Quelle soirée envoûtante que ce mardi 6 mai à l’Opéra Berlioz de Montpellier ! Sous le titre évocateur Aurore boréale et ibérique, le programme nous a offert un voyage musical entre les brumes finlandaises et le soleil espagnol, porté par l’Orchestre National de Montpellier Occitanie et son ancien directeur musical, le charismatique Michael Schønwandt. Retrouver ce chef à la tête de son orchestre après huit années de collaboration fut un moment émouvant, et l’alchimie entre eux était palpable dès les premières notes.
La soirée s’est ouverte avec la Sinfonia brevis opus 30 de la compositrice finlandaise Toivo Leiviskä (1902-1982) dont la musique, encore trop rare en France, a immédiatement captivé le public. Les nuances délicates et les harmonies envoûtantes ont planté le décor d’une nature nordique, entre mystère et grandeur. Michael Schonwandt a su en révéler toute la poésie, avec des cordes soyeuses et des bois d’une expressivité remarquable. Puis vint le moment tant attendu : le Concerto pour violon en ré mineur de Jean Sibelius, interprété par la prodigieuse Liya Petrova (entendue à Strasbourg dans celui de Mendelssohn en février dernier). Dès les premières mesures, la violoniste bulgare a emporté la salle dans un tourbillon d’émotions. Son jeu, à la fois puissant et subtil, a magnifié cette partition où se mêlent virtuosité étincelante (notamment dans un finale endiablé) et lyrisme poignant (l’Adagio, d’une beauté à couper le souffle). Petrova a capté toute la dualité de l’œuvre – entre rudesse des paysages finlandais et chaleur humaine – avec une maîtrise stupéfiante. Les dialogues avec l’orchestre étaient d’une complicité rare, Schønwandt soulignant chaque couleur, des pizzicati inquiétants aux envolées des cuivres. Devant l’enthousiasme du public, elle lui a offert deux bis, d’abord un morceau endiablé du virtuose italien de Pietro Rovelli (1793-1838), à qui a appartenu le « Guarneri del Gesu » sur lequel elle joue (!), puis une section de l’une des Partitas de Bach.
La seconde partie nous a transportés sous le soleil d’Andalousie avec Le Tricorne de Manuel de Falla. Ce ballet, inspiré d’une farce populaire, est un feu d’artifice de rythmes et de couleurs. L’orchestre montpelliérain s’est livré à une interprétation pleine de verve, restituant à merveille l’humour piquant de l’intrigue (jalousie, quiproquos et tromperie !). Les percussions étincelantes, les guitares imaginaires dans les cordes, et les interventions des bois (hautbois et basson particulièrement expressifs) ont fait danser la salle. Le finale, avec ses jotas enflammées, a soulevé un tonnerre d’applaudissements !
__________________________________
CRITIQUE, concert. MONTPELLIER, Opéra Berlioz, le 6 mai 2025. LEIVISKÄ / SIBELIUS / DE FALLA. ONMO, Liya Petrova (violon), Michael Schonwandt (direction)
VIDEO : Liya Petrova interprète le 1er mouvement du Concerto pour violon de Sibelius