mercredi 7 mai 2025

Thierry Machuel: L’encore aveugle, oratorioCréation. Du 10 au 15 mai 2007

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Thierry Machuel
L’encore aveugle

, oratorio
d’après Yves Bonnefoy
(création mondiale)

Charleville-Mézières
Reims, Troyes et Chaumont
Du 10 au 15 mai 2007

Comme Philippe Fénelon qui dans son dernier opéra, Faust, voit la quête de l’homme toujours insatisfait, qui ne peut, impuissant, que constater le report constant de la vérité et des réponses aux mystères du monde (création au Capitole de Toulouse, en mai 2007), Thierry Machuel, lecteur du poète Yves Bonnefoy, recueille les interrogations d’une humanité en manque de connaissance, de vision, de compréhension.
Le geste n’est pas pour autant désespéré car la parole et l’acte musical autant que vocal se veulent « énergie », qui dans le partage avec le public, se fait « créatrice ». Thierry Machuel offre, avec la création de son oratorio « L’encore aveugle« , l’aboutissement de sa résidence en Champagne Ardenne et les fruits d’un travail continu d’après la poésie contemporaine. La partition s’inscrit dans un volet pédagogique: le poème de Bonnefoy, « L’encore aveugle« , tiré du recueil « Les Planches Courbes » (2001), est inscrit au Bac 2007 et plusieurs lycéens participent au choeur, l’oeuvre nécessitant la collaboration d’un grand choeur de 150 choristes. Le compositeur a souvent été invité à composer pour des choeurs amateurs. Le travail d’écriture prend alors comme donnée décisive, la nécessité d’inscrire l’attente et une certaine forme d’innocence des interprètes dans la genèse de l’oeuvre.
Le texte de Bonnefoy s’interroge sur l’existence de Dieu. Le choeur intervenant quatre fois, représente l’humanité. Voix du doute et de la quête, une jeune femme, qui peut être « une théologienne, cherchant une définition, s’approche du divin« , précise le compositeur.
Tout en relisant le texte de Bonnefoy dont le sujet principal est un questionnement sur la transcendance à partir de la légende de Saint-Christophe portant le Christ enfant, l’oratorio de Thierry Machuel permet à la musique d’être un lieu de passage et de connaissance, d’expérience et peut-être de révélation. « Je pense que la musique est une entrée vers la langue... » nous dit le musicien.

Trois concerts publics:
Charleville-Mézières, Eglise du Sacré-Coeur,
Jeudi 10 mai 2007 à 20h30

Reims, Auditorium du CNR,
Vendredi 11 mai 2007 à 20h30

Troyes, Eglise Saint-Nizier,
Lundi 14 mai 2007 à 20h30

Un concert à l’adresse des collégiens:
Chaumont, Eglise Notre-Dame du Rosaire
Mardi 15 mai 2007 à 15h

Renseignements & réservations: 03.26.55.78.21

CD


Thierry Machuel: Psalm
(2003)
L’univers polyphonique de Thierry Machuel atteint dans cet album magnifique (à posséder d’urgence) une vibration hallucinatoire, prenante et hypnotique. A la densité du jeu contrapuntique correspond la qualité sélective des textes poétiques. La musique n’allant jamais chez Machuel, fin lecteur de textes engagés, sans sa soeur, complémentaire ou gémellaire, la poésie. Si la texture, parfois jusqu’à saturation du mot et de la note, offre une riche correspondance avec le sens et le sentiment émis, alors, dans les oeuvres ici abordées, l’écriture réalise un accomplissement rare.
D’autant que l’exacerbation lyrique des effets vocaux, idéalement sertis et proférés par Le jeune choeur de Paris, et le Choeur de chambre Cris de Paris, portent plusieurs textes d’une très grande force poétique. Notre préférence va tout d’abord, au cycle « Dark like me » de Langston Hugues (1902-1967) qui écrit un hommage à Billy Holiday en évoquant la conditions des Noirs américains au début du XX ème siècle. Les cinq tableaux de cette suite chorale sont bouleversants par leur humanité, en cela remarquablement incarnés par les deux choeurs. Avec « Jiv », d’après les textes du polonais Ossip Mandelstam, nous gravissons encore un degré dans l’intensité émotionnelle. C’est le martyr des camps staliniens que Machuel honore avec une justesse de ton, là encore confondant de vérité et de déchirants accents. Et que dire encore du cycle fascinant « Über dem Dorn » d’après Paul Celan, mort suicidé en 1970? Sinon sa pureté tragique, impeccable, implacable, immersion sublime dans le noir absolu et les profondeurs de l’expérience humaine. La tension dont il s’agit, déploie dans le texte et dans le chant du corps choral, une pleine conscience qui exprime, et l’anéantissement final, et les forces extrêmes pour en sortir. Conçu comme un triptyque, son premier « volet », « Psalm » donne le titre de cet album événement.
Les trois Nocturnes dont un non moins captivant et crépusculaire voyage nocturne, infernal, d’après Benoît Richter, poursuit une quête ciselée, entre l’horreur d’une nuit d’inhumanité et le vide silencieux de la nuit, inquiétante, énigmatique.
Finalement, tout ici revient à l’humain, rien que l’humain. Interprètes en état de transe (chauffés par leurs chefs, Laurence Equilbey et Geoffroy Jourdain), compassion profonde d’un musicien au chant spirituel engagé, critique, acide, amer, et nourri d’espérance: ce disque est un éblouissement sonore et littéraire, incontournable. 1 cd Naïve. Paru en novembre 2004.

Crédit photographique
Thierry Machuel (DR)
Jean Mostaert, Saint-Christophe portant le Christ (DR)

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