vendredi 19 avril 2024

Henri Dutilleux, compositeur Portrait à l’occasion de ses 93 ans, le 22 janvier 2009

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Anniversaire
les 93 ans
du compositeur

Henri Dutilleux,

le 22 janvier 2009

Né à Angers (Maine-et-Loire) le 22 janvier 1916, Henri Dutilleux qui est aussi l’arrière-petit-fils de Constant Dutilleux, un peintre proche de Delacroix, souffle ses 93 ans ce 22 janvier 2009.

Encouragé par ses parents, le jeune Dutilleux suit un apprentissage classique qui confirme sa vocation: piano, théorie d’harmonie et contrepoint (Conservatoire de Douai), puis composition avec Henri Busser (Conservatoire de Paris).
Avant de servir les drapeaux en 1939, Dutilleux remporte le premier Prix de Rome en 1938 avec la cantate L’Anneau du Roi qui révèle sa connaissance intime et profonde de D’Indy, Stravinski et Roussel.
Dès 1944, Dutilleux travaille pour la Radiodiffusion française où il pilote le service des Illustrations Musicales jusqu’en 1963. Son activité de compositeur s’intensifie et il décide de ne s’engager simultanément à l’écriture que dans une seule fonction : la pédagogie. Ainsi Alfred Cortot l’appelle en 1961 comme professeur de composition à l’École Normale de Musique de Paris puis, à partir de 1970, il devient professeur associé au Conservatoire.
Le créateur qui tout en découvrant les grandes esthétiques de son temps, de Bartok et Stravinsky, au sérialisme, s’en imprègne tout en s’écartant de leurs lois, est célébré et reconnu dès son vivant pour son style propre, comme en témoigne le Grand Prix national de la Musique qui lui est remis en 1967, couronnant ainsi un catalogue déjà important. Ses oeuvres qui constituent une totalité « organique » dans laquelle se déploie une poésie de la clarté sonore, sont jouées partout dans le monde, en particulier par son épouse, la pianiste Geneviève Joy.
Ses premières oeuvres remontent aux années 1940 (Quatre mélodies pour chant et piano, 1943; Geôle pour voix et orchestre, 1944). Les oeuvres majeures paraissent dans le courant des années 1950 (sa première symphonie n°1 en 1951; le ballet Le Loup, 1953; Symphonie n°2, créée à Boston par Charles Münch en 1959), cycle de maturation couronné par une partition parmi les plus jouées aujourd’hui: Les Métaboles (1965).


Un Atonal classique



Les oeuvres sont rares mais leur qualité indiscutable qui rencontre la faveur du public: Quatuor à cordes Ainsi la nuit (1977). Dutilleux a écrit pour les interprètes qui l’ont souhaité. Son épouse certes mais aussi entre autres, Mtislav Rostropovitch (Concerto pour violoncelle et orchestre Tout un monde lointain, 1970; d’après Baudelaire), la violoniste Anne-Sophie Mutter (Sur un même accord, 2002), la soprano Dawn Upshaw (Correspondances, 2003). Si Dusapin, autre compositeur français, est très joué à notre époque, en particulier grâce à ses nombreuses oeuvres vocales, Dutilleux fascine différemment par son histoire voire ses racines symphoniques, une « tradition » personnelle qui le rapproche de son cadet finlandais, Einojuhani Rautavaara (80 ans, le 9 octobre 2008). Chaque forme orchestrale de Dutilleux réussit une gageure: être atonal tout en demeurant classique. En cela, le compositeur réalise une continuité éloquente et singulière avec les ciseleurs impressionnistes, génies de la forme, du flux, de la couleur. Plus que tout autre, Dutilleux se montre un disciple de Debussy. Ses 2 symphonies écrites en 1951 et 1959, inaugurent une série d’oeuvres dont les parties intitulées de noms poétiques visionnaires et suggestifs, rappellent l’exigence climatique de chaque épisode, comme la grande culture littéraire du compositeur. Des partitions qui sont conçues comme autant de tableaux énigmatiques et interrogatifs d’une grande charge émotionnelle, lancé hors des contingences d’espace et de temps: ainsi ses autres oeuvres récentes, le Concerto pour violon sous-titré L’arbre des songes (1980-1985), les Mystères de l’instant (1986-1989) enchaînent dix mouvements (et autant de titres) quand les Shadows of time (1995-1997) contiennent Les heures, Ariel maléfique, Mémoire des ombres, Vagues de lumière et Dominante bleue.
Le trait de Dutilleux n’est pas la rupture, comme les Viennois avec le système du sérialisme mais plutôt l’enrichissement et la fragmentation infinitésimal de l’harmonie, la surenchère en miroir d’accords nouveaux qui inaugurent la dissolution de la couleur et de la tonalité unique en une vibration éclatée du matériau musical. Entre l’harmonie debussyste et les compositeurs spectraux dont l’apogée marque les années 1970, le compositeur ouvre une faille médiane tout autant mystérieuse et comme inscrite sous l’ombre invocatoire de la nuit et du temps suspendu, dans une filière somme toute elle aussi « traditionnelle », comme son inspiration d’après « Sous la voûte étoilée« , d’après Van Gogh, le confirme. Se refusant à tout système réducteur, en rien adepte du concept de la table rase à la façon de Boulez, Dutilleux, à la sensibilité littéraire et poétique explicitement inscrite dans le sillage de Proust, n’utilise pas l’ordinateur ni les effets électroacoustiques des sons présélectionnés.

