Haendel
maître du baroque
Lundi 13 avril 2009 à 23h25
Arte
Documentaire de Ulrich Meyzies (2008, 52 mn).
Compositeur chantant
Haendel, « dieu » vénéré de son vivant, statufié en 1738 en Apollon musicien, naît en 1685 à Halle (Saxe). Son père médecin a acquis une certaine fortune en partie grâce aux soins nécessaires auprès des blessés pendant la Guerre de Trente Ans (qui a décimé la moitié de la ville de Halle par exemple). Mais le père se montre vite intraitable quant aux dispositions de son fils pour la musique… c’est en écoutant le jeune prodige qui s’entraînait en secret au clavicorde, à l’orgue de la Chapelle du château de Weissenfels que le Duc, émerveillé, enjoint Haendel père, à favoriser l’éducation musical de son fils. Dès lors, les Grands n’auront plus de répit pour accompagner et stimuler les ardeurs compositionnelles de Haendel: il sera pendant son séjour italien, la coqueluche des princes à Florence, Rome, Naples et Venise.
Christopher Hogwood souligne l’excellent apprentissage germanique à l’époque de Haendel, surtout en matière de contrepoint et d’improvisation, deux aspects qui se manifestent chez Haendel comme organiste. Son maître Zachow lui inculque les fondements d’un métier solide. Pour preuve, l’élève de 17 ans remplace le maître pour les célébrations ordinaires et de plus en plus exceptionnelles: il est même nommé organiste de l’église principale de la ville. Mais l’opéra le ronge: il rejoint Hambourg et l’orchestre de l’opéra alors dirigé par Keiser. Quand ce dernier doit fuir ses créanciers pour Weissenfels, Haendel qui en était originaire, prend sa place à Hambourg et compose son premier opéra: Almira. Succès immédiat; un compositeur d’opéra allemand est né. Mais le métier lyrique lui échappe encore: le chant, la voix, la ligne sinueuse et langoureuse le fascinent. Il rejoint l’Italie, patrie de l’opéra, dès l’été 1706, à l’invitation du prince Jean Gaston de Médicis.
Les 4 années de son séjour italien (1076-1710) s’avèrent profitables: un génie de l’opéra voit le jour. En Italie, Haendel apprend l’art du bel canto où les voix sont utilisés comme des instruments, précise Alan Curtis (qui travaille avec la soprano Klara Ek). Importance est faite sur l’amour de Haendel pour la voix: sa ligne est fluide, évidente, naturelle, chantante. C’est un compositeur chantant qui séduit grâce à l’approche vocale de son écriture. Ce qui n’est pas le cas de Bach, plus difficile dans l’apprentissage du texte et de la partition. De fait, le docu montre comment le compositeur sait composer un personnage, approfondir un climat psychologiqe (comme Morgana chanté par Klara Ek).
Premier opéra italien pour Ferdinand de Medicis (Rodrigo, créé à Florence à l’automne 1709), auquel serait liée une aventure entre le jeune compositeur et la chanteuse Vittoria Tarquini; étape essentielle dans sa reconnaissance comme sa présence au Palais Ruspoli (aujourd’hui au milieu du vignoble de Vignanello), dans l’église de Vallerano dont l’orgue légendaire aurait inspiré le Salve Regina (!); … tout est évoqué et désigne parmi les temps forts de la vie de Haendel, l’Italie comme un passage capital, du musicien doué à l’éclosion du génie dramatique.
A Rome, Haendel séduit par ses dons éloquents à l’orgue. Son concert à saint-Jean de Latran reste mémorable. Et ses oeuvres catholiques (écrites par un Saxon protestant!) sont des chef d’oeuvre: La Resurezzione (Piazza Santa Apostoli, sous la direction de Corelli), le Dixit Dominus, l’oratorio Le triomphe du temps et de la désillusion sur le livret du cardinal Pamphili (un autre protecteur) dont Haendel recyclera nombre d’airs dans ses oeuvres suivantes…
Le « cher saxon » à Venise

C’est l’époque où le compositeur produit une série d’oeuvres à succès grâce à la fondation de la Royal Academy of Music, financée par les nobles et dont les opéras, façonnés par Haendel sont chantés par les grandes voix de l’heure: Senesino, Faustina Bordoni, Francesca Cuzzoni…
Mais ses efforts pour rehausser le style de l’opéra seria se heurtent à la désaffection du public et malgré la richesse des registres (comiques et héroïques) d’une oeuvre comme Partenope, l’opéra n’attire plus les foules… Aujourd’hui, Londres a su préserver la maison de Haendel, au 25 Brook Street, qu’il habita pendant 36 ans.
Le documentaire précise le goût du compositeur par ailleurs collectionneur de peintres : dans sa demeure de Brook street, il possédait plusieurs toiles prestigieuses signées Rembrandt, Titien, Watteau et Brueghel, avec une prédilection pour les nues féminins…
Mais celui qui sut tant recevoir: gloire de l’inspiration et faveur des princes, sut aussi s’émouvoir du sort des plus miséreux, en particulier lorsque le fils de l’un de ses musiciens, devenu orphelin, avait été retrouvé mendiant dans les rues de Londres. Le compositeur décide de soutenir financièrement l’Hôpital des enfants trouvés de Londres, anciennement fondé par Thomas Coram. Il crée un fonds de soutien: Haendel offre à l’institution un autographe de sa main de son meilleur oratorio, Le Messie et lui lègue par testament le droit exclusif de jouer cette oeuvre une fois par an pour en recueillir les bénéfices ! Le compositeur qui sut être généreux et magnanime, quand la plupart des artistes ne s’intéressent qu’à leur propre devenir, meurt à 74 ans, en 1759, après avoir écrit 12 grands oratorios.
Haendel, maître du baroque. Documentaire inédit. Réalisation: Ulrich Meyszies. Coproduction : Arte, Mdr, Rm Arts Fernseh- et Film GmbH Halle avec digital images et Arthaus-Musik. (52mn).