En fragments sélectifs plutôt que porteur d’intégrales dramatiquement restituées, le programme relève d’une démonstration musicale certes admirablement maîtrisée mais où la fièvre et la sueur manquent durablement.
Séduits mais pas chavirés…
Avec Le Sacre, l’approche se nuance davantage, la vision s’enrichissant d’une valeur nouvelle: le mystère et le rêve. L’intro est en cela remarquable d’intonation: ivre, ritualisée… le chef perçoit sous la prière collective, enchaînement des bois et des vents bavards et de plus en plus mordants (clarinettes, trompettes bouchées…), la mécanique d’une hallucination qui bascule dans la transe (cordes)… Sokhiev libère l’énergie en canalisant chaque détail qui fait sens sur le plan instrumental:la vitalité croissante trouve un relief délectable en une palette de timbres scrupuleusement détaillés. Mais là encore on aurait souhaité un regard dramatique plus abouti, davantage passionné et démentiel; les tableaux superbement caractérisés se succèdent (caquetage puis transe de l’intro, syncopes désarticulées des augures, marches graves du jeu de rapt…). Encore une fois, la maestrià sonore et l’excellente performance des solistes ne font pas ici une lecture globalement architecturée; le chef semble lire la partition en nous détaillant absolument tout, sans atteindre à un souffle ou à un quelconque parti dramatique personnel. C’est du Boulez plus que du Bernstein. L’olympisme de Sokhiev évite toute sauvagerie dyonisiaque. C’est notre réserve d’ordre poétique et expressive pour une approche qui reste pourtant passionnante par son fini et sa somptuosité instrumentale.
Stravinsky: L’oiseau de feu, Le sacre du printemps. Orchestre national du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev, direction. Enregistré à Toulouse, Halle aux grains, septembre 2011. 1 cd + 1 dvd Naïve. Référence Naïve V 5192.