Paavo Järvi
Chef d’orchestre
France Musique
Vendredi 6 juin 2008 à 16h
Wolfgang Amadeus Mozart: Les noces de Figaro, ouverture
Serge Rachmaninov: Concerto pour piano n°3
Dmitri Chostakovitch: Symphonie n°10
Nikolaï Lugansky, piano
Cincinnati Symphony Orchestra
Paavo Järvi, direction
Concert enregistré le 10 avril 2008, à Paris, Salle Pleyel
Depuis quelques mois, chaque nouveau concert du chef Paavo Järvi est attendu et suivi avec d’autant plus d’intérêt que le futur directeur musical de l’Orchestre de Paris à partir de 2010 reste encore méconnu du public français. Du reste, ses futures fonctions dans la capitale française nourrissent les plus grands espoirs. A la tête du Symphonique de Cincinnati dont il est titulaire depuis 2001, avec la Bremen Kammerphilharmonie, Paavo Järvi impose une stature indiscutable. Pour ceux qui ont suivi ce concert parisien, l’entente entre le soliste et le chef s’est pleinement fait entendre dans le Concerto de Rachmaninov, d’une impeccable mise en place, avec un souffle et une respiration graduelle jusqu’au feu engagé du final, ni trop maniéré ni exclusivement technique. Après la mise en bouche mozartienne dans laquelle Paavo Järvi n’était pas totalement à son meilleur, le directeur du Cincinnati a offert une belle leçon d’architecture et d’activité dans l’opus 10 symphonique de Chostakovitch. Vision musclée et dramatiquement intense qui explore tout ce qu’a de morsures âpres et cyniques, une partition à clés, aux nombreuses implications et connotations dans la vie personnelle du compositeur, d’une ironie constante.
Aujourd’hui, Paavo Järvi fait figure de challenger pour l’Orchestre de Paris, d’autant que la fin du mandat de l’actuel chef atittré Christoph Eschenbach a des relans vinaigrés, portés par l’amertume de l’intéressé, déçu de ne pas avoir été reconduit après 10 années d’exercice de la baguette parisienne. Järvi devrait apporter un souffle nouveau, une dynamique propice à la phalange, d’autant plus que ces champs d’intervention sur le plan du style et des répertoires s’avèrent très étendus: approche scrupuleuse, quasi philologique avec la Philharmonie de chambre de Brême, effectif sur instruments d’époque avec laquelle le chef poursuit une très intéressante intégrale des symphonies de Beethoven chez RCA (sens de la gradation dramatique, rythmique nerveuse et musclée); grand répertoire symphonique dans la lignée des modèles vénérés et analysés (Toscanini, Futrwängler, Munch…) avec le Symphonique de Cincinnati.
Formé par son père également chef, Neeme, et chef comme son frère, Kristjan, Paavo fut d’abord percussionniste, puis ayant contracté le virus paternel, il n’a eu de cesse de répéter une gestuelle claire, précise, économe, limpide… base d’un dialogue et d’une communication efficace avec l’orchestre. L’entente avec l’Orchestre de Paris dont il loue les qualités instrumentales en matière de couleurs et de transparence, autant évidente et louable dans Debussy que dans Wagner, s’est déjà réalisée au cours de plusieurs rencontres: des propres mots du chef, le courant a immédiatement passé. Rencontre, entente, reconnaisance… autant d’étapes clés pour que naissent plaisir et jubilation… qui sont les préambules à une grande histoire musicale.
Crédit photographique: S. Rock (DR)