Jules Massenet
Manon, 1884
Opéra comique en cinq actes et six tableaux (1884)
Musique de Jules Massenet (1842 – 1912)
Livret de Henri Meilhac et Philippe Gille d’après le roman de l’Abbé Prévost
Evelino Pido, direction

Au librettiste, Henri Meilhac reconnaissons l’efficacité du texte mis en
musique par Massenet à partir de 1882: Manon ainsi recomposée reste
avec une autre figure de femme, Carmen, également adapté et réécrit par
Meilhac, le plus grand succès de l’Opéra-Comique.
Du roman original écrit à la première personne par l’Abbé Prévost,
Meilhac reconstruit la trame dramatique qui voit la chute de la trop
fragile Manon, détruite par l’illusion citadine, son rythme trépidant,
et la fourberie de ses admirateurs… L’acte III avec son « Cours La
Reine, comprenant un ballet (de rigueur sur une scène française) est
l’invention de Meilhac. Comme pressés, il est vrai que le roman est très
long dans l’évocation de la mort de l’héroïne, Meilhac et Massenet font
mourir Manon sur la route du Havre et non dans la lointaine Louisiane. En lire +

n’a pas autant convaincu que celle qui l’a précédée, laquelle créée en
1997 marquait l’entrée de l’oeuvre à l’Opéra national de Paris…
première production au demeurant plus complète (mise en scène de
Gilbert Deflo) et il est vrai si magnifiquement défendue par Renée
Fleming dans le rôle-titre : l’ancienne production comprenait à la fin
du Cours la Reine (III) et avant la fameuse confrontation à
Saint-Sulpice, le tableau de l’opéra et du ballet… curieuse coupure
qui nous prive d’une partie de la partition quand, au moment de l’année
Massenet, c’est toute sa musique qu’il faudrait jouer, d’autant qu’on
peine toujours à mesurer la subtilité dont le compositeur est capable,
en particulier dans ce jeu très maîtrisé des distanciations: l’épisode
de l’opéra dans l’opéra permet à Massenet, génie de l’éclectisme musical
et des citations historicisantes (comme son égal, le peintre Gérôme,
autre grand faiseur d’images,) de réussir les mises en abîme, la
construction en perspective, l’évocation des périodes anciennes dans une
écriture réactualisée, en renouvellement perpétuel… Pour chacun de
ses ouvrages, de Manon à Thaïs, d’Hérodiade à Thérèse, d’Esclarmonde
au Mage, du Roi de Lahore au Joueur de Notre-Dame, la science de
Massenet s’impose à nous par sa capacité à varier et à inventer: c’est
d’ailleurs tout l’enseignement de l’exposition actuellement présentée à
la Bibliothèque-musée de l’Opéra, au Palais Garnier : « La Belle Epoque
de Jules Massenet » (lire nos précisions en fin de compte rendu). Lire notre compte rendu critique intégral
