dimanche 4 mai 2025

François Couperin: Portrait d’Iris Emmanuelle Guigues, Bruno Procopio (1 cd Paraty)

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Iris dansait…


Femme aimée et idôlatrée, ou messagère des dieux,
« Iris » qui donne son titre à l’album Paraty d’avril 2010, est un nouvel
accomplissement particulièrement convaincant du jeune label fondé par
le claveciniste d’origine brésilienne, Bruno Procopio. La mythologie
précise que lorsque Iris déploie son étole au ciel, elle fait voir
toutes les couleurs de l’arc en ciel, permettant d’heureuses
combinaisons de teintes et de tonalités… foisonnement des accents
raffinés qui vaut manifeste pour ce disque, nuancé et rutilant,
projetant d’indicibles climats, en tout point remarquable.
Les interprètes expriment non sans subtilité toutes les facettes de la
sensualité d’un Couperin, maître des ornements et des figures
mélodiques d’une inégalable délicatesse. Le geste se fait ici
caressant, allusif d’un raffinement de ton « pictural », comme tend à nous le déclarer le visuel de couverture, portrait d’Iris ou La Danse du
Watteau (qui vécut comme Couperin le début du XVIIIè et témoigna des
ors finissant du Grand Siècle), lui-même génie de la nostalgie et des
couleurs automnales néo vénitiennes.

Qu’ils soient solistes ou en dialogue, virtuoses confirmés parmi les
nouveaux baroqueux, les interprètes subjuguent grâce à leur
compréhension en profondeur des textes, à la finesse et à la nuance
développées pour chaque pièce de Couperin. C’est une succession de
climats changeants et miroitants entre nostalgie, gravité, poésie,
grâce, tendresse. La viole qui chante si naturellement sous les doigts
d’Emmanuelle Guigues capte
et brosse avec une infinie délicatesse de jeu, comme un oscilloscope
amoureux, tous les caractères d’une musique géniale: écoutez entre
autres, le recueillement ineffable de Pompe funèbre puis la danse virevoltante du spectre s’agitant dans les airs de la Chemise blanche qui suit, deux pièces qui proviennent de la 2è Suite de viole, plages 3 et 4).
La galanterie de Couperin est nourrie de secrets alanguissements où
s’immisce quantité de souvenirs, d’affects vécus, de nuances portés par
le coeur le plus désirant. Bonne idée de souligner ainsi l’apport des Pièces de viole avec la basse chiffrée de 1728, que l’on pensait perdues mais dont le manuscrit fut retrouvé dans les années 1930.

Le programme savamment élaboré alterne pièces majeures pour clavecin et partitions pour la viole. Au clavier, Bruno Procopio,
élève de Rousset, impose l’excellence d’une digitalité qui n’est pas
que démonstrative; le jeune claveciniste sait aussi colorer et nuancer
avec un sens admirable de la ligne et de la clarté. Son jeu, précis et
naturel sait tirer profit de toutes les ressources d’un instrument
exceptionnel choisi pour l’enregistrement de l’album, le clavecin de la
collection Laurent Soumagnac, d’un anonyme Lyonnais ravalé par Joseph
Collesse en 1748: grâce dansante et mesure nostalgique de La Garnier; écoulement magicien des Ondes … sont ici des préambules heureux au mystère captivant des Barricades mystérieuses dont le balancement palpitant continue à chaque écoute, de nous fasciner, entre grâce et onirisme.
De son côté, Emmanuelle Guigues fait merveille dans l’art si difficile
des ornements, dans celui non moins délicat et problématique des
liaisons et enchaînements note à note, car, comme la gambiste nous le
rappelle dans la notice passionnante, Couperin développe sa propre
notation: il inscrit même deux systèmes concernant les notes coulées et
liées, l’une carrée, l’autre ronde. A l’interprète de choisir pour
rendre naturelle et chantante, la substance vitale de la musique. Qu’il
s’agisse du clavier ou de la viole, les instrumentistes nous offre l’un
des programmes Couperin, les plus aboutis: leur geste soliste ou en
accord, touche sans afféterie avec une sincérité désarmante.

François Couperin: « Portrait d’Iris ».
Pièces de violes avec la basse chiffrée par Mr F.C. (Suites 1 et 2).
Les Goûts-Réunis ou Nouveaux Concerts (14è et dernier concert). Pièces
de Clavecin: La Manon, La Garnier, Les Ondes, Les Graces Incomparables
ou La Conti, L’himen-amour, L’Amazône, Les Bagatélles, Les Barricades
mystérieuses, Le Tic-Toc Choc ou Les Maillotins. Emmanuelle Guigues,
viole de gambe. Bruno Procopio, clavecin. Sylvia Abramowicz, viole.
Rémi Cassaigne, théorbe et guitare baroque. Parution annoncée le 9 avril 2010.

vidéos

« Portrait d’Iris ». Bruno Procopio et Emmanuelle Guigues, jeunes virtuoses de la nouvelle génération baroque, éditent un nouveau disque entièrement dédié à François Couperin… Le disque François Couperin intitulé « Portrait d’Iris » sort en avril 2010 chez Paraty.

Bruno Procopio, clavecin joue François Couperin. A Paris, dans le salon d’honneur des Invalides, le claveciniste Bruno Procopio joue plusieurs pièces de François Couperin. L’interprète publie un nouvel album dédié à François Couperin, avec entre autres
partenaires, l’excellente gambiste Emmanuelle Guigues, en avril 2010,
chez le label qu’il a récemment fondé, Paraty. 4 vidéos exclusives

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