dimanche 27 avril 2025

CD. Placido Domingo, baryton : Verdi (2012,2013)

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CD. Placido Domingo, baryton : Verdi (2012,2013) …  Septuagénaire sémillant, Placido Domingo étonne et convainc. Le visuel de couverture est fort : voici Placido en habits verdiens : haut de forme, écharpe blanche : une classe aristocratique évidente. De fait, à l’écoute, l’interprète confirme d’évidentes affinités avec le théâtre de Verdi. C’est probablement l’album Verdi que tout le monde attendait pour l’année du Bicentenaire Verdi 2013 (pas aussi riche en vraies réalisations) : pas un opéra verdien qui a compté au XXè sans l’incontournable ténor madrilène Placido Domingo. Mais ce récital édité par Sony classical fixe l’art du comédien lyrique en … baryton.

Les amateurs retrouvent leur cher Domingo dans les rôles qu’il a récemment marqué avec une finesse et un engagement époustouflant d’autant plus remarquable que l’artiste né en janvier 1941 a soufflé ses déjà  72 printemps … Ses incarnations récentes de Simon Boccanegra (figure idéal du politique fraternel habité par une gravité toute shakespearienne) ou Rigoletto (père aimant dépossédé malgré lui) restent les deux apports majeurs de ce nouvel album événement. 

 

 

Placido Domingo en baryton verdien

 

domingo_verdi_bayrton_sony_heras_casado_placido_domingoCertes le souffle manque de tenue surtout dans les aigus nasalisés et peu corsés : l’usure de la voix malgré l’ample projection dans le bas medium trahit l’âge de l’interprète pourtant d’une longévité admirable : son Macbeth coince quand même dans les parties hautes (aigus tirés et fortement vibrés). Mais l’intelligence de l’acteur, la prestance forcent l’admiration.
L’abattage défend les Rigoletto, Ricardo d’un Bal masqué, malgré les limites que l’on vient d’évoquer. La noblesse de Germont père, si humaine et même déchirée face au sacrifice exigée pour Violetta, lui va à ravir : la voix moins crispée dans les aigus assure une ampleur expressive parfaitement tenue.
Boccanegra l’un de ses rôles majeurs en baryton impose l’expérience comme l’instinct souverain du chanteur : il n’est guère aujourd’hui que Jonas Kaufmann pour mordre ainsi dans le texte et faire surgir les tripes du personnage : félin, crépusculaire, humain, mais tiraillé… le Boccanegra de Domingo est passionnant de bout en bout. D’autant que les jeunes partenaires du lion madrilène défendent eux aussi leur partie, avec une implication qui doit beaucoup certainement à leur rencontre avec l’aîné prodigieux. Le chef Pablo Heras-Casado parfois en manque de finesse, préserve toujours la projection claire et intensément dramatique d’un Domingo, même s’il est inconstant d’une plage à l’autre (le disque a été enregistré en plusieurs prises en 2012 et 2013), fondamentalement dans chacun de ses rôles, acteur d’une ardeur exemplaire.
Son Luna et sa romance nocturne (il balen del suo sorriso extrait du Trouvère) frappe par son incandescence vocale, caressant dans le medium et le bas medium, malgré la fatigue dans les aigus ; trop fragile son Posa bien que juste et senti, souffre du déséquilibre graves/aigus dont nous avons parlé, mais là encore le sens dramatique du texte emporte l’adhésion (dommage que le ténor qui lui fait face, Aquiles Machado en Carlo manque singulièrement de justesse sur les notes longues) : leur confrontation ne souligne que mieux l’étonnante énergie linguistique du baryton, son assurance expressive. Même excellente diction et tenue dramatique engagée pour La forza del destino (Urna fatale del mio destino, intense, parfaitement architecturé et vocalement couvert).

 

Malgré nos réserves, cet album qui est déjà une performance au regard de l’âge vénérable du chanteur, atteste du métier de Domingo : un instinct et une musicalité hors pair, d’une finesse théâtrale exemplaire. Chapeau l’artiste : oser un tel récital Verdi, dans sa nouvelle tessiture, avec cet aplomb, suscite un irrésistible enthousiasme. Album incontournable pour les admirateurs de Placido et surprenant convaincant pour l’année Verdi 2013.

 

 

 

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