Henri Dutilleux obtient en janvier 2004 la dignité de Grand-croix de la Légion d’honneur, et, après Messien et Boulez, le Prix Ernst von Siemens le 29 janvier 2005 (à l’âge de 89 ans), distinction estimée comme le « Nobel de la musique ». Britten en 1974 avait été le premier compositeur ainsi consacré.


télé

Mezzo célèbre les 93 ans d’Henri Dutilleux, le 22 janvier 2009 à partir de 20h30.

Soirée exceptionnelle, en 3 programmes inédits, dédiée à l’oeuvre et la figure du compositeur français. Ce soir, la chaîne Mezzo rend hommage à Henri Dutilleux l’un des compositeurs de musique française contemporaine dont la renommée est internationale.
Cette soirée se décline autour de trois programmes inédits qui permettent de s’immerger dans l’univers intime de l’auteur afin de mieux comprendre l’homme et son œuvre.

20h30
Tout un monde lointain, concerto pour violoncelle et orchestre d’Henri Dutilleux
Orchestre de Mannheim dirigé par Frédéric Chaslin
Concert (2008- 30mn); réalisation : Hervé White.

21h05
Répétition et équilibre : L’Orchestre et le soliste
Orchestre de Mannheim dirigé par Frédéric Chaslin (en présence d’Henri Dutilleux)
Documentaire (2008- 30mn) ; réalisation : Hervé White

21h40
Henri Dutilleux et Henri Demarquette
Rencontre entre le compositeur et l’interprète dans la maison même d’Henri Dutilleux.
Documentaire (2008 – 54mn) ; réalisation : Hervé White.


Catalogue des oeuvres

Sarabande et Cortège (1942), 2 pièces pour basson et piano
Sonatine pour flute (1943)
Sonate pour hautbois (1947)
Sonate pour piano (1948) créée par son épouse Geneviève Joy.
Symphonie n° 1 (1951)
Le Loup (1953), ballet écrit pour la compagnie Roland Petit.
Chansons de bord (1954), ensemble de dix chansons harmonisées pour chœur d’enfants à trois voix.
Symphonie n° 2 « Le Double » (1959) où un groupe réduit d’instrumentistes répond à un grand orchestre. Commande de la Fondation Koussevitzky pour l’Orchestre symphonique de Boston, direction Charles Münch.
Métaboles (1965) cinq pièces pour orchestre, commande de l’Orchestre de Cleveland, direction George Szell.
Tout un monde lointain… (1970) pour violoncelle et orchestre, inspiré par des poèmes de Charles Baudelaire. Commande de Mstislav Rostropovitch.
Trois strophes sur le nom de Sacher (1976) pour violoncelle seul. Commande de Mstislav Rostropovitch.
Ainsi la Nuit (1977) pour quatuor à cordes. Commande de la Fondation Koussevitzky pour le Juilliard String Quartet.
Timbres, espace, mouvement ou La Nuit Étoilée (1978) pour orchestre, inspiré du tableau éponyme de Vincent van Gogh.
L’Arbre des Songes (1985) pour violon et orchestre. Commande de l’Orchestre National de France pour Isaac Stern, direction Lorin Maazel.
Mystère de l’Instant (1989) pour cymbalum, orchestre de 24 ou 48 cordes et percussions. Commande de Paul Sacher pour le Collegium Musicum de Zurich.
Les Citations (1991) pour hautbois, clavecin, contrebasse et percussions.
The Shadows of Time (1997) pour orchestre et voix d’enfants. Commande de l’Orchestre symphonique de Boston, direction Seiji Ozawa.
Sur le même accord (2002), nocturne pour violon et orchestre, dédié à Anne-Sophie Mutter.
Correspondances (2003) pour voix et orchestre, cycle de cinq mélodies dédié à la soprano Dawn Upshaw.Textes de Prithwindra Mukherjee, Soljenitsyne, Rilke et Vincent van Gogh. Commande de l’Orchestre philharmonique de Berlin, direction Sir Simon Rattle.
Le Temps l’horloge (2007) pour voix et orchestre, dédié à la soprano américaine Renée Fleming. Textes de Jean Tardieu et Robert Desnos. Commande conjointe de l’Orchestre symphonique de Boston, de l’Orchestre national de France et du festival Saito Kinen. Création le 6 septembre 2007 par l’Orchestre international Saito Kinen sous la baguette de Seiji Ozawa.

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