, mais du jeu simultané de 3 instrumentistes qui jouent dans le piano. Tous les sons de l’œuvre proviennent du piano, lieu de transformation, boîte expérimentale et caisse de résonance unique d’où jaillissent et se fondent les sons, à partir du clavier « préparé »
Programme :
Clara Iannotta : Paw-marks in wet cement (ii)
Zeynep Toraman : …A gilding process that echoes back to ancient times (Création mondiale).
Liza Lim : The table of knowledge pour contrebasse seule
Feliz Macahis : Nouvelle oeuvre pour ensemble Création
Rebecca Saunders : Fury II pour contrebasse et ensemble
RESERVEZ ici :
https://www.citemusicale-metz.fr/agenda/migrantes
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BEETHOVEN ET LA MODERNITÉ
mar 31 mars 2020, 20h
Arsenal, Salle de l’Esplanade
Clara Iannotta, poursuit sa résidence à la Cité musicale-Metz, et dévoile de nouveaux fragments de son travail en cours d’accomplissement. A partir des objets dont elle fait des instruments, la compositrice italienne réinvente son propre spectre sonore, envisage de nouvelles passerelles entre expérimentation ludique et nouvelles écritures sonores.
Complices de ce labyrinthe aux prolongements inédits, les instrumentistes du Quatuor DIOTIMA repousse les frontières de l’exploration esthétique : « Dead wasps in the jam-jar (iii) » plonge le spectateur dans « d’insondables profondeurs où le solo du violon s’étire dans des dimensions océaniques ». Pour l’année Beethoven 2020, dont est joué le sublime et visionnaire Quatuor n°15, les Diotima tisse les passerelles entre le prophète romantique et les perspectives ouvertes énoncées, permises par l’écriture de Carla Iannotta. La musique n’est-elle pas un questionnement continu qui ne cesse de réinventer les formes de l’avenir ?
Durée : 1h30 – Quatuor Diotima.
Clara Iannotta présente le 3è volet du cycle Dead wasps, réflexion et recherche spécifiques sur les glissandos et les sauts, créant à partir des instruments à cordes joués autrement, les sinus harmoniques inédits qui semblent à la fois immobiles et infinis.
Programme :
Karol Szymanovski : Quatuor n°2
Clara Iannotta : « Dead wasps in the jam-jar » (iii)
pour quatuor à cordes et électronique
Ludwig van Beethoven : Quatuor n°15
RESERVEZ ici:
https://www.citemusicale-metz.fr/agenda/beethoven-et-la-modernite
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RESERVATIONS & INFORMATIONS
3 programmes événements de CLARA IANNOTTA à METZ
https://www.citemusicale-metz.fr
LIRE aussi notre présentation des 5 temps forts de la saison musicale 2019 2020 à la Cité musicale METZ
https://www.classiquenews.com/metz-cite-musical-metz-saison-2019-2020-temps-forts/
ECOUTER VOIR CLARA IANNOTTA :
skull ark, upturned with no mast (2017–18) from Clara Iannotta on Vimeo.