vendredi 25 avril 2025

CD. Grétry : La Caravane du Caire (Van Waas, 2013, 2 cd Ricercar)

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caravane du caire gretry cd ricercar guy van waasCLIC_macaron_2014CD. Grétry : La Caravane du Caire (Van Waas, 2013, 2 cd Ricercar). C’est un pilier du répertoire lyrique de 1784 qui nous ici révélé. L’Académie royale de musique à l’époque de Louis XVI et de Marie-Antoinette se frotta les mains, engrangeant des bénéfices jamais connus auparavant (ou si peu) grâce à une œuvre de pure séduction mais de métier raffiné qui en jalon décisif, renouvelle sensiblement l’évolution du genre lyrique si présent et actif quelques années avant la Révolution… Ici Grétry se rapproche de la trame de l’Enlèvement au Sérail de Mozart (1782), abordant le drame amoureux en lui associant cet exotisme – premier orientalisme du genre – d’une totale et envoûtante fantaisie. Le visuel de couverture met en avant la couleur exotique plutôt que le drame tendre qui se joue en Méditerranée (il est vrai qu’il ne faut pas chercher la vraisemblance psychologique des caractères ; c’est le parfum général d’un exotisme diffus qui triomphe plutôt ici, dans un spectacle flatteur)… En Egypte, la belle esclave Zelim est la prisonnière du Pacha Osman. Après quelques péripéties prétextes à épisodes tendres et pastiches en tous genres, l’héroïne est finalement libérée par son fiancé Saint-Phar, lui aussi esclave. A l’époque des Lumières, les héros vertueux ne peuvent que connaître la délivrance, prolongement d’une souffrance qui inspire de longues effusions antérieures. Sur le plan formel, la comédie lyrique reprend la liberté d’invention de Platée de Rameau (réalisée 40 ans plus tôt) ; mais le goût a changé et la partition associe plusieurs registres poétiques qui alliés aux ballets et aux pastiches (dont l’air italien à coloratoure de l’esclave italienne au II, le plus long de l’ouvrage soit plus de 7mn !) compose un spectacle frappant par son éclectisme poétique, son entrain et son élégance.

Grétry l’orientaliste

gretry gretry_clip_image002Il faut bien tout le métier d’un Guy van Waas pour comprendre et articuler une musique qui appelle à la séduction et à la fantaisie la plus exquise : interprète de plusieurs ouvrages difficiles et singuliers d’un XVIIIè que nous apprenons ainsi à redécouvrir (La Vénitienne de Dauvergne, l’exceptionnel Thésée de Gossec, sans omettre du même Grétry : Céphale et Procris, tous enregistrements édités aussi chez Ricercar), le chef des Agrémens retrouve dans cet enregistrement réalisé il y a un an à Liège, la légèreté amusée, le raffinement et le dramatisme d’une écriture chamarrée qui grâce au génie de Grétry, sait préserver toujours l’efficacité théâtrale, la variété, les contrastes sans entamer la progression de l’action. Le symphonisme manifeste de l’ouverture, le caractère des ballets orientaux, d’un égyptianisme feutré pétillant (sollicitant un instrumentarium parfaitement restitué par Van Waas), tout cela éclaire le talent du Grétry monarchiste pour la scène lyrique. L’orchestre rayonne, faisant feu de tout bois (superbe succession des danses et ballets des deux tableaux du II). Le plateau vocal réunit des chanteurs astucieusement sollicités chacun pour la couleur dramatique du timbre : on aime la tendresse aimante de Zelime (Katia Velletaz) et de son aimé Saint-Phar (Cyrille Dubois) : leur duo en particulier ont le charme des effusions sincères et musicalement canalisées ; les esclaves française ( Caroline Weynants) et italienne (Chantal Santon) apportent tout le piquant agile de leurs voix souples et expressives. Côtés chanteurs, on remarque aussi le Florestan héroïque altier du toujours excellent Tassis Christoyannis ou le tendre et volubile Tamorin de Reinoud Van Mechelen… Quant au chœur de chambre de Namur, il confirme ses affinités superlatives avec un répertoire dont les choristes inspirés (et très bien préparés) savent exprimer la délicatesse heureuse, le nerf mordant selon les situations.

La résurrection est légitime, d’autant mieux servie dans une réalisation aussi soignée, vivante, pétillante. Irrésistible.

caravane du caire gretry cd ricercar guy van waasAndré Modeste Grétry (1741-1813) : La Caravane du Caire. Comédie lyrique en 3 actes, créée à Fontainebleau en octobre 1784. Katia Velletaz (Zélime), Cyrille Dubois (Saint-Phar), Tassis Chrystoyannis (Florestan), Reinoud Van Mechelen (Tamorin), Chantal Santon (une esclave italienne), Caroline Weynants (une esclave française)… Chœur de chambre de Namur, Les Agrémens. Guy Van Waas, direction. Enregistrement réalisé en octobre 2013 à l’Opéra royal de Wallonie, Liège. 2 cd. Ricercar. 

 

 

 

VIDEO

gretry-andre modeste gretryVoir notre grand reportage vidéo dédié à la Caravane du Caire de Grétry, représenté en version de concert à l’Opéra royal de Wallonie : L’opéra français à l’époque de Marie-Antoinette. En 1783, l’Academie royale de musique, très jalouse de ses succès à l’Opéra Comique, commande à Grétry, un nouvel opéra : le compositeur invente alors un nouveau genre, dans le sillon de Platée de Rameau : la comédie lyrique. Ballets inventifs exotiques, orchestration raffinée savoureuse (picolo, basson, clarinettes, cordes à 5 parties), plateau de solistes nombreux et finement caractérisé, La Caravane du Caireimagine les contemporains de Louis XIV en Egypte. La vision est historique et exotique : Grétry s’y révèle en génie des styles mêlés, nouveau champion d’un éclectisme lyrique riche en astuces et en audaces. L’opéra fut joué sans discontinuité jusqu’au début du XIXème siècle : un succès qui rejaillit aujourd’hui grâce à la verve et l’éclat que le chef Guy Van Waas sait instiller à cette recréation événement. Disque à paraître à l’été 2014. Reportage vidéo exclusif CLASSIQUENEWS.COM © 2014

 

 

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