samedi 20 avril 2024

Vienne. Musikverein, le 1er janvier 2013. Concert du Nouvel An (Neujahrs Konzert). Valses des Strauss (Johann I et II, Josef), œuvres de Wagner, Verdi… Wiener Philharmoniker. Franz Welser-Möst, direction.

A lire aussi
Cette année, retour du chef Franz Welser-Möst, déjà présent pour le concert du nouvel an 2011. Après Mariss Jansons, l’actuel directeur musical de l’Opéra de Vienne et du Cleveland symphony Orchestra, a d’autant plus de légitimité pour diriger les musiciens du Philharmoniker que ce sont les mêmes instrumentistes qu’il dirige tout au long de l’année dans la fosse de l’Opéra d’état. L’Orchestre assure toutes les représentations lyriques… un exercice permanent qui suscitant des séances de travail régulières explique certainement l’excellente musical de la phalange.
Cette année au Musikverein de Vienne, décoré comme à l’habitude de bouquets et de gerbes floraux, le chef autrichien a choisi de rendre hommage en particulier au fils cadet de Strauss père, Josef, mort prématurément mort à 43 ans et qui reste dans l’ombre de son génial ainé, Johann II, indiscutablement le maître compositeur de la famille.


L’élégance Strauss… de Johann à Josef

Un épisode de ce programme surtout festif (particulièrement convaincant dans sa seconde partie) nous le rappelle: le ballet de l’Opéra de Vienne, accompagné par les musiciens dans l’opus 364 de Johann Strauss ( » Wo die Citronen blüh’n… », une valse incroyable, toute en finesse et suggestion); associant remarquablement danseurs et orchestre, le tableau concentre tout ce que l’élégance et le raffinement sonore du faiseur de rêves a pu atteindre en onirisme et en poésie musicale.
Filmé dans le palais impérial de Hof, superbe bâtisse peu connue élevée pour le prince Eugène de Savoie, les 5 couples de danseurs éblouissent tout de blanc vêtus dans une succession de salles et de salons au décor nacré, comme s’il s’agissait d’un château enchanté, soudainement animé par la magie de la musique… l’une des partitions les plus envoûtantes et suggestives de Johann II, la quintessence de son génie raffiné dans l’art de la valse viennoise.
Il fallait bien ce numéro assez époustouflant pour atteindre la magie des précédents Concerts du Nouvel An à Vienne, un exercice lisse parfois kitsch qui tourne assez rapidement au catalogue touristique en faveur des paysages et de la culture musicale autrichienne.
Il faut bien reconnaître que grâce à cette pièce de haute inspiration, le concert s’est sauvé lui-même d’un décoratif parfois assez ennuyeux: la baguette de Welser-Möst parfaitement amidonné dans son costume ajusté, n’est souvent rien que brillante et appliquée, sans vrai souffle.
Toute la première partie demeure dans un style à l’impeccable technicité dépourvue pourtant de cette imagination qui a fait les grands concerts viennois de ses prédécesseurs… illustres légendaires (Karajan, Kleiber, Boskovski…) ou plus récents, Muti, Prêtre, Jansons…


valses de Verdi et de Wagner

On allait même s’endormir s’il n’était l’excellent choix d’inscrire au programme l’ouverture de Lohengrin de Wagner, ouverture du III: un moment de grâce absolue, porté par l’espoir que font naître les noces à venir entre Elsa et le Chevalier inconnu… soudain, la richesse des timbres, les couleurs, ce brio d’une élégance échevelée se sont diffusés dans l’espace du Musikverein, dévoilant outre la finesse des instrumentistes, surtout un Wagner rendu à lui-même, celui qui probablement à envoûter jusqu’au vertige, Louis II de Bavière: flûtes, et cors, enjôleurs… harmonie somptueuse, cordes féeriques suscitant de plein fouet la légende médiévale avec ce grain de folie et d’ivresse qui manquait tant jusque là: l’énergie irrépressible du Wagner (né en 1813, bicentenaire oblige) a été bénéfique d’autant que les Strauss fils n’ont jamais caché leur admiration pour l’auteur de Tristan et de Parsifal… La petite polka française La fileuse de Josef, fortement inspirée du personnage de Senta du Vaisseau fantôme de Wagner rappelle opportunément l’attraction de Richard sur les fils Strauss.

