Le Festival International de musique de Besançon, dont c’est la 77ème (!) édition, a payé de malchance avec des conditions météos qui ont ruiné le projet de Jean-Michel Mathé, son directeur (depuis 2012), de le faire débuter par un grand concert festif et populaire, gratuit… en en extérieur à la Gare d’eau, dans la boucle du Doubs. Las, il a fallut relocaliser le concert d’ouverture au Kursaal, mais là où l’on attendait 2000 spectateurs, le festival n’a pu en accueillir que 700, et une queue interminable s’est ainsi formée à l’entrée de la salle bisontine, faisant ainsi de nombreux déçus…
Pour les Happy Few ayant eu le sésame, la fête fut belle, et les rappels nombreux tant la soirée a su garder son caractère festif et joyeux. Bonne idée également de la part de J. M. Mathé d’avoir mis en avant l’orchestre “local”, c’est-à-dire le brillant Orchestre Victor Hugo Franche-Comté, dirigé (depuis 2010) par l’excellent Jean-François Verdier. Au programme, intitulé “Une saga symphonique”, rien moins qu’un panorama de tous les grands compositeurs classiques depuis Jean-Philippe Rameau à la très “contemporaine” Camille Pépin (présente dans la salle), à laquelle le festival a commandé une pièce pour l’occasion. En maîtresse de cérémonie, la journaliste et animatrice Sabine Quindou – avec beaucoup de didactisme et autant d’humour – s’est montrée à la hauteur de sa tâche, en n’omettant rien des événements majeurs qui ont jalonné les trois derniers siècles de la “grande” musique.
Et c’est merveille de voir comment l’orchestre s’adapte et excelle dans tous les registres, de la fameuse “Danse des sauvages” (Les Indes galantes) de Rameau aux “Murmures de la forêt” extrait de Siegfried de Wagner, en passant par l’ouverture de “L’Italienne à Alger” de Rossini à un extrait de “L’Oiseau de feu” de Stravinski. Sous la battue toujours vive et nuancée de Jean-François Verdier, la phalange franc-comtoise montre sa versatilité, qui a donc abouti à une création d’une œuvre pour orchestre de Camille Pépin, dans la droite ligne du poème symphonique et de la musique narrative, qui entend faire écho aux bouleversements climatiques que connaît notre planète. Un ouvrage symphonique, non exempt de lyrisme et d’une certaine beauté, qui s’inscrit dans la tradition d’un Sibelius… avec quelques accents hollywoodiens !
Le Festival bisontin se poursuit jusqu’au 22 septembre, et accueille comme à son habitude formations et solistes les plus prestigieux, à l’instar du “National” accompagnée de la violoniste Julia Fischer au lendemain de ce premier concert, la Compagnie “La Tempête” et Simon-Pierre Bestion ayant à nouveau émerveillés les spectacteurs (avec son spectacle “Brumes”), tandis que demain, 19 septembre, Mathieu Romano à la tête des Siècles feront résonner le sublime “Requiem” de Fauré (au Kursaal). Puis ce sera au tour de l’Orchestre National de Metz de se lancer dans une interprétation de la gigantesque 10ème symphonie de Dmitri Chostakovitch (direction, Adrian Prabava), et c’est avec la non moins monumentale 3ème symphonie de Bruckner, dirigée par Pablo Heras-Casado (le directeur musical du Philharmonique de Berlin !), à la tête de la phalange belge “Anima Eterna”.
Bon vent à cette 77ème mouture du festival de Besançon !
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CRITIQUE, festival. 77ème Festival International de musique de Besançon, Kursaal, le 13 septembre 2024 : « Une Saga symphonique ». Orchestre Victor Hugo Franche-Comté, Sabine Quindou (présentation), Jean-François Verdier (direction). Photos (c) Emmanuel Andrieu.
VIDEO : Jean-François Verdier dirige l’OVHFC dans un extrait du « Sacre du printemps » d’Igor Stravinski