Saison 2008-2009
Albéric Magnard
(1865-1914)
Symphonie n°4
Couplée avec
Félix Mendelssohn: Les Hébrides, la grotte de Fingal
Frédéric Chopin: Concerto pour piano n°2
Samedi 14 mars 2009 à 20h
Dimanche 15 mars 2009 à 17h
Tours, Grand Théâtre
Sous la direction de son chef fondateur Jean-Yves Ossonce, l’Orchestre Symphonique Région Centre Tours aborde une Symphonie méconnue de Magnard, livrée au bord de la première guerre mondiale qui emportera l’auteur au début des hostilités (août 1914), tout en rendanr hommage à Mendelssohn et à un autre grand romantique,Chopin, avec la complisité du pianiste François Chaplin (Concerto pour piano n°2 en fa mineur opus 21).
Symphoniste mésestimé
année que Carl Nielsen (le même jour que lui, le 9 juin), et Sibelius,
est comme ses contemporains nordiques (respectivement danois et
finnois), un immense symphoniste. Son oeuvre prend aussi tout son sens
et sa mesureauprès de Dukas (qui fut aussi son contemporain et comme
Busoni, un grand admirateur), de D’Indy, Lalo, Franck.
Une telle généalogie indique clairement la qualité de son écriture et
l’exigence musicale qui l’anima.
Néanmoins, le fils du directeur du quotidien Le Figaro entre
tardivement au Conservatoire, à 21 ans, dans la classe de composition
de Massenet.
Mais Magnard préfère rapidement (deux ans son inscription au
Concervatoire) suivre l’enseignement de Vincent d’Indy, en classe
privée de 1888 à 1892.
Le déroulement de sa carrière est atypique. Frappé de surdité
partielle, le musicien se replie sur lui-même, quitte Paris et,
préférant la solitude, fait retraite à Baron-sur-Oise (Oise) où il
poursuit l’écriture de son oeuvre : à son opéra précédent Yolande (peu applaudi), il fait suivre un nouvel opus lyrique Bérénice,
d’après Racine. La sûreté de la déclamation y affirme une assimilation
parfaite de la prosodie baroque et classique: en digne admirateur de
Rameau, Magnard montre alors sa valeur. Il compose aussi son grand
oeuvre orchestral: la Symphonie n°4 qui avec son Quatuor, fait partie des trésors absolus de la musique française, comme l’est la Symphonie de César Franck.
Trompeuse sérénité
L’ut dièse mineur de Magnard opus 21 est plus récente (plus tardive dans la chronologie du catalogue de ses oeuvres) que ses précédentes symphoniques. Composée entre 1911 et 1913, dans sa chère demeure refuge de Baron-sur-Oise, la n°4 arbore une toute autre palette chromatique, un tout autre climat, frappé par l’ampleur et la respiration d’une sérénité voire une retraite souhaitée et finalement réalisée. Pourtant, à lire les lettres et documents du musicien, contemporains de son écriture, la dernière symphonie a été conçue dans un « marasme complet »: sur le plan de l’inspiration, le dernier mouvement a causé des nuits et des journées d’angoisse et d’efforts vains. Si l’auteur l’écrit directement sur partition d’orchestre, il lui faudra presque un an (10 mois) pour accoucher de son final.
Dédiée à l’Orchestre de l’Union des femmes professeurs et compositeurs (!), l’ouvrage connaît une création désastreuse bien que jouée par la phalange dédicataire. La seconde création par l’orchestre de la Société Nationale, le 16 mai 1914, à l’aube de la première guerre, fut un véritable succès, grâce à l’engagement du chef Rhené-Bâton, depuis longtemps ardent défenseur de l’oeuvre de Magnard. Indépendant, voire sauvage, Magnard sera tué en août 1914, dès le début des hostilités en voulant protéger ses biens et sa maison: il sera abattu sans ménagement et sa demeure, incendiée (emportant de possibles partitions aujourd’hui perdues).
Plan. 1. Modéré, puis Allegro: énergie, chromatisme incandescent, puis conclusion calme aux violons. 2. Vif: scherzo qui recycle en le transformant le thème d’ouverture. 3. Sans lenteur et nuancé: Magnard enchaîne ce mouvement, sur le principe d’un lied double à 5 parties. L’orchestration réussit le climat d’une badinerie libre et imprévisible. 4. Final: reprise du thème de l’Allegro initial, puis second thème « alla zingarese »…
L’opiniâtreté frénétique, ce sommet de l’écriture de Magnard, qui doit beaucoup ainsi à son seul modèle, Beethoven, trouve dans la 4ème, une réalisation très aboutie. Magnard y a trouver une saine et délectable voie entre la lyrisme plus tendre et retenu de Chausson, et la vitalité permanente de Roussel.
Illustrations: Albéric Magnard, Jean-Yves Ossonce (DR)