National ! C’est officiel, depuis ce mois-ci, l’Orchestre Symphonique de Mulhouse doit désormais être appelé Orchestre National de Mulhouse ! Ainsi, après les Orchestres d’Auvergne et de Cannes dernièrement, la phalange alsacienne devient le 15ème Orchestre National en Région ! Une fierté et une reconnaissance pour le travail accompli, notamment par son directeur général, Guillaume Hébert, et Christophe Koncz, son directeur musical (depuis sept 2023).
Et c’est justement le jeune et fringant chef autrichien qui dirige le concert de ce vendredi 25 janvier, entièrement dédié à son illustre compatriote W. A. Mozart, à travers deux œuvres d’ampleur et contemporaines : la Symphonie Linz et la Grande Messe en Ut. Didactique, en propos d’avant concert, le chef explique la genèse des deux oeuvres, la première étant créée à Salzbourg en 1783, avec sa femme Konstance dans la partie solo de soprano, et la Symphonie Linz (sa 36ème…) à Linz, où il s’est arrêté saluer son ami le Comte Thun, sur son chemin de retour vers Vienne. Pour le remercier de son accueil, il décide de lui composer une œuvre pour la jouer en son château : cela sera la Symphonie Linz, composée en seulement 4 jours !…
L’Allegro spiritoso initial est le premier dans une symphonie mozartienne à être précédé d’un Adagio introductif à la manière d’un grandiose portail symphonique, réminiscence de l’ouverture baroque à la française, procédé que Haydn aura bien plus l’occasion d’appliquer dans ses propres symphonies. Surtout notable est le Poco adagio suivant, l’un des plus inspirés chez Mozart, avec son rythme de sicilienne pastorale parfois porteur d’inquiétude lorsque la musique passe en mode mineur. Christoph Koncz réussit à tirer partie du petit effectif de l’orchestre pour imposer un Mozart léger mais conquérant. On ressent, de sa part, une direction démonstrative et un grand sens du phrasé, en s’appuyant sur un orchestre solide, homogène dans ses tutti, précis dans ses interventions solistes, et d’une superbe sonorité…
La Grande Messe en ut mineur KV 427 qui lui fait suite est une partition inachevée de Wolfgang Amadeus Mozart, écrite en 1782 : c’est une œuvre majeure que Mozart compose à Vienne, alors qu’il se marie avec Konstanze Weber. L’œuvre atteste une conscience ambitieuse, une ferveur sincère, et touche par sa grâce qui renouvelle le format traditionnel de la messe viennoise. Retenons les tempi particulièrement vifs imposés par Koncz, souvent d’une ferveur exacerbée. Son interprétation prégnante et transcendante de l’œuvre est corroborée par un orchestre toujours attentif et précis et par la grande maîtrise du Chœur philharmonique de Strasbourg, rejoint ce soir par le Chœur de Haute Alsace. Car dans la Grande Messe en ut de Mozart, le chœur est prépondérant, et ils impressionnent ici par leur puissance, voire leur véhémence. Las, les quatre solistes ne génèrent pas tous le même enthousiasme, avec une soprano (Alysia Hanshaw) manquant de pureté mais à la technique solide, une mezzo (Coline Dutilleul) à la belle couleur de voix mais qui devient stridente dans le registre suraigu, un ténor (Glen Cunningham) qu’on peine à entendre tellement le format vocale est réduit, et seul le baryton Damien Gastl coche toutes les cases… mais il n’apparaît malheureusement que dans le dernier morceau de l’ouvrage !…
On n’en sort pas moins ravi de notre soirée, avec la conviction que l’Orchestre de Mulhouse mérite sans conteste son label de “National”, de par la qualité de ses instrumentistes et de leur belle cohésion, et parce que dirigée par un chef énergique qui saura les mener, nous n’en doutons pas, vers une reconnaissance débordant le cadre “national”. Vivement de ré-entendre le bel Orchestre National de Mulhouse !
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CRITIQUE, concert. MULHOUSE, La Filature, le 24 janvier 2025. W. A. MOZART : Symphonie Linz et Grande Messe en Ut. Orchestre National de Mulhouse, Choeur Philharmonique de Strasbourg et Choeur de Haute Alscace, Christoph Koncz (direction). Photos (c) Emmanuel Andrieu
VIDEO : Teaser de la 9ème Symphonie de Beethoven interprétée par Christoph Koncz à la tête de l’Orchestre Symphonique de Muhlouse