vendredi 29 mars 2024

Corée du nord. Grand théâtre de Pyongyang. Mardi 26 février 2008 à 9h45, en direct sur Internet. Wagner, Dvorak, Gershwin. Concert du New York Philharmonic. Lorin Maazel, direction

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En direct sur internet
Luxe, tempérament, technologie: fidèle à sa réputation, le New York Philharmonic a donné à Pyongyang, une prestation flamboyante et suractive, non dénuée d’implications politiques d’envergure. La phalange new yorkaise en tournée en Asie passait par Pyongyang pour un concert événement, c’est en effet la première fois, signe d’ouverture à la culture occidentale, qu’une phalange américaine donne un concert dans la grande salle du Théâtre de la capitale de la Corée du nord. Reste à savoir quelles furent exactement le sentiment des spectateurs coréens lors de cette « première historique »… Quoiqu’il en soit, le concert prend un sens particulier au moment où la Corée du Nord, demandeuse, souhaite s’ouvrir au monde, et s’engageant vers un dégel, laisse entendre qu’elle accepterait la demande américaine d’une future dénucléarisation de sa force armée… De toute évidence, ce concert du Philharmonic new yorkais à Pyongyang, est un geste fort vers le dictateur coréen, Kim Jong Il. L’avenir indiquera l’impact et le sens de cet événement musical.

A l’heure d’internet, un événement peut prendre une aura planétaire immédiate. Tel est assurément le cas de ce concert captivant (sur le plan musical comme du point de vue purement technologique), qui a satisfait notre attente, nous qui étions devant notre ordinateur, heureux mélomane, capable grâce à Medici arts (plateforme technologique pionnière dans la captation des concerts) de suivre en direct depuis 9h50 heure française, ce concert à l’autre bout du globe.


Lorin Maazel,
chef de l’orchestre (jusqu’en septembre 2009, à partir de cette date, remplacé par le New yorkais Alan Gilbert) fait démonstration de la tenue impeccable des pupitres, de leur vitalité fruitée: cordes chantantes, flûtes riantes et allègres, cuivres puissants et chaleureux, en particulier dans la Symphonie n°9 « Nouveau Monde » d’Anton Dvorak. Si Universal et son cycle d’enregistrements, uniquement disponible en téléchargement, intitulé DG et Decca concerts, offre désormais (depuis octobre 2006) un témoignage des concerts live des principales phalanges anglo saxonnes (New York Philharmonic, Los Angeles Philharmonic, London Symphony orchestra…) et européennes dont le Leipzig Gewandhaus…, Medici Arts va plus loin encore en permettant de suivre, en images, gratuitement et en temps réel, le concert d’une grande phalange, de surcroît en frappant fort, avec cet événement diplomatique qui laisse une place première à la culture vivante, et en particulier à un orchestre symphonique.

Les américains à Pyongyang
Après La Symphonie du Nouveau Monde, un Maazel enjoué, soucieux de présenter Un Américain à Paris, pousse la facétie pour le plus grand plaisir de l’auditoire (comprenant officiels américains et coréens) et réintitule opportunément la partition lumineuse, (évoquant les bruits urbains de New York) du compositeur américain: « les américains à Pyong Yang »… Instant exaltant porté par la jubilation des instrumentistes délurés et moqueurs, qui expriment devant nos yeux, un monde réconcilié où la fraternité ne serait plus un vain idéal: qui aurait imaginé qu’un jour la Corée du Nord s’ouvre ainsi symboliquement à la culture occidentale? N’oublions pas que sur le plan diplomatique, les Etats-Unis sont en guerre avec la Corée du nord…


Aux côtés des hymnes nationaux, américains et coréens, protocole oblige, la musique Française était présente, certes indirectement (dans l’oeuvre de Gershwin), mais aussi grâce à Bizet dont l’orchestre électrisé par son chef, emportait avec un feu manifeste, la Farandole extraite de L’Arlésienne, suscitant après son final, une standing ovation.

L’ouverture de Candide de Leonard Bernstein offrait ensuite à l’Orchestre new yorkais le privilège de jouer sans chef car les membres de la Philharmonie de New York tiennent avec une estime particulière cette pièce emblématique de la culture américaine. Sous la tutelle du premier violon, lyrisme, panache, tendresse aussi (aux cordes) exaltent l’énergie et l’épanchement suggestif d’une partition dramatique et dansante.

Internet, la plus belle salle de concert,? Certainement oui. D’autant qu’après la captation du concert, les caméras se sont glissées dans les coulisses du Grand Théâtre de Pyongyang pour recueillir la parole des musiciens (dont celle de Lorin Maazel, celle de Zarin Mehta, directeur de l’Orchestre à propos de ce projet…) et certains membres de l’équipe technique… Un autre sujet passionnant précise dans quelles conditions logistiques et diplomatiques (pas moins de 280 visas coréens délivrés…), le concert a pu être produit et sa captation, réalisée.
Medici arts avait déjà marqué les esprits lors de ses diffusions également en direct depuis le Festival de Verbier (été 2007): disons qu’avec Pyongyang, une étape supplémentaire est franchie. En plus du direct, la musique gagne un nouveau pari: être présente sur les fronts humanistes, soutenir la volonté des peuples à se rapprocher, bannir les antagonismes imposés par les guerres… Qu’internet assure une large audience (qui devrait se compter en millions d’internautes mélomanes), et la boucle est bouclée, symboliquement: un événement politique, à portée restreinte (parce que réservé à quelques happy few), revient enfin à tous ceux pour lesquels l’acte musical est destiné: tous les publics de la terre. Saluons donc la révolution numérique et Internet de multiplier demain ce que la télévision a fini par abandonner.


Soulignons l’engagement d’Arte qui diffuse comme Medici, sur son site (Arte.tv) le concert en direct, puis rediffuse sur son antenne, le programme à partir de 19h. Le programme est aussi en accès libre à partir de 16h, en différé, sur le site de Medici.tv, et pendant plusieurs semaines, à partir du 26 février 2008.

Corée du nord. Pyongyang., Grand Théâtre. Wagner: Lohengrin, Prélude de l’acte III. Dvorak:Symphonie n°9 « Nouveau Monde ». Gershwin: Un Américain à Paris. « Encores »: Bizet: L’Arlésienne (Farandole). Bernstein: Candide (ouverture). Traditional: Arirang. New York Philharmonic. Lorin Maazel, direction.

Crédits photographiques: Le New York Philharmonic et Lorin Maazel © Chris Lee

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