dimanche 4 mai 2025

Giacomo Puccini: Portrait (150 ans de la naissance) France Musique, les 22, 23 et 24 décembre 2008 à 13h

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Giacomo Puccini

(1858 – 1922)


Portrait


Pour les 150 ans de la naissance,


le 22 décembre 2008


France Musique

Les 22, 23 et 24 décembre 2008 à 13h

Grands compositeurs

Génie de l’opéra

Auteur à mélodrammes pour bourgeoises en mal d’amour, Puccini continue de « traîner » une image sucrée, assez péjorative quant à la juste évaluation de son oeuvre lyrique. A la fin du XIXème et au début du XXème siècle, le compositeur est le plus grand auteur italien pour le théâtre. Et le succès de ses ouvrages, de Tosca, Turandot à La Bohème ou Butterfly, continuent de confirmer son impact auprès des publics.
Né à Lucca (Toscane) en 1858, le 22 décembre exactement, Puccini aurait eu en 2008… 150 ans. Mais la carrière musicale de Puccini n’est pas née du hasard: car Giacomo est en vérité le dernier descendant d’une lignée de musiciens depuis le XVIIIème siècle.
Alors que la France réussit l’après-Wagner, grâce au colorisme sensuel et réaliste d’un Bizet dans Carmen, l’Italie se cherche encore. D’ailleurs, repoussant les excès du vérisme à la Verga, Puccini suit plutôt l’alternative française, trouvant chez les voisins Gaulois, la source de ses opéras après le nordique Le Villi: Edgar (de 1889, la partition d’après Musset, est certes encore sous l’emprise de son maître Ponchielli), Manon Lescaut (l’un de ses premiers opéras parmi les plus applaudis de sa carrière, en 1893. Il est vrai que plus loin de Massenet, Puccini dépeint sans ménagement, avec un cynisme glaçant, aux II et III, la vacuité illusoire et cruelle de la réalité, en particulier la magie traîtresse des ors et du luxe), La Bohème (1895), Tosca (1899), Madama Butterfly… L’italien avait même pensé mettre en musique Tartarin, d’après Daudet. Le dramatisme de Puccini ne s’embarrasse d’aucune politesse sociale ou bourgeoise: ses actions filent net, directement vers leur but, jusqu’à l’explosion ou l’implosion d’une société sous pression: corruption et aveuglement de l’Ancien Régime dans Manon, exactions peu scrupuleuses et déjà maffieuses de la police du préfet de Rome dans Tosca…


Violence rentrée



Tout cela va très loin si l’on y regarde de près. Car au final Puccini dénonce aussi, sur le sillon de Victorien Sardou, en une partition flamboyante et âpre, le pouvoir tout aussi corrompu de l’Eglise (Scarpia est un suppôt de Satan, tout emprunt et baigné d’une vraie/fausse ferveur débordante). Il est vrai qu’en France, la séparation de l’Eglise et de l’Etat ne va pas tarder (en 1905).
La Rondine créé en 1917 à Monte Carlo, tient les feux de la rampe dans un contexte général tendu, en liaison avec l’exacerbation des nationalismes. Toujours en décalage avec son temps, Puccini ? Plutôt a contrario au plus proche de la vérité du coeur et du sentiment. Dans une Europe convulsive et violente, le compositeur s’intéresse au portrait sentimental de ses héroïnes. Un défi dans un contexte de déflagrations, de guerre, de fin d’Empire (autrichien, turc, russe…).
A contrario des fièvres environnantes, Puccini affiche une sérénité qui ne prend pas parti et déconcerte d’autant, à Torre del Lago, son refuge, tous les patriotes excités. Il Tabarro est composé en pleine guerre en novembre 1916, dans sa « retraite » musicale. Il Trittico créé aux Etats-Unis, et fortement applaudi dès les premières représentations incarnent en définitive le recul déconcerté du compositeur face au déséquilibre du monde. Il Tabarro, Suor Angelico, Gianni Schicchi traduisent chacun à leur manière cette conscience d’une fin inéluctable, découlant du cynisme et de la corruption généralisés. En gauchiste viscéral, Puccini s’est toujours écarté des dérives fascistes. Ecoeuré par l’ambiance italienne, il songe même à devenir anglais!
Evidemment le musicien est l’objet d’une tentative de récupération par Mussolini, laquelle ne se concrétise pas a contrario d’un Pirandello, plus zélé. Mais pour l’hommage posthume de Puccini, décédé le 29 novembre 1924, le Duce ira jusqu’à affirmer que Puccini avait demandé à posséder sa carte du parti fasciste…
Propagande mensongère et honteuse.

Quoiqu’il en soit, aujourd’hui, malgré le peu de culture de certains metteurs en scène, chefs ou interprètes préférant la caricature à la finesse expressive, ce qui vaut autant pour les opéras buffa de Rossini, le génie puccinien paraît 150 ans après la mort de l’auteur, d’une indiscutable intensité. Aucune Tosca, Bohème, Butterfly, Turandot qui n’ait encore totalement distillé son parfum inénarrable et mystérieux. Chaque oeuvre aujourd’hui interroge la nature humaine. C’est que Puccini, à la différence d’un Massenet par exemple, ne peint pas seulement des individus, en particulier féminins (de Mimi, Flora, Cio Cio San à Turandot et Suor Angelica ou Manon…): il sait surtout brosser par touches directes et franches, la vérité d’un personnage dans son milieu. Voilà pourquoi son Japon ou sa Chine, pour Butterfly ou Turandot, ne coïncident jamais avec des évocations exotiques de pacotilles. Sans jamais avoir visité les deux pays, Puccini parvient à exprimer la vérité de chaque culture grâce à une vérité émotionnelle indiscutable. Plus sincère que larmoyante, la scène puccinienne nous interroge et nous captive toujours. Avec raisons.

Illustrations: Giacomo Puccini (DR)

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