samedi 26 avril 2025

CRITIQUE, concert. PARIS, Philharmonie, le 9 mars 2024. GERSHWIN / J. ADAMS / R. HARRIS. London Symphony Orchestra / Kirill Gerstein (piano) / Sir Simon Rattle (direction).

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À la Philharmonie de Paris, après l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig dirigé par Andris Nelsons et l’Orchestre de Paris par Klaus Mäkelä, c’est au tour du London Symphony Orchestra et de Simon Rattle d’investir la Grande salle Pierre Boulez. Leur premier concert parisien est entièrement dédié à des compositeurs nord-américains.

 

 

S’ouvrant et se refermant avec une œuvre de George Gershwin, cette soirée a permis de survoler un bref panorama de la musique américaine, formant un fascinant contraste avec le programme du lendemain consacré à Brahms et Chostakovitch. Le premier morceau, Let’ Em Eat Cake dans un arrangement de Don Rose, est une œuvre pittoresque, au sens premier du terme, se prêtant à la chorégraphie, avec des éléments de jazz qui évoquent les années 30 et préfigurent vaguement An American in Paris. Ensuite, Kirill Gerstein nage librement dans les eaux dansantes du Concerto en fa. Les différentes notes percussives intelligemment variées sont parfaitement en situation avec les moments vifs de l’œuvre, les passages virtuoses coulant de source, tandis que le deuxième mouvement convoque des émotions sereines grâce au toucher délicat et lumineux du pianiste. Son interprétation est régie par un équilibre entre la pétulance et la brillance, ponctuée par quelques touches de douceur, telle une brise apaisante. En bis, I Got the Rhythm, arrangé par Earl Wild, est interprété avec une agilité et une légèreté hautement plaisantes. 

Dans la deuxième partie, l’unique mouvement de la Symphonie n° 3 de Roy Harris commence par un tapis sonore d’altos, de violoncelles et de contrebasses. Il traverse ses cinq sections aisément identifiables par le changement d’atmosphère et de textures sonores. Derrière un air de musique de film se cache une construction méticuleuse que Simon Rattle met en évidence avec sa direction toujours dynamique et précise. 

Un autre clou de la soirée est la création française de Frenzy, dernière composition de John Adams – dont la création mondiale eut lieu le 4 mars dernier au Barbican Center de Londres. Selon le commentaire du compositeur lui-même, l’œuvre « passe en revue les différents états représentatifs de la frénésie […] état de furie délirante, enthousiasme, délire violent, distraction, idée loufoque, manie de quelque chose ». Pour lui, continue-t-il, « la “frénésie” résume ce sentiment qui nous submerge parfois en contemplant le monde actuel, et particulièrement tel qu’il est représenté dans la dose quotidienne de nouvelles et d’informations numériques […] ». L’inspiration vient donc du quotidien, mais il pousse loin la façon traditionnelle de développer le motif ou les « idées mélodiques uniques ». À chaque développement, le timbre et l’atmosphère changent avec des jeux de rythmes réguliers (de contrebasses) ou irréguliers, ainsi que des motifs mélodiques assez fragmentaires. Tout cela donne le sentiment de contempler la transformation des paysages à travers la fenêtre d’un train. 

Le concert se clôture avec une autre Ouverture de Gershwin, bien festive, Strike up the Band, où les soli (trombone, clarinette…) se mettent debout comme dans un big band de jazz.  

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CRITIQUE, concert. PARIS, Philharmonie, le 9 mars 2024. GERSHWIN / J. ADAMS / R. HARRIS. London Symphony Orchestra / Kirill Gerstein (piano) / Sir Simon Rattle (direction). Photos © Antoine Benoit-Godet/Cheese.

 

VIDEO : Kirill Gerstein joue le Deuxième Concerto pourpiano de Rachmnaninov à la Waldbühne de Berlin

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