lundi 4 novembre 2024

CRITIQUE, concert. LISBONNE (Festival Verão Classico & Academia), Picadeiro de Belém, le 26 juillet 2023. MOZART : Sonate n°32 K. 454, Trio K. 548, Quatuor avec flûte K.285, Quintette avec clarinette K. 581.

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Pour sa 9ème édition, du 17 au 29 juillet, le Festival Verao Classico & Academia de Lisbonne demeure sans conteste l’événement musical de l’été lisboète, et c’est dans le somptueux cadre du Picadeiro Real de Belém que se tiennent les concerts, les spectateurs se retrouvant entourés par des carrosses royaux dans une immense salle du 18ème siècle, magnifiquement décorée et à l’excellente acoustique. Toujours dirigé par le pianiste portugais Filipe Pinto-Ribeiro, ce dernier confirme un talent rare pour le partage et la célébration collective : élèves et maîtres échangent, expérimentent, approfondissent pour le plus grand plaisir des festivaliers, lesquels en témoins privilégiés peuvent suivre pas à pas les étapes du jeu individuel, comme les délices du partage musical. Sur les dix concerts proposés, 4 sont confiés aux Maîtres (Concerts MasterFest) et 6 aux jeunes élèves (Concerts TalentFest) – où tous se confrontent aux défis du jeu collectif et chambriste : une expérience autant passionnante pour les musiciens que pour les spectateurs !

 

 

Nous avons eu la chance d’assister au 3ème des 4 concerts Masterfest, qui était entièrement dédié à Mozart, avec au programme une sonate, un trio, un quatuor et un quintette du Génie de Salzbourg ! La sonate retenue est la 32ème, qui met en présence le violoniste ukrainien Andrej Bielow et sa compatriote pianiste Milana Chernyavska. Le premier se jette d’emblée avec avidité et gourmandise dans cette pièce mozartienne : direct, énergique, enthousiaste et vivant, son jeu évite autant la brusquerie que les minauderies, servi par une acoustique très généreuse qui met en valeur le velouté et la puissance de son instrument. Le Trio K. 548 qui suit, porte au plus haut les couleurs créatrices d’un Mozart au métier inimitable (même s’il n’est pas le sommet absolu de sa créativité), conçu en 3 mouvements vif-lent-vif. Pas de dérives stylistiques ici – avec Mihaela Martin au violon, Filipe Pinto-Ribeiro au piano et Frans Helmerson au violoncelle -, et le trio laisse tout simplement le texte s’exprimer sans affectation, privilégiant une conception intimiste, paisible et équilibrée de l’ouvrage, mais non dépourvue d’élan et de vigueur quand la partition l’exige.

Dans le Quatuor pour flûte K. 285, la flûtiste italienne Silvia Careddu et l’altiste français Miguel da Silva rejoignent la violoniste et le violoncelliste précités. A l’évidence, les 4 compères ne manquent pas – la flûte surtout ! -, de charme ni de richesse mélodique, et l’on déguste (sans modération) l’abondance des thèmes de l’Allegro initial, de même que la fertilité de leurs développements. L’Adagio constitue une authentique réussite grâce à son climat songeur et mélancolique, tandis que le Rondo final s’affiche brillant, vif, et lyrique de ton.

Et la soirée s’achève donc sur le prodigieux Quintette avec clarinette K. 581, avec rien moins que l’excellent clarinettiste français Pascal Moraguès en tête de proue, flanqué par Martin, Bielow, da Silva et Helmerson. Avec ce Quintette composé en 1789, Mozart inaugure un nouveau genre qu’exploiteront plus tard Weber et Brahms. Plus encore que pour son fameux Concerto pour clarinette,  l’œuvre exige un équilibre et une mise en place parfaits entre instrument soliste et cordes, la clarinette devant véritablement s’immiscer dans le quatuor à cordes. Du haut de sa longue expérience, Moraguès n’a pas de mal à leur emboîter le pas dans une symbiose totale qui confine à la fusion dans le Menuetto et l’Allegro con variazioni, qui séduisent chacun par leur richesse en couleurs et leur virtuosité. Auparavant, on aura pu admirer l’équilibre et la limpidité de la polyphonie dans l’Allegro initial ainsi que la justesse du tempo dans le magnifique Larghetto, joué sans emphase aucune. Et en tant que soliste, Pascal Moraguès livre – sans jamais tirer la couverture à lui – un jeu d’une perfection quasiment irréelle, à la fois virtuose et radieux.

C’est avec un 4ème et dernier concert MasterFest que se clôturera la 9ème édition du Verao Classico & Academia, qui mettra en exergue des ouvrages de Bruch, Beethoven, Chostakovitch, Poulenc et Dvorak (à travers son magnifique 2ème Quatuor avec piano !). Et Gageons que Filipe Pinto-Ribeiro mettra les petits plats dans les grands pour le 10 ème anniversaire, l’été prochain, d’un festival aussi attachant que qualitatif !

 

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CRITIQUE, concert. LISBONNE (Festival Verão musical & Academia), Picadeiro de Belém, le 26 juillet 2023. MOZART : Sonate n°27 K. 379, Trio K. 548, Quatuor avec flûte K.285, Quintette avec clarinette K. 581. Photos © Rita Carmo

 

VIDÉO : Pascal Moraguès joue le Concerto pour clarinette de Mozart

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