CD critique. DUO W : contrastes (V Barras/ V ThĂ©venaz (saxophones / orgue – 1 cd Klarthe, 2020) – SAX et ORGUE, un duo incongru pour le moins⊠songez que plus de 2 millĂ©naires les sĂ©parent (du 3Ăš siĂšcle avant JC au milieu du XIXĂš) mais ils trouvent Ă se rencontrer et mĂȘme Ă fusionner avec incandescence grĂące Ă la complicitĂ© des deux instrumentistes suisses (qui sont aussi deux professeurs Ă©mĂ©rites Ă GenĂšve, Vincent ThĂ©venaz (orgue, titulaire des orgues de la CathĂ©drale Saint-Pierre de GenĂšve sollicitĂ©s dâailleurs pour cet enregistrement) et Vincent Barras (saxophones). Leur alliance sonore est dâabord une formidable expĂ©rience sensitive qui fait Ă©clater lâunivers musical classique. Si les deux instrumentistes jouent de concert dans la maĂźtrise du souffle et de la vibration, lâimage sonore quâils produisent redĂ©finit lâespace et la gĂ©ographie du concert. Lâorgue dĂ©ploie une magnificence vibratoire Ă la fois caressante, enveloppante, spectaculaire ; les saxophones sâunissent Ă lui en en accentuant le velours ondulant des ondes mĂ©lodiques et harmoniques. Le programme, riche en transpositions (tous les arrangements sont Ă©laborĂ©s par le duo W), permet de passer dâun style Ă lâautre avec une aisance et comme une Ă©vidence, trĂšs convaincantes.
Le duo W se chauffe dâabord dans une Suite Klezmer Ă la fois narrative et dĂ©licieusement orientale (pour saxo soprano) ; le dramatisme et une rĂ©elle aptitude suggestive Ă deux voix, prĂ©cisent lâhorizon cinĂ©matographique de leur plĂ©nitude partagĂ©e (Suite dâaprĂšs West Side Story de Bernstein) tandis que les deux musiciens cultivent la longueur vibratoire et lâĂ©lĂ©vation quasi cosmique dans Danses de la Renaissace, sorte de prĂ©lude qui prĂ©pare à « Susanne un jour » de Giovanni Bassano : Vincent Barras y cultive une souplesse aĂ©rienne que lâon pensait rĂ©server aux seuls cornettistes. Le saxo baryton enchante dans la Suite dâaprĂšs Carmen dont lâorgue, Ă©lectriquement Ă©lĂ©gant, furieusement expressif sait restituer les couleurs Ă la fois sauvages et raffinĂ©es de lâopĂ©ra de Bizet. Avouons notre prĂ©fĂ©rence, annĂ©e du centenaire de sa naissance en 2021, aux deux transcriptions dâaprĂšs Astor Piazzolla : Oblivion puis 3 airs (Escualo, Ausencias, Vuelvo al Sur formant triptyque « Piazzollada ») dont la langueur nostalgique, la jubilation rythmique⊠sont magnifiĂ©es par lâaccord des deux instrumentistes, en particulier la remarquable rondeur cuivrĂ©e du saxo alto. Superbe rĂ©cital doublĂ© dâune expĂ©rience sonore rĂ©crĂ©ative.
________________________________________________________________________________________________
CD critique. DUO W : contrastes. Transcriptions dâaprĂšs Bernstein, Bizet, Piazzolla⊠(V Barras/ V ThĂ©venaz (saxophones / orgue – 1 cd Klarthe records, enregistrement rĂ©alisĂ© Ă GenĂšve en avril 2020) – CLIC de CLASSIQUENEWS, printemps 2021.