Autre moment fort de ce concert viennois 2013, la place de Verdi (et comme Wagner son contemporain donc, compositeur d’opéras fêté en 2013 car lui aussi né en 1813); après avoir joué un pot pourri inspiré des extraits de Rigoletto, Macbeth composé par Johann II (et réorchestré par lui avec la subtilité instrumentale que l’on connaît), les musiciens abordent avec un vrai engagement dramatique le ballet de Don Carlo (acte III): une ardeur nouvelle, soudainement réveillée là aussi qui affirme le tempérament expressif unique au monde de l’Orchestre philharmonique de Vienne.

Pour le reste, le programme confine à la mécanique bien huilée, peaufinant ses contrastes calculés (polkas endiablés, galops effrénés, valses lentes…); ses effets routiniers désormais emblématiques d’une cérémonie télégénique fortement médiatisée: gros plans sur les fleurs décoratives (qui nous rappellent les interludes télévisés des années 60,70,80), gros plans sur l’orgue central en fond de salle (avec l’inscription sous son fronton, à laquelle on ne peut que souscrire:  » Geselschaft Musik freunde « : société des amis de la musique), sur les plafonds de la boîte à chaussure… et cerise sur le gâteau, le ballet de l’Opéra de Vienne d’un kitsch parfaitement assumé (l’épisode du Carnaval italien dans les labyrinthe de Schönbrun et ses épisodes érotiques masqués sont inimaginables dans un autre contexte et pour une autre occurrence)… autant de clins d’yeux décoratifs et diversement ridicules qui en font rire plus d’un. A torts ou à raisons. Reste que, au moment du Carnaval de Venise de Strauss père, la distribution par le chef à ses musiciens de peluches de toutes formes ou de gadgets bien choisis (cuiller en bois au premier violon !) laisse quand même dubitatif…

Heureusement la tradition a du bon… alors que l’on croyait le concert officiel fini, l’épisode des bis pouvait reprendre du service avec ses standards désormais inusables et par principe repris pour conclure véritablement la grand messe télévisuelle: d’abord, le Beau Danube Bleu, du génial Joahnn II, puis La marche de Radetsky de son père… qui permet au public conquis, de taper des mains au rythme endiablé d’une musique décidément irrésistible.

A noter: cd et dvd de ce nouveau Concert du Nouvel An à Vienne sont annoncés dans la foulée chez Sony classical. A suivre.

Vienne. Musikverein, le 1er janvier 2013. Concert du Nouvel An. Valses des Strauss (Johann I, Johann II, Josef), œuvres de Wagner, Verdi, Suppé, Lanner, Hemmelsberger… Orchestre Philharmonique de Vienne, Wiener Philharmoniker. Franz Welser-Möst, direction.


détail du programme du Concert du Nouvel An à Vienne 2013 (1er janvier 2013):

Josef Strauss


Die Soubrette, op.109
Johann Strauss

Kusswalzer, op.400
Josef Strauss
Theater-Quadrille, op.213
Johann Strauss

Aus den Bergen, Walzer op.292
Franz von Suppè

Leichte Kavallerie, Ouverture
Josef Strauss

Sphärenklänge, Walzer op.235

Die Spinnerin, Polka op.192
Richard Wagner 

Lohengrin, Prélude de l’acte III
Joseph Hellmesberger
Jun.
Unter vier Augen, Polka Mazurka
Josef Strauss 

Hesperus-Bahnen, Walzer op.279

Galoppin-Polka, op.237
Joseph Lanner 

Steyrische Tänze, op.165
Johann Strauss

Melodien-Quadrille, op.112
Giuseppe Verdi

Don Carlo, ballet de l’Acte III, extrait
Johann Strauss

Wo die Citronen blüh’n, Walzer op.364
Johann Strauss I

Erinnerungen an Ernst oder Der Carneval in Venedig, op.126
Josef Strauss 

Plappermäulchen, Polka op.245
Johann Strauss 
II
An der schönen blauen Donau, Walzer op.314
Johann Strauss I

Radetzky-Marsch, op.228
- Sponsorisé -
- Sponsorisé -
Derniers articles

CRITIQUE CD événement. JULIUS ASAL, piano : Scriabine / D Scarlatti (1 cd DG Deutsche Grammophon)

Voilà assurément un programme fascinant en ce qu’il est aussi bien composé qu’interprété. S’y distingue le tempérament intérieur, d’une...
- Espace publicitaire -spot_img

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img