CD, critique. GOUNOD : mélodies. Tassis Chrystoyannis, baryton / Jeff Cohen, piano – 1 cd APARTE. Baryton mordant et souple, d’une diction flexible et détaillée, précise et nuancée, Tassis Christoyannis a construit pas à pas une solide carrière d’interprète qui sur les planches est complétée par un réel talent d’acteur : classiquenews en a témoigné dans les dernières productions présentées à l’Opéra de Tours chez Puccini (Il Tabarro) ou chez Mozart (superbe et électrique Don Giovanni). En diseur, le chanteur relève les défis de la prosodie et de l’articulation du français avec la même intelligence propice, dévoilant non sans légitimité, le génie du Gounod mélodiste. Or celui ci demeure méconnu, il a pourtant laissé plus de 120 titres dont le tiers en … anglais (composées lors de son exil entre 1870 et 1874 à Londres, après la chute du Second Empire ; et ici, représentées par les 3 mémorables : Maid of Athens, Good night, Sweet baby, sleep…).
Le génie du Gounod mélodiste enfin révélé
De Berlioz et ses Nuits d’été, on retrouve d’ailleurs le poème de Théophile Gaultier : « Ma belle amie est morte », mis en musique par Gounod, en ouverture de ce fabuleux programme, d’autant mieux convaincant, qu’il est chanté par un homme, versus une femme chez Berlioz. Complétant l’évolution du genre avant Fauré et Massenet, Ravel et Debussy, les mélodies de Gounod offrent une attention spécifique aux textes poétiques et à la ligne du piano, de moins en moins accompagnateur et plutôt complice et partenaire du chant inspiré. Le timbre du baryton éclaire de l’intérieur chaque poème, avec une acuité de sculpteur ; une aisance et une certitude détaillée qui indique aussi sa sensibilité de peintre, soucieux du caractère comme de la couleur de chaque séquence poétique. Un tel métier s’est accompli et enrichi au cours de ses précédents programmes de mélodies françaises dédiés à Lalo, de la Tombelle, Félicien David sans omettre Benjamin Godard. Avec Gounod, la suavité lumineuse et ce mordant linguistique sont ciselés avec davantage encore de suggestion nuancée (comme de flexibilité, passages en voix mixte comme en voix de tête). Un travail d’orfèvre qui sauve enfin notre connaissance encore si confidentielle de l’histoire de la mélodie française romantique.
Au clavier, Jeff Cohen, alerte, précis, et lui aussi nuancé, déployant mille nuances entre le forte et le piano, indique ce Gounod, précurseur de Fauré, vrai poète de l’élégance rentrée et de la pudeur orfévrée. Superbe récital. Voilà n bien bel ouvrage qui comble notre méconnaissance du Gounod mélodiste, tout en enrichissant le catalogue des éditions majeures du Bicentenaire GOUNOD 2018
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CD, critique. GOUNOD : mélodies. Tassis Christoyannis, baryton / Jeff Cohen, piano – 1 cd APARTE – durée : 1h20mn – enregistré en dec 2017.