CD, coffret. Compte rendu critique. Itzhak Perlman : complete Recordings on Deutsche Grammophon (25 cd). La prestigieuse étiquette jaune, Deutsche Grammophon célèbre les 70 ans du violoniste israélien Itzhak Perlman (le 31 août 2015) en lui dédie un important coffret cd qui réunit l’ensemble de ses enregistrements pour le label. Perlman a gravé 25 albums pour Deutsche Grammophon et Decca entre 1968 et 2001, comptant certaines collaborations scellées sous le signe de l’amitié complice et de la haute technicité toujours finement inspirée. Itzhak Perlman a fait ses débuts chez DG avec les concertos pour violon de Berg et Stravinsky (1978, Seiji Ozawa, direction) ; il a séduit de nouveaux admirateurs par sa chaleur humaine et une générosité flexible qui favorisent les collaborations, ainsi dès 1968, le disque premier, fondateur ici, comprenant la Sonate proustienne de Franck et le Trio de Brahms (avec cor), enregistré à Londres en 1968 ; ou le Concerto pour violon d’Elgar (sous la direction de Barenboim, 1981).
Les concertos de Saint-Saëns et Wieniawski (1983), la Symphonie espagnole de Lalo (1980), un disque de pièces célèbres avec Zubin Mehta (Sarasate, Ravel, Chausson, Saint-Saëns…, 1986) et les Quatre Saisons de Vivaldi (réunissant à Tel Aviv en 1982, et sur instruments modernes la crème des violonistes des années 1980 : ) font également partie du coffret. On y retrouve aussi des perles comme l’album « Bach Arias » avec la soprano aussi suave qu’impossible, Kathleen Battle et donc son partenaire, Perlman au violon obbligato (1989-1990), des Concertos de Tchaïkovski et de Chostakovitch avec Perlman cette fois à la baguette à la direction du Philharmonique d’Israel (Tel Aviv, 2001), dirigeant son jeune protégé Ilya Gringolts, et la redécouverte de deux ensembles majeurs pour les années 1980 toujours: Concertos de Mozart (Wiener Philharmoniker, James Levine, Vienne, 1982-1985) et les Sonates pour violon et piano de Beethoven réalisées avec la complicité de Vladimir Ashkenazy à Londres au début des années 1970 (1973-1975), deux cycles réinstaurées au catalogue pour la première fois depuis des années. Les CD reprennent les programmes et pochettes d’origine. La notice accompagnant le coffret est en anglais et en allemand.
Violon subtil et éloquent
Notre avis. Pour ses 70 ans, Deutsche Grammophon édite un coffret mémoire regroupant les enregistrements les plus significatifs voire convaincants du violoniste né à Tel Aviv en 1945 de parents polonais : Itzhak Perlman. Une carrière dans sa globalité se détache ici. Dans sa diversité de plus en plus assumée comme soliste naturellement – musique de chambre dès 1968 avec son complice le pianiste Vladmir Ashkenazy, concertante et symphonique surtout ; mais aussi comme chef d’orchestre et comme pédagogue. C’est une vocation réalisée de facto en complicité avec des noms aussi prestigieux que Barenboim, Mehta, Ashkenazy… autant de personnalités diverses, tempéraments différents qui ont su reconnaître en Perlmann, un partenaire de choix, appréciable indiscutablement pour ses qualités humaines et violonistiques.
Après les aînés que sont Stern, Grumiaux, Oistrakh dont le jeu écouté à la radio fut une révélation, le déclencheur de sa vocation même, Itzhak Perlman affirme à travers ce legs discographique une somme esthétique d’où sa finesse de ton se distingue nettement. L’élégance et la pudeur expressive, le souci de la clarté sans calcul ni effet démonstratif, réalisent une sorte de synthèse entre intériorité et pure virtuosité, voie médiane très structurée et équilibrée frappant par sa précision et sa clarté dynamique, qui serait comme l’emblème préservé de cette école franco belge dont il affirme la prééminence en premier lieu dans ses choix de répertoire … Franck, Lalo jusqu’à Wieniewski le soulignent suffisamment dans le sommaire du coffret. Le violoniste se distingue encore de ses confrères par un sens du legato, une ligne ciselée dans le souffle qui apparente son élocution, à la voix humaine : l’exemple le plus frappant en serait ici son Berlioz élégantissime et sans effets démonstratifs d’aucune sorte (Caprice et rêverie opus 8, enregistrement parisien réalisé à la maison de la Mutualité en octobre 1980), entonné bel et bien comme l’expression d’un songe personnel. … pour nous, tout Perlmann est là. Clair et tendre, intime et pudique mais surtout profond et d’une simplicité complice. Un frère musicien comme on aimerait en connaître depuis toujours. Son humilité nous touche. Son naturel aussi qui font tant défaut à nombre de solistes actuels trop préoccupés par leur singularité narcissique. Ainsi c’est toujours la même question : servir la musique ou se servir de la musique ? Aucun doute concernant Perlamn : le violoniste a clairement choisi la première option.
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Coffret cd, compte rendu critique : Itzhak Perlman, complete Recordings on Deutsche Grammophon. Sortie : le 4 mai 2015. 25 cd Deutsche Grammophon