Jérémie Rhorer
fait palpiter Mozart
Arte, le 12 juillet 2012 à 21h30
En direct
Les Noces de Figaro de Mozart
Festival d’Aix en Provence
Chaque Mozart à Aix suscite les attentes les plus vives: Wolfgang y est chez lui comme à Salzbourg. Depuis la création du festival français, chaque édition comporte nécessairement un opéra (sinon plus) de Mozart.
En 2012, Jérémie Rhorer, chef mozartien immensément doué, cultive une approche millémétrée qui en s’appuyant sur les milles couleurs et accents permis par les instruments d’époque, restitue une vitalité régénérée qui devrait s’avérer gagnante dans Les Noces de Figaro. Moderne et séditieuse (d’après la pièce de Beaumarchais), sourtout palpitante au diapason du coeur, Les Noces reste cette folle journée, acte trépidant, opéra des femmes dont la tendresse et les aspirations militent pour un monde nouveau: celui de Mozart. Tendresse, amour, affection se dressent contre la loi du mâle phalo, ce comte Almaviva, vrai despote domestique. Ainsi se liguent autour d’un Figaro libertaire, Suzanne, la Comtesse (languissante et éplorée), Chérubin, véritable incarnation d’Eros.
A force d’actualisation forcée, la mise en scène perd de sa crédibilité en cours d’action; plutôt que de souligner les lignes de force d’une partition constellée de joyaux dramatiques, elle atténue la portée « politique » de l’ouvrage, sa justesse affective et penche tout le plateau vers l’anecdote: ici, le Comte dirige un cabinet d’avocats; on s’agite beaucoup, entre chargés de dossiers et employés affairés. Ce surcroît anecdotique génère ce que beaucoup de fausses bonnes idées produisent: une pollution du sens. Qu’y gagnent ici le feu émotionnel, la finesse des situations, l’intense activité du psychisme… qui restent les vrais sujets de l’opéra? Et c’est dans la musique essentiellement que tout est dit, exprimé, commenté, approfondi…
Empêtré dans une grille scénique linéaire et sans flamme, le spectacle malgré quelques bons chanteurs (dont la Suzanne de Patricia Petibon; le Cherubino de Kate Lindsey; le Figaro de Kyle Ketelsen…), doit sa tenue de route à l’orchestre: nerveuse autant que souple, sincère et dramatique, la fosse palpite et pétille au rythme du coeur mozartien, sous la baguette d’un nouvel enchanteur, Jérémie Rhorer.
Avec son orchestre Le Cercle de l’Harmonie, Jérémie Rhorer vient de publier un album dédié au romantisme français: Symphonie à la juvénilité exaltante signé Rebel, et Concerto pour piano de Liszt, également sur instruments anciens (Bertrand Chamayou, soliste). Jérémie Rhorer a également assuré la réussite d’Amadis de Johann Christian Bach, splendeur lyrique entre fantastique et néoclacissisme récemment révélé à l’Opéra royal de Versailles (le disque devrait sortir en septembre: voir notre reportage vidéo Amadis de Gaule de Johann Christian Bach).
Les Noces de Figaro de Mozart à Aix, jusqu’au 14 juillet 2012. En direct sur Arte, le 12 juillet à partir de 21h30.
Le Cercle de l’Harmonie reprend du service sous la baguette de son premier violon Julien Chauvin (également cofondateur de l’ensemble avec Jérémie Rhorer) à Venise et Versailles, les 23 et 24 septembre dans la résurrection d’Atys… mis en musique par Niccolo Piccinni (1780): sélection d’extraits réalisée par le Palazzetto Bru Zane ; avec un quatuor de solistes de premier plan (Chantal Santon, Sangaride; Mathias Vidal, Atys; Marie Kalinine, Cybèle; Aimery Lefèvre, Cœlénus)
