vendredi 19 avril 2024

Ingolf Wunder joue Frédéric Chopin1 cd Deutsche Grammophon

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Ingolf Wunder: nouveau prince du piano

Voici le cas exemplaire d’une révélation telle que nous en offre assez régulièrement Deutsche Grammophon au rayon pianistes. Depuis le départ de l’infatigable et spectaculaire Lang Lang (pour la concurrence: Sony classical); avec les premiers disques d’une autre chinoise Yuja Wang ou de la non moins talentueuse Alice Sara Ott, Ingolf Wander, aux côtés du précédemment primé Rafael Blechacz, (Concours Chopin de Varsovie 2005), fait figure de challenger au sein de l’écurie Universal, se risquant pour ce premier programme discographique (où il sait qu’on l’attendra forcément au tournant), dans l’interprétation des oeuvres de l’immense Frédéric Chopin. Le choix des pièces démontre l’ambition du jeune homme et sa fine compréhension de l’univers Chopinien, tire évidemment son épingle du jeu, en cette année Liszt, où les albums dédié à l’auteur de Christus, pleuvent comme grêle en mars.

Pour autant le jeune pianiste né en 1985 à Klagenfurt (Autriche), élève à l’université de Vienne, n’est pas un inconnu: il n’a cessé de remporter nombre de prix prestigieux dont le 2ème grand prix au Concours Chopin de Varsovie 2010: une distinction qui obtenue à 25 ans, a révélé l’éclatante maturité d’une sensibilité à la fois, raffinée, délicate, pudique; élève du lauréat du Concours de Varsovie 1955 (Adam Harasiewicz), Ingolf Wunder s’affirme dans ce premier album choc grâce à l’indiscutable richesse de sa sonorité doublée par une très intense vie intérieure. Un feu à la fois juvénile, passionnant par son ardeur première et coulante, mais aussi grâce à un flamboiement dynamique d’une rare plénitude.

Saluons d’emblée dans la Sonate n°3 opus 58, les respirations justes, et la flexibilité nuancée en particulier l’énoncé bellinien idéalement filigrané, des mélodies. Le pianiste n’écarte pas, compréhension bénéfique, une force et une énergie souterraines qui affleurent et infiltrent l’épanchement plus murmuré des chants principaux. Sa vélocité saisit littéralement dans le 2è mouvement: mais là encore aux passages requérant une souplesse plus énigmatique, le pianiste se fait caressant et flottant, il séduit par un jeu moins immédiatement explicite. Tout l’art des grands diseurs se révèle entre les lignes plus nettes, certains passages où le discours disparait pour que surgisse ce chant personnel où l’intimité s’épanche; jamais en manque d’imagination ni de finesse contrastée, le pianiste autrichien exprime la houle du dernier mouvement avec un feu démonstratif qui ne manque pas d’assurance triomphale… Même subtilité de ton et aspiration constante à la douceur dans la Polonaise Fantaisie opus 61: le toucher sait être vaporeux, tissant des vagues murmurées qui indiquent le repli sur soi; d’emblée ce qui frappe chez le pianiste, c’est l’absence totale d’effets de manchette, de calculs démonstratifs. Le jeu est constamment clair, simple, d’une articulation lumineuse. Intérieur, voire enfantin et même convoquant la rêverie, Ingolf Wunder accuse plus encore cette sobriété de ton dans la Ballade opus 52: à l’introduction sans affectation et directe même, succède la lancinante nostalgie d’un rêve évanoui (37′): tristesse pudique parfaitement exprimée avec une simplicité préservée malgré la répétition de l’énoncé. Mais bouillonnant quand il faut rugir et palpiter dans la sauvagerie et la passion, le final martèle un embrasement expressif que le pianiste maîtrise totalement. Et le final, subtilité interprétative de grande classe, ne sonne pas comme une conclusion triomphante mais bien comme une interrogation jamais résolue. Quant à l’Andante spianato auquel succède la Grande Polonaise opus 22, le feu nostalgique et l’emportement très stylé et élégant de l’interprète le hissent très haut parmi les chopiniens les mieux inspirés de l’heure.

Frédéric Chopin: Sonate n°3 en si mineur opus 58; Polonaise Fantaisie en la béol majeur opus 61; Ballade n°4 en fa mineur opus 52; Andante spianato en sol majeur opus 22. Ingolf Wunder, piano. Sortie annoncée: le 12 septembre 2011.

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