Gabriel Fauré
Nocturnes
« Nonchalance » et « rigueur »: Jankélévitch tente de
circonscrire les champs intérieurs infinis tels que Fauré les modèle
avec une âme vagabonde et changeante. C’est moins l’oeuvre d’un moment
que le journal de toute une vie. Le miroir musical d’une carrière qui
traverse les époques et donc les esthétiques: classique, académique,
romantique, symboliste, impressionniste… Fauré incarne tout cela à la
fois et même davantage: il ouvre à l’orée du XXè siècle, de nouvelles
perspectives précisant sous le filtre personnel, la musique de la modernité.
France Musique
Tribune des critiques de disques
Dimanche 26 décembre 2010 à 14h
Les Nocturnes s’étendent de 1875 à 1921. Leur source est elle aussi diverse: romantique, dans l’ascendance de Chopin (6ème Nocturne), le 7ème a déjà une tension harmonique propre au XXème siècle. Le 8ème rompt résolument avec la tendresse première. Peu à peu, Fauré tend vers une abstraction musicale plus en rapport avec ses pensées. Les pensées et les rêves intérieurs d’un compositeur frappé par une surdité croissante (à partir de 1903). Musique d’atmosphère et de mémoire (le 11ème est composé « in memoriam Lalo » : dédié à la mémoire de Noémie Lalo, fille de Pierre Lalo qui soutint Fauré), les Nocturnes expriment humeurs, visions, passions d’un chantre habité.
Illustration: Gabriel Fauré (DR)