Zimmermann: La Rose Blanche. Angers Nantes Opéra, 5,6,8,10 février 2013
Illustrations: © Jeff Rabillon 2013
Udo Zimmermann (né en 1943)
La Rose blanche
6 représentations à Angers et à Nantes
du 29 janvier au 10 février 2013
compte rendu
2 jeunes âmes contre la mort et la barbarie…
La version que nous offre Angers Nantes Opéra est celle de 1986 : d’un premier ouvrage à plusieurs personnages et pour grand orchestre, Zimmermann a fait une épure ciselée comme du Britten, évocatoire et parfois âpre comme du Berg, proche par son éloquence et sa finesse linguistique de Bach.
Sur la scène, deux acteurs chanteurs à la présence vocale, dramatique et incantatoire d’une subtilité exemplaire traversent la série de tableaux conçus comme des transes, des visions hallucinées, entre terreur, douleur, surtout courage : Hans et Sophie, le frère aîné et la sœur, défient jusqu’à la mort les faiblesses, les lâchetés pourtant excusables. Leurs frêles silhouettes se dressent malgré tout et jusqu’au bout contre un climat de terreur intelligemment cultivée tout au long du spectacle. Les deux cœurs justes ullulent, murmurent ou expriment toute une palette de sentiments divers, véritable tour de force vocal et lyrique qui semble aussi revisiter les lamentos baroques et l’incantation montéverdienne.
Armando Noguera, familier de la scène angevine et nantaise, et familier des prises de risques contemporaines, accomplit ici un nouveau sommet: justesse du style, sûreté vocale, et surtout finesse dramatique, le baryton relève les défis de sa prise de rôle, ce avec d’autant plus de mérite, que la partie est originellement destiné à un ténor. Mais la douceur grave du timbre renforce l’accord contrasté des deux voix; soulignant tout ce qui inscrit le personnage du jeune homme dans le concret, la brutalité d’une vie trop courte, fauchée en plein essor volontaire et militant. A ses côtés, Elizabeth Bailey, qui connaît bien le rôle de Sophie pour l’avoir déjà chanté, exprime avec une grâce mesurée, la douceur d’une enfant qui veut rêver encore et toujours, au bord du précipice.
Dans sa forme concise, resserrée (à peine 1 heure), par la justesse de la réalisation scénique qui soigne en particulier l’esthétisme évocatoire des lumières, grâce à la performance des deux solistes portés par le geste du chef, lui aussi habité et tout en pudeur, la production de La Rose Blanche ne pouvait trouver meilleurs interprètes. Les œuvres traitant de l’injustice et plus encore de la barbarie nazie sont rares à l’opéra: Udo Zimmermann a fait d’un acte de dénonciation, un remarquable ouvrage poétique. Le spectacle est bouleversant. Et les 4 dates nantaises, incontournables. A l’affiche du Théâtre Graslin à Nantes, les 5,6,8 puis 10 février 2013.
Angers. Grand théâtre, le 30 janvier 2013. Udo Zimmermann: La Rose Blanche, 1986. Coproduction présentée par Angers Nantes Opéra. Avec Elizabeth Bailey, Sophie Scholl. Armando Noguera, Hans Scholl. Nouvel Ensemble Contemporain LE NEC. Nicolas Farine, direction. Stephan Grögler, mise en scène.