jeudi 18 avril 2024

COMPTE-RENDU, critique, opéra. PARIS, Opéra-Comique, le 12 déc 2019. MESSAGER : FORTUNIO. Cyrille Dubois. Langrée / Podalydès…

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fortunio-opera-comique-paris-critique-opera-cyrille-dubois-bandeau-opera-comiqueCOMPTE-RENDU, critique, opéra. PARIS, Opéra-Comique, le 12 déc 2019. MESSAGER : FORTUNIO. Cyrille Dubois. Langrée / Podalydès… Malgré la grève (et la pluie), battant le pavé parisien mais équipé de bonnes chaussures, l’espoir d’assister à un Fortunio réussi, nous porte. En particulier s’agissant des voix car le spectacle lui, a déjà été créé ici même en 2009, il a 10 ans déjà. Rien à dire donc sur la (première alors) mise en scène à l’opéra de Denis Podalydès (décors d’ Eric Ruf) : sobre, forte, jouant sur la gravitas rentrée d’un destin contrarié, sur l’étouffant huis-clos d’un drame bourgeois avec uniforme. Le mouvement des personnages et la direction d’acteurs revendique les choix de Podalydès, homme de théâtre avant tout et qui sait déplacer les profils, fixer des attitudes sans que jamais le chant ne s’en trouve minimisé. Le livret de Caillavet et Flers d’après Alfred de Musset (Le Chandelier) relève du drame bourgeois voire du vaudeville assez routinier (avec la chambre et son armoire) que rehaussent les costumes Belle-Époque de Christian Lacroix. La vérité des sentiments et des situations qui s’y révèlent d’une justesse absolue, touchent au cœur des pulsions et intentions de chaque protagoniste. L’analyse y est décapante et permet de distinguer ce qui relève du masque artificiel comme du désir premier, primitif, viscéral qui pilote chacun. Finalement dans un chassé croisé de figures superficielles, se détache la sincérité de Fortunio dont l’amour touche au cœur Jacqueline, l’infidèle, prétendue insouciante.

 

 

Superbe distribution pour la reprise de Fortunio

 

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Habité autant que diseur, et d’une articulation qui colle parfaitement aux situations, Cyrille Dubois affirme son excellence parmi les meilleurs ténors français de l’heure : ils ne sont pas nombreux à un tel degré d’intelligibilité. Homme blessé mais digne dans son ineffable douleur à la quelle il sait proposer une incarnation à la fois tendre et naturelle. Avec ses couleurs romantiques évidentes, une gravitas comme filigranée qui rappelle en particulier dans les actes III et IV, le tragique noir de Werther de Massenet que le chef Messager a beaucoup dirigé. D’autant que la Jacqueline de la soprano, cristalline elle aussi, Anne-Catherine Gillet, beauté courtisée par tous, fait surgir peu à peu et tout en subtilité cette attraction magique qui l’aimante à Fortunio. La cantatrice et actrice articule, habite, incarne, colorant chaque mot avec une attention juste, exemplaire. Nous l’avions remarqué à l’Opéra de Tours en Juliette dans Roméo et Juliette de Gounod : même intensité ardente, même angélisme grave, un naturel qui éblouit par sa sincérité. Jean-Sébastien Bou, en partenaire idéal, fait un impeccable capitaine Clavaroche : avisé, inspiré, déterminé sans arrogance ni supériorité. Il connaît son personnage, celui de l’amant sûr de lui, un rien conquérant, d’autant mieux qu’il assurait cette partie dès la création de 2009.
Tel un Don Pasquale maladroit, finalement attendrissant, le mari trompé, incarné par Franck Leguérinel affirme aussi une évidente crédibilité. Comme le Landry, séducteur et en verve de Philippe-Nicolas Martin. Comme ses partenaires, son profil offre un contrepoint marquant à la profondeur solitaire du personnage de Fortunio.
Aux nuances dramatiques et scéniques des chanteurs, tous impeccables acteurs, répond la finesse de l’orchestre sur instruments anciens, l’Orchestre des champs élysées fondé par Philippe Herreweghe : de la légèreté digne de l’opérette façon Paris, et du wagnérisme dans les résonances plus ambivalentes des sentiments de Jacqueline pour Fortunio et vice versa… De sorte qu’on ne saurait écouter meilleur Messager, ainsi révélé à nouveau dans ses accents intimistes, ses troubles expressifs qui fusionnent chant et théâtre.

 

 

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COMPTE-RENDU, critique, opéra. PARIS, Opéra-Comique, le 12 déc 2019. MESSAGER : FORTUNIO.

 

   

 

Cyrille Dubois, Fortunio
Franck Leguérinel, Maître André (le mari trompé)
Anne-Catherine Gillet, Jacqueline (l’épouse infidèle)
Jean-Sébastien Bou, Clavaroche (l’amant)
Philippe-Nicolas Martin, Landry
Thomas Dear, Lieutenant de Verbois
Aliénor Feix, Madelon
Luc Bertin-Hugault, Maître Subtil
Pierre Derhet, Lieutenant d’Azincourt
Geoffroy Buffière, Guillaume
Stéphanie Daniel, Lumières

Chœur Les Eléments
Orchestre des Champs-Elysées
Louis Langrée, Direction
Denis Podalydès, Metteur en scène

Illustrations : © Stefan BRION

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