Depuis sa prise de direction de l’EOC Ensemble Orchestral Contemporain (janvier 2020), Bruno Mantovani a proposé le principe d’une résidence de 2 années à un compositeur contemporain. Fruit d’un compagnonnage étroit et particulièrement fructueux, le nouveau cd de l’EOC, intitulé « Waves », permet de mesurer une complicité productive, la riche palette expressive du collectif instrumental et l’approfondissement de l’écriture d’Edit Canat de Chizy, invitée ainsi à travailler au sein de l’Ensemble Orchestral Contemporain. L’auditeur y explore le spectre élargi des nuances qui repoussent le temps et l’espace, tout en soignant transparence et couleurs, souvent inspirées des peintres, de Turner à Soulages…
L’EOC joue Edit Canat de Chizy
Éloge du timbre, entre peinture et musique
Ainsi, sujets de l’enregistrement discographique, de cette « synergie créatrice », sont nées deux pièces pour soliste et ensemble : « Outrenoir » inspirée de la peinture de Pierre Soulages, et la transcription du concerto pour violon Missing, devenu Missing II, auxquelles s’ajoutent des reprises de « Pluie, vapeur, vitesse », et « Vagues se brisant contre le vent », prenant racine dans les vastes paysages impressionnistes de William Turner. Violoniste de formation, Édith Canat de Chizy cultive le sens du timbre et du mouvement. Ses partitions ont trouvé un point sensible, spécifique qui réalise le dialogue entre peinture et musique. Prochaine critique complète sur CLASSIQUENEWS – Programme CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2023.
Le nouvel album édité par PARATY records affirme un tempérament créateur singulièrement abouti, aux confins poétiques qui mêlent en vibrations sonores, musique et peinture.
Servis par les instrumentistes de l’EOC, Ensemble Orchestral Contemporain qui ont accueilli en résidence, la compositrice, les 3 œuvres ici enregistrées donnent un aperçu convaincant du travail compositionnel réalisé depuis 2006 et 2007 (d’après Turner), puis en 2020 au moment de la résidence dont le point culminant reste « Outrenoir », commande de l’EOC d’après Soulages.
Les imaginaires d’Edith Canat de Chizy
Vibrations fraternelles entre musique et peinture
Edit Canat de Chizy cultive un imaginaire sans limite si ce n’est grâce aux liens et noeuds spécifiques que son écriture a tissés avec les peintres tel Whistler, Monet, Staël, Turner et plus récemment Soulages, source pour l’écriture d’« Outrenoir » (2020) ; l’apôtre du noir et ses 1001 nuances, est découvert et mesuré à travers les vitraux qu’il a réalisés à l’Abbaye de Sainte-Foy de Conques (découverts en 2004) ; s’en suit une partition où l’alto solo exprime toutes les teintes lumineuses habitant le noir autoritaire, le noir le plus dense et le plus profond aux infinis hiératiques, en moirures et miroitements suggestifs dont la compositrice semble détenir la clé sonore. Au noir méditatif d’après Soulages, répond la transparence dynamique de « Vagues » (2006, qui donne son titre au présent album), épiphanie entre l’aérien et le marin, où le mouvement brasse les éléments, danse, enivré (comme la flûte solo) à la façon des paysages primitifs et cosmiques de Turner… bouillonnement et vitalité spatiale qui innervent une autre composition d’après le même Turner « Pluie, vapeur, vitesse » (2007) où se brouillent tout autant les plans, du flou au net, véritable manifeste de la pulsion libérée, active, ascenssionnelle. Plus que tout autre compositeur aujourd’hui, Edith Canat de Chizy semble penser la musique en couleurs et lumière, en sons picturaux, en nuances et matières sonores.
Complément heureux à cette fusion musicale et picturale totalement réussie, le Concerto pour violon n°2 (« Missing », 2016) qui semble conjurer la fatalité de la mort et du deuil, – précisément la disparition du violoniste Devy Erlih à la suite d’un accident de voiture (fév 2012) : le chant du violon irradie d’une lumière quasi surnaturelle, qui s’embrase en faisceaux miroitants, bouleversant l’activité instrumentale, en particulier dans cette version pour orchestre de chambre de 2020 qui renforce le travail sur les timbres, leur matité et leur transparence, comme si la compositrice maniait les teintes de l’orchestre là aussi, comme le ferait un peintre des nuances chromatiques avec son pinceau. En définitive, Edith Canat de Chizy offre avec la complicité de l’EOC dirigé par Bruno Mantovani, un polyptique musical où brille et s’enflamme la couleur sonore.
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1 – Outrenoir (2020)
Commande de l’Ensemble Orchestral Contemporain
Avec le soutien du programme d’aide à l’écriture, Ministère de la Culture
Pour alto et ensemble – Patrick Oriol, alto
2 – Vagues se brisant contre le vent (2006)
Pour flûte et ensemble – Fabrice Jünger flûte
3 – Missing II (2020)
Commande de l’Ensemble Orchestral Contemporain
Transcription du concerto pour violon / Missing (2016)
Pour violon et ensemble – Gaël Rassaert violon
4 – Pluie, vapeur, vitesse (2007)
Pour ensemble
Œuvres d’Édith Canat de Chizy
Ensemble Orchestral Contemporain
Patrick Oriol, alto
Fabrice Jünger, flûte
Gaël Rassaert, violon
Bruno Mantovani, direction
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CD évenement, annonce. Edit Canat de Chizy : « WAVES » – Ensemble Orchestral contemporain – Bruno Mantovani, direction ( 1 cd PARATY records / CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2023) – Plus d’infos sur le site de l’EOC Ensemble Orchestral Contemporain : https://www.eoc.fr/disque-waves/ – Parution annoncée le 24 mars 2023