
4 ans après son lancement, le CNM / Centre National de la Musique suscite de nombreuses interrogations sur le bien fondé de ses actions. Moyens démultipliés mais stratégie imprécise voire déficiente, efficacité à démontrer,…
Le diagnostic dressé par la Caisse des Dépôts épingle le CNM dans sa forme actuelle. Un constat alarmant qui s’avère d’autant plus saisissant et sans appel à l’heure où déficit oblige, chaque dépense permise par les impôts payés par le contribuable français, doit être mesurée et justifiée. Il semble nécessaire que l’institution ainsi critiquée doive se réformer sérieusement voire se réinventer, surtout identifier besoins et attentes des filières musicales françaises, ce dans ce souci d’efficacité particulièrement attendu par tous.
Né en 2020, le Centre national de la musique (CNM, né de la fusion entre le Centre national de la chanson et 4 autres associations] avait pour mission : fédérer les acteurs d’une filière musicale complexe, atteinte par la crise du disque et le téléchargement illégal. Paradoxalement, sa naissance quand s’impose la révolution numérique, profite cependant de l’essor D streaming [écoute musicale en flux] dont les revenus permettent bientôt de stabiliser le modèle économique de la musique enregistrée.
UN BUDGET TRIPLÉ
Avec la pandémie du Covid, le CNM, a vu son budget tripler à 147 M€ en 2024 [versus le budget total des organismes qu’il a remplacés soit 53 M€], soit des moyens surdimensionnés, ce alors que la musique live et enregistrée, bénéficie d’une forte croissance du marché. La caisse des dépôts questionne aujours’hui l’efficacité réelle de ses actions, la cohérence de ses actions, celle des subventions qu’elle a allouées, et souligne une stratégie globale absente, vis à vis des filières musicales françaises qu’elle est censée accompagner, préserver, favoriser.
STRATÉGIE IMPRÉCISE
Des moyens en forte hausse, mais une stratégie qui manque de clarté…
Dans les faits, pour atténuer les effets destructeurs de la crise sanitaire, le CNM, devenu le bras armé de l’État pour l’octroi des crédits d’urgence et de relance, a distribué 423 M€, tout en conservant après crise, une centaine de millions d’euros. Mieux pour ses revenus systémiques, la création en 2024 d’une taxe affectée supplémentaire (taxe streaming) devrait lui procurer ainsi une ressource additionnelle de circa 15 M€.
Or, à moyens réels voire consistants, pas de stratégie claire ni de besoins concrètement identifiés. Au registre des dépenses, le rapport pointent « une logique de guichet, des dépenses insuffisamment étayées ». Ainsi le Centre soupoudre sans logique globale, au cas par cas alors que le montant global des aides consenties a considérablement augmenté : 21 M€ en 2019, 72 M€ en crédits de paiement en 2023 (hors droit de tirage sur la taxe spectacle). Ces aides ont profité pour un tiers à la production ; un autre tiers à la diffusion [dont les aides aux festivals et à l’activité de diffusion des salles de spectacles].
À ces aides spécifiques s’ajoute le droit de tirage sur la taxe spectacle soit 65 % des contributions [25 M€ en 2023].
LE CNM DOIT SE RÉFORMER
En conclusion, le rapport de la Cour des Comptes souligne l’urgence d’une réforme « en profondeur »… « afin de démontrer sa plus-value pour une filière musicale française hétérogène, évoluant sur un marché largement mondialisé et très porteur ».
Le rapport identifie aussi plusieurs pistes d’un développement voire d’une stratégie réaliste et cohérente, en particulier ses missions transversales : développement international, innovation et numérique, structuration du tissu économique pour garantir la diversité de la filière et la souveraineté culturelle, afin de dépasser les clivages entre musique live et musique enregistrée. Autre points à réformer : logique de guichet [héritée de la période Covid], prévention des conflits d’intérêts et même bilans présentés [à « fiabiliser »], mais aussi refonte du régime d’aides dans une logique de simplification et de décloisonnement, contrôle des fonds distribués, stratégie raisonnable de dépenses.
À la lecture du rapport, le CNM fait figure d’institution au bilan discutable dont fonctionnement, stratégie, efficacité doivent urgemment être réformés. À SUIVRE
LIRE le rapport de la Cour des comptes dédié au CNM Centre national de la musique [daté du 17 janvier 2025] : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-centre-national-de-la-musique
