Qui est Félicien David ? 2014 : année Félicien David (1810-1876). Oratorios et musique de chambre sont aujourd’hui rejoués dans le cadre d’un » festival Félicien David » dont les concerts ont lieu partout en Europe … Un visionnaire oublié, l’inventeur de l’orientalisme musical en France, un déraciné en quête d’identité , un idéaliste non commercial – de fait, saint-simonien fervent? Un peu tout cela. Mais il est certain que le compositeur contemporain de Berlioz et donc l’un des piliers à redécouvrir du romantisme hexagonal a trouvé sa voix, comme Delacroix, en Orient. Il a le choc de l’Afrique et reste ébloui par l’Egypte : il rêvera sous la voûte étoilée du Temple égyptien à l’ombre des pyramides de Saqqarah ; il arpentera à dos de chameau les dunes dorées des déserts brûlants au-delà du Caire… Conjonction exceptionnelle du calendrier des concerts – plutôt nouvel initiative fédératrice du « Palazzetto » (entendez PBZ, Palazzetto Bru Zane), Félicien David voit nombre de ses oeuvres majeures être jouées et donc réhabilitées en plusieurs lieux européens, de Venise, Versailles, Paris, à Clermont Ferrand, Sofia, Thessalonique et jusqu’au Festival Berlioz de la Côte-Saint-André, de mars à août 2014, avec en point d’orgue, le festival Félicien David à Venise (5 avril > 17 mai 2014 où sont ressuscitées surtout les jalons de sa musique de chambre majoritairement composée à la fin de sa vie vers 1870 : l’intimisme et la petite forme étant plus adaptés au salon de musique du Palazzetto vénitien..). On rêverait demain de voir rayonner tous ces noms du romantisme français en Asie et en Amérique du Sud. Un pari relevé bientôt par le Centre de musique romantique française ? Pour l’heure, faîtes donc votre cure David, à Venise ou à Sofia, à Versailles ou à Paris, en cette fin d’hiver et pour le printemps à venir.
L’art d’être romantique et … saint-simonien
« J’aime à être romantique à la manière de Beethoven et de Weber, c’est-à-dire neuf, original, profond comme eux », déclare David. Un visionnaire et un original, on vous l’a dit. Son ode symphonique (notez l’originalité de la forme, à la manière de l’inventivité berliozienne, celui qui compose une légende dramatique pour le mythe de Faust : ici à la fois oratorio et mélodrame, avec récitant) : Le Désert (1844) qui lui a permis de se faire définitivement connaître, comme fondateur de la mode orientaliste en France (les peintres l’avaient en vérité déjà lancé…). Mais musicalement, David ne fait que prolonger ce goût exotique déjà marqué par Rameau (Les Indes Galantes), Grétry (La Caravane du Caire), Catel (Les Bayadères)… œuvres parfois fourre-tout, aux épisodes décousus, mais si stimulantes pour l’imaginaire artistique. Un laboratoire. Les quatre préludes de Christophe Colomb (1847, autre oratorio d’un genre renouvelé) aiguise cette habilité à peindre par l’orchestre de vastes paysages sonores à l’infini poétique, riche en lointains évocatoires, en perspectives heureuses (mais Haydn ne l’avait-il pas déjà réalisé dans son oratorio La Création de 1800, lui-même s’inspirant du souffle visionnaire de leur père à tous, Haendel?).
Monumentale fresque à l’époque de l’échec du Tannhaüser de Wagner, Herculanum (1859) associe antique et exotique, fantastique (romantique) et politique (religieux) : une sorte d’épopée hollywoodienne, un peplum d’un style ambitieux inédit alors qui recycle les grands emplois de la tradition opératique : un mezzo rossinien gazouille aux côtés d’un grand soprano dramatique et tragique venu de chez Gluck. Comme Wagner, David s’y frotte au grand format de la grande Boutique.
Plus subtil et moins systématique que cela, Félicien David surprend davantage encore dans son seul opéra Lalla-Roukh (1862) où la liberté souveraine de la poésie engage de nouvelles voies instrumentales et une conception plus fine et psychologique que le grand format lyrique à la Meyerbeer. Caractère introspectif, David aime la couleur et la chaleur du sentiment. C’est un mélancolique heureux qui chante sa lyre parfois sombre et désespérée par le chant des sopranos légers et des ténors aigus. Il aime contempler les vastes horizons. Il semble revisiter le spleen suspendu de la Sensucht (mélancolie) schubertienne : une extase nouvelle diffuse ses parfums hypnotiques et le compositeur dévoile ainsi son talent de coloriste, de climatologue envoûté/envoûtant dont le raffinement dit l’hypersensibilité.
Année Félicien David 2014 : notre agenda
Festival Félicien David à Venise : l’essentiel de la musique de chambre
Palazzetto Bru Zane – 5 avril > 17 mai 2014
les événements lyriques : 5 ouvrages majeurs à redécouvrir
Herculanum
8.03.2014 :
Opéra royal de Versailles
Véronique Gens / Karine Deshayes
Vlaams Radio Koor / Brussels Philharmonic / Hervé Niquet
Moïse au Sinaï
26.03.2014, Salle Bulgaria, Sofia (Bulgarie)
28.03. 2014, Opéra-Théâtre de Clermont-Ferrand
Chœur et Orchestre de la Philharmonie de Sofia / Amaury du Closel
03.10.2014, Megaro Musikis, Thessalonique (Grèce)
Chœur et Orchestre Symphonique d’État de Thessalonique / Amaury du Closel
Le Saphir
5.04.2014
: Scuola Grande San Giovanni Evangelista Venise (Italie)
19.06.2014 :
Théâtre des Bouffes du Nord
Solistes du Cercle de l’Harmonie
Julien Chauvin
Le Désert
6.05.2014
: Cité de la musique
Accentus / Orchestre de chambre de Paris
Laurence Équilbey / Sébastien Droy
Christophe Colomb
22.08.2014 : Festival Berlioz
Les Siècles / François-Xavier Roth
approfondir
Herculanum de Félicien David, 1859
Quatuors à cordes (1,2,4)