LIVRES, annonce. Guide de l’opéra russe par André Lischke (Fayard). En 2006, il y a dix ans déjà, l’auteur nous gratifiait d’une consistante et très documentée « Histoire de la musique russe », où la citation des grands ouvrages musicaux était croisée avec leur résonance sociale, politique, historique. Même approche à la fois synthétique et exhaustive entre musique et histoire dans ce nouveau guide de l’opéra russe où André Lischke retrace les jalons de l’odyssée lyrique à travers l’évolution des régimes et des institutions officielles ou privées qui ont encouragé et enrichi le genre. La couverture du Guide annonce la couleur : Le Coq d’or de Rimsky Korsakov dans le décor imaginé par Natalia Goncharova pour le Scala en 1914… l’or, les fastes, n’empêchent pas une vérité à nu voire une vision parfois désespérée de s’exprimer.
Il n’y a pas que Boris Godounov, La Dame de pique ou Iolantha, sans omettre Lady Macbeth… : les chefs d’oeuvres de l’opéra russe conçus par Moussorgski,Tchaikovsky, Chostakovitch cachent tout un pan méconnu du génie russe à commencer par les excellents opéras de jeunesse de Rachmaninov, concentré postromantique composé après les Mousorgski, Borodine, RImsky, Taneïev, Arenski, Gretchaninov.…, et dont le présent texte offre une très bonne analyse. A partir des premiers essais au pays des Tsars, c’est à dire depuis les premiers vaudevilles des années 1770 (signés Sokolovski, Fomine, Pachkévitch), à l’époque des Lumières, et jusqu’aux dernières œuvres du début du XXIe siècle affrontant les chocs et convulsions de l’histoire contemporaine, douloureux, le texte suit la chronologie historique, inscrivant naturellement le catalogue des oeuvres ainsi présentées et analysées dans un flux ininterrompu. De la Russie à l’URSS, se précise une conception du théâtre lyrique, où « l’histoire, l’épopée, l’imaginaire populaire nourrissent un genre qui s’inspire autant d’événements décisifs du devenir national que des traditions du récit féerique, et se développe aussi en interaction avec la littérature : les écrivains Pouchkine, Lermontov, Gogol, Ostrovski s’associent aux compositeurs Glinka, Dargomyjski, Rubinstein, Moussorgski, Tchaïkovski, Rimski-Korsakov …
Au cours du XIXe siècle, l’opéra observe la tendance sociétale pour l’ordre monarchique, qu’elle soit propagande et allégeance (La Vie pour le tsar), critique philosophique (Boris Godounov), pressentiment de sa chute (Le Coq d’or). Même servitude masquée et propagande à l’époque bolchévique. Les arts sont étouffés et conditionnés (Lady Macbeth de Chostakovitch). Quand disparait l’URSS, les livrets se diversifient, privilégiant souvent – comme dans l’opéra vénitien du XVIIè, une grande lucidité voire une amertume sans idéal (Cœur de chien de Raskatov).
Chaque partition abordée est reliée à l’épisode de l’histoire russe dont elle fait écho ou qu’il a inspiré ; les notices, classées par ordre chronologique de compositeur, proposent un synopsis et un commentaire d’écoute développés selon leur importance complété par une sélection cd et dvd. Critique et compte rendu complet à venir dans le mag cd dvd livres de classiquenews.com
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Fils d’émigrés russes, André Lischke est maître de conférences à l’Université d’Évry. Il collabore régulièrement à l’Avant-Scène Opéra et est l’auteur d’ouvrages sur Tchaïkovski, Borodine et Rimski-Korsakov, ainsi que de l’Histoire de la musique russe des origines à la Révolution (Fayard).
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LIVRES, annonce. Guide de l’opéra russe par André Lischke (Fayard — Les indispensable de la musique / ISBN : 978-2213704524 / broché : 778 pages) – Parution annoncée le 17 avril 2017.