Richard Wagner: L’Or du Rhin, Das Rheingold, 1869 Paris, Opéra Bastille. Du 4 au 28 mars 2010

A ne pas rater
Richard Wagner
L’or du Rhin
Das Rheingold
, 1869

Paris, Opéra Bastille
Du 4 au 28 mars 2010

nouvelle production
Philippe Jordan, direction
Günther Krämer, mise en scène

Le Prologue de la Tétralogie est créé le 22 septembre 1869 à Munich.
Soucieux d’édifier son propre théâtre élaboré selon ses conceptions
scénographiques, pour un théâtre total, Wagner réalise son rêve grâce au
financement apporté par Louis II de Bavière: Bayreuth est édifié à
partir de 1871. En août 1876, la première Tétralogie, représentée dans
son intégralité y voit le jour…

Wagner écrit d’abord le livret du cycle musical: il commence par la narration
sur la mort de Siegfried (qui deviendra Le Crépuscule des Dieux); puis,
souhaitant remonter à la jeunesse du héros, le compositeur écrit
Siegfried; pour dévoiler l’origine de ses parents, il conçoit ensuite
La Walkyrie (amour des jumeaux Siegmund et Sieglinde). Enfin, en
dernière étape d’écriture, Wagner compose la trame de L’Or du Rhin.
Dans le prélude, il s’agit d’évoquer le monde d’avant les
hommes: quand
toute civilisation est alors dominée par la loi et la puissance des
dieux lesquels manipulent géants et Nibelungen (peuple d’ouvriers
agissant dans les entrailles de la terre). C’est un monde hiérarchisé
dont l’harmonie initiale a été brisé quand est apparu le désir de
puissance totale incarné par l’anneau. Cet anneau provient de l’Or du
Rhin, dérobé par le nain Albérich qui au début de l’ouvrage fait le
serment de renoncer à l’amour pour posséder le monde. C’est lui qui
façonne, à partir de l’or volé aux filles du Rhin, l’anneau maléfique:
à tous ceux qui s’en empare, le bijou magique apporte souffrance et
mort.
En fait, c’est
Wotan, le dieu des dieux qui subtilise l’anneau au nain trop naïf…
En souhaitant posséder le monde, dieux, géants et nains apportent le
chaos. Les conflits d’intérêts, l’ambition, le mensonge et la
trahison règnent dès lors: la fin des dieux est proche et il n’est pas
certain que les hommes soient plus méritants que les dieux…
Dans L’or du Rhin, se mêlent les idées de Wagner sur le
capitalisme
naissant (l’exploitation de l’homme par l’homme, l’esclavagisme
industriel, la loi désormais souveraine de l’argent et du profit…)
mais aussi ses lectures de Shopenhauer. Nul ne saurait écarter dans la
partition ses symboles politiques: tout ici dénonce en une ironie
permanente, la barbarie de chaque prise de pouvoir, l’inhumanité de
chaque manipulation. Si Wagner écrit comme nous l’avons vu, le livret
de L’Or du Rhin en dernier, il en compose la musique avant les autres
volets de la Tétralogie: le compositeur une nouvelle musique, flot
continu qui est une source ininterrompue de mélodies entremêlées, les
fameux
leitmotive dont la combinaison et le développement propre structurent
tout le cycle musical. Wagner conçoit un cycle entier sans rupture,
composé de quatre scènes représentées sans pause.

Si le reste de l’action suit une descente aux enfers, suscitant terreur
et morts, – on ne compte plus les victimes immolées froidement (du géant Fasolt à Siegfried, sans omettre Siegmund…) sur l’autel du pouvoir-,
L’or du Rhin fascine dès son ouverture: la féerie et la résonance d’un
commencement du monde, encore vierge et préservé, se font entendre.
Le Ring est composé sur une longue période (près de 20 années),
interrompu par la composition de Tristan et des Maîtres Chanteurs,
unique partition dont le dénouement est heureux.

Le Ring de Wagner développe des liens distendus avec la scène parisienne: donné pour la première fois à l’Opéra de Paris en novembre 1909, puis en 1911 au sein de la première Tétralogie (Palais Garnier), L’Or du Rhin refait ainsi son grand retour à Paris. Après la guerre, c’est Hans Knappersbusch en 1955 qui dirigea une nouvelle production de la Tétralogie, avant celle de Georg Solti en 1976 avec Theo Adam (Wotant) et Chrsista Ludwig (Fricka). En 2010, l’ouvrage bénéficie des ressources nouvelles de l’Opéra Bastille.

Wagner: L’or du Rhin (Das Rheingold) prologue en 4 scènes au festival scénique, L’Anneau du Nibelung (1869), nouvelle production. Paris, Opéra Bastille, 8 représentations du 4 au 28 mars 2010. Philippe Jordan, direction. Günter Krämer, mise en scène. Avec Falk Struckmann/Egils Silins (Wotan), Sophie Koch (Fricka)…

La production de l’Opéra Bastille marque la volonté du directeur Nicolas Joel et de Philippe Jordan, directeur musical, d’innover, en permettant grâce au cycle wagnérien (4 nouvelles productions), de réintégrer Wagner sur la scène parisienne (la dernière Tétralogie complète à l’Opéra de Paris remonte à 1957): les arguments en faveur de cette nouvelle intégrale se concentrent sur la distribution prometteuse pour les rôles entre autres de Wotan, Loge, Alberich, Fricka et Freia… La vision de l’allemand Günter Krämer devrait privilégier la clarté des confrontations, l’importance des luttes de pouvoir entre les clans adverses (Filles du Rhin, Nibelungen, Dieux, Géants…)… Autant de situations dramatiques explicitées qui rappellent combien l’ouvrage est aussi une comédie sulfureuse sur la barbarie à l’oeuvre quand rien ne compte davantage que le profit, le pouvoir, la puissance…

En complément des représentations de L’Or du Rhin, L’Opéra national de Paris propose aussi une série de rencontres et de concerts intitulée « Convergences« , du 18 février au 15 juin 2010, nombreux événements éclairant le rayonnement du wagnérisme en France, dont par exemple, le concert du dimanche 7 mars 2010 à 20h, Palais Garnier: « salon musical, le wagnérisme français ». Chausson (Quatuor opus 35) et Vierne (Quintette opus 42), par les musiciens de l’Orchestre national de l’Opéra de Paris.

Illustrations: Richard Wagner, Le Filles du Rhin et le nain Alberich par Fantin-Latour (DR)

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