samedi 20 avril 2024

Compte rendu, danse. Paris. Palais Garnier, le 24 octobre 2014. Anne Teresa de Keersmaeker : Rain. Marc Moreau, Letizia Galloni, Adrien Couvez, Léonore Baulac… Ballet de l’Opéra de Paris. Steve Reich, compositeur. Synergy Vocals, Ensemble Ictus. Georges-Elie Octors, direction musicale.

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keersmaker anna teresa de keersmakerLa danse d’Anne Teresa de Keersmaeker revient à l’Opéra de Paris pour les dernières semaines de présence in loco de Brigitte Lefèvre, comme directrice sortante du Ballet de l’Opéra National de Paris. Rain, créé par la chorégraphe flamande en 2001, fait son entrée au répertoire du Ballet en 2011, l’oeuvre est maintenant reprise pour la première fois. Deux distributions sans Etoiles interprètent la pièce contemporaine sur la musique pétillante et obsessionnelle de Steve Reich, jouée par l’Ensemble Ictus avec la participation de Synergy Vocals. Anne Teresa de Keersmaeker est l’une des figures marquante du monde de la danse actuelle. Particulièrement jouée en France, malgré une absence notoire à Paris, sa danse aux allures éclectiques est en réalité un produit unique, issu de la relation de la chorégraphe avec la musique et de son souci évident pour la forme et les formes. Elle se veut maître des mouvements, lignes et angles d’un monde au chaos. Pour Rain, « danse de la pluie », il s’agit d’une étude impressionnante de formes géométriques et formules mathématiques dans une forme chorégraphique savante et de grand rigueur. Cette soirée d’automne  invite sur scène 10 danseurs, Sujets, Coryphées et Quadrilles confondus. Une véritable opportunité pour de jeunes danseurs d’explorer un langage et un répertoire loin de l’académisme classique qu’ils maîtrisent par ailleurs si bien.

 

La danse d’Anna Teresa de Keersmaeker revisitée

Le Ballet de l’Opéra National de Paris n’est pas la compagnie Rosas (créatrice de l’œuvre). Il semble donc curieux de vouloir comparer ce que les créateurs ont fait en 2001 avec la performance de nos danseurs parisiens. Les individualités caractéristiques de la compagnie de la chorégraphe sont bien évidemment absentes. Voici une troupe classique, peut-être la meilleure au monde, essayant de se libérer des contraintes et dogmes qui décorent l’édifice de la danse classique. Une programmation et un conditionnement artistique qui ne se transforme pas facilement, surtout quand le maintien d’une qualité et d’une tradition historique est l’un de ses piliers. En l’occurrence, l’attrait de la chorégraphe pour les contrastes et les contradictions semble s’accorder parfaitement avec la situation. Mais qu’est-ce que cela donne ? Commençons par la fin. Nous avons été surpris de la standing ovation que le public ensorcelé a si généreusement offert aux danseurs, après 1h10 des mouvements perpétuels sous la musique répétitive mais protéiforme et riche de Steve Reich. Remarquons déjà également la prestation fabuleuse de l’Ensemble Ictus et de Synergy Vocals interprétant la pièce devenue l’emblème de Reich « Music for 18 musicians ».

Quant aux danseurs leur prestation est idéalement exaltante ! La danse audacieuse de la chorégraphe est interprétée avec une attention indéniable à la beauté des gestes. Immédiatement nous sommes frappés par un Marc Moreau (Eros de rêve dans le Psyché de Ratmansky du 19 juin dernier -2014- à l’Opéra de Paris) glissant mais désarticulé, à l’investissement vivifiant, trait qu’il partage avec ses complices sur scène. La prestation monte et descend, mais tourne aussi. La sensation de gradation est présente et les danseurs se lâchent et se relâchent de plus en plus. L’effort physique est évident. Adrien Couvez, Coryphée, fait preuve d’une certaine virtuosité que nous prenons du plaisir à découvrir. L’extension est belle, certes, mais surtout ce qui nous interpelle, c’est l’aspect tranchant de ses mouvements. Il coupe le vent sans hésitation ainsi que le souffle d’un public impressionné. Les filles paraissent davantage libérées. Séverine Westermann et Laurence Laffon, mais aussi Léonore Baulac et Camille de Bellefon, présentent un je ne sais quoi de sauvage, avec une sorte d’abandon très plaisant. Letizia Galloni comme Jérémy-Loup Quer quant à eux s’ouvrent et s’exposent progressivement, avec des mouvements parfaitement maîtrisés qui relèvent de leur formation mais aussi d’une volonté progressiste. Ils sont tous engagés et engageants et la réaction du public est complètement méritée. Une œuvre riche et intéressante pour plusieurs raisons, à découvrir et redécouvrir au Palais Garnier les 21, 23, 25, 26, 28, 30 et 31 octobre, ainsi que les 2, 3, 4, 6 et 7 novembre 2014.

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