Mendelssohn révélé
En cette année Mendelssohn, l’idée de concevoir un programme personnel
(bâti sur des pièces datées entre 1827 et 1841), de surcroît sur un
clavier « historique » à la sonorité mordante et caractérisée, sert
incontestablement le compositeur dont il faut le rappeler, l’oeuvre
pour piano est moins connue que celle pour orchestre. De même que
comparé à ses confrères, de la même génération, -nés entre 1809 et
1811- (Chopin, Schumann, Liszt), Mendelssohn est peu estimé comme
compositeur pour piano (ormis ses Romances sans paroles, lieder ohne worte, dont quelques pièces enrichissent le présent recueil).
Cyril Huvé poursuit donc sa quête esthétique (rappelons qu’il
dirige l’Académie de Musique de La Chaise-Dieu qui est justement dédiée
aux problématiques soulevées par la question de l’interprétation),
entre poésie et défrichement des mondes sonores.
Le défenseur des instruments d’époque (XIXè) et du pianoforte en
particulier nous offre ici une claire démonstration des possibilités et
au-delà des questions de « performances », une éblouissante palette de
couleurs et de nuances, oubliée, celle du piano « romantique ». Ainsi en
témoigne ce piano Broadwood des années 1840 (contemporain du
compositeur, l’instrument a été restauré par Gérard Fauvin, facteur et
collectionneur à Petignac, en Charente). Agilité digitale, clarté et
aussi feu dramatique (Andante, Presto de la Sonate écossaise opus 28, Scottish Fantaisy
de 1833 que le jeune Mendelssohn joua devant Goethe, dans sa première
version en 1830), ou langueur enchantée de plusieurs pièces issues des Romances sans Paroles, sans omettre le sublime « Rondo Capriccioso« , en guise d’ouverture d’une douceur lumineuse et tendre, comme l’Octuor, et traversé de ce crépitement halluciné et féerique proche de l’Ouverture du Songe d’une nuit d’été
(1827) … : l’album est un superbe hommage au génie et à l’inspiration
de Mendelssohn, « véritable dieu » pour Schumann. De ce dernier, Cyril
Huvé interprète en conclusion, le « souvenir » (Erinerrung) daté du 11 novembre 1847 (la date de la mort de Mendelssohn), mémoriam rétrospectif en hommage à son grand et jeune ami perdu.
Cet album défricheur ne pouvait mieux fêter le bicentenaire de la naissance de Mendelssohn.
agenda
Cyril Huvé est en concert les 22 mars 2009 (Concerto de Grieg à
Châteauroux) et le jeudi 26 mars 2009 à Rouen (avec la complicité du
comédien Daniel Mesguich, comme récitant). Toutes les infos sur le site
de Cyril Huvé.
Félix Mendelssohn (1809-1847):
pièces pour piano (Rondo Cappricioso, Scottish Fantaisy ou Sonate
écossaise, Prélude et fugue opus 35 n°1, Trois Etudes opus 104b, Robert
Schumann: Erinerrung 4 XI 1847, extrait de l’Album àla jeunesse opus
68. Cyril Huvé (piano Broadwood 1840). 1 cd Paraty. 1h11mn. Parution: le 20 mars 2009.
Prochaine critique complète dans le mag cd de classiquenews.com