vendredi 25 avril 2025

CRITIQUE, oratorio. OPÉRA DE RENNES, le 14 mars 2025. Haendel : La Resurezzione, 1708. LE BANQUET CÉLESTE. Paul-Antoine Bénos-Djian, Thomas Hobbs, Céline Scheen, Thomas Dolié…

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Pour La Résurrection du jeune Haendel, ils sont un petite vingtaine sur scène accompagnant les 5 solistes ; le Banquet Céleste nous met en appétit dès le début par la cohésion sonore du collectif, le raffinement des couleurs, le souci des nuances, l’écoute réservée aux chanteurs surtout, dont les musiciens portés par l’accord continu, structurant, entre le premier violon et le premier violoncelle ; sans chef désormais mais habités et soudés par une belle énergie d’ensemble, les instrumentistes ne font pas que démontrer la continuité du groupe : …

 

ils expérimentent aussi un nouvelle approche artistique sans le relais du chef; ils s’exposent directement au public dans une franchise qui portent ses fruits ce soir. Un résultat sonore qui est le produit d’une intelligence collective désormais en ordre de marche. Cette soirée est un jalon attendu, et réussi. Malgré les défis d’une telle partition, les interprètes savent en exprimer dans une version chambriste, chaque accent spirituel avec l’élégance et la nervosité dramatique propre à Haendel. Outre la beauté de certains airs, l’œuvre est saisissante par ses fulgurances dramatiques et le raffinement de l’écriture instrumentale. Une sophistication [qui ne sacrifie rien à la souplesse ni au naturel] et qui gagne même, en intensité et précision dans cet effectif allégé.

C’est d’abord devant les portes de l’Averne, l’opposition spectaculaire entre l’Ange de la Résurrection, éblouissant, vainqueur [qui foudroie littéralement / Nardus Williams, droite, efficace] et Lucifer, haineux, jaloux sorti du Cocyte, qui terrifie (Thomas Dolié, habité, expressif)… Confrontation des plus théâtrales, qui grâce au génie dramatique du jeûne Saxon a certainement saisi l’audience à sa création en 1708.

Défi relevé ce soir dans ce portique de sidération, qui ouvre l’oratorio, puis déroule les épisodes d’un véritable opéra sacré ; l’action réalise plusieurs séquences convaincantes qui sont aussi les airs les plus beaux composés par le Saxon.

Ceux de Madeleine, véritable source ardente de compassion et d’espérance [II.  » Per me già di morire… »], grâce à l’engagement progressif et très incarné de Céline Scheen ;
Lui répond la Cleofide [Marie de Cleophas] du saisissant Paul-Antoine Benos-Djian au chant sobre, articulé, profond [ses graves sont somptueux et naturels], idéalement contemplatif, incarnant lui aussi la ferveur du croyant traversé par le mystère de la Résurrection ; on se délecte en particulier de son air en seconde partie  » Augeletti, ruscelletti… » dont les seuls violons à l’unisson synchronisé et ductile, accompagnent ou soulignent dans la même respiration que celle du chanteur, chaque mesure du texte. Un texte au demeurant très évocateur, souvent pastoral, évoquant avant Haydn et sa Création, la Faune miraculeuse, la Nature enchanteresse dont l’orchestre plusieurs fois, exprime l’essence poétique envoûtante qui participe au Mystère. Tout le début de la seconde partie est en cela enivrant, car Haendel y inscrit la Résurrection de Jésus Rédempteur [au 3 e jour après la Crucifixion, soit au Matin de Pâques] dans l’évocation de l’astre solaire se levant, dans une aube printanière, alors gorgée d’espérance [air de Jean : « Ecco il sol ch’esce dal mare »…

Dernier personnage paraissant dans ce drame du Miracle, Jean qui a connu Jésus et dont le témoignage donne un nouvel écho aux épanchements de Madeleine. Il souligne l’avènement du Christ de gloire et enjoint chacun à méditer le mystère de la Résurrection. La tendresse flexible du timbre de Thomas Hobbs réussit la force spirituelle de ses airs, souvent dépouillés [avec pour seul accompagnement, le duo violoncelle / théorbe], d’une épure méditative impressionnante dont évidemment le sublime air « Cosi la tortorella… » [avec la descente souple et grave des cordes] , puis au II :  » Caro Figlio, amato Dio », acte de ferveur intime très subtilement énoncé.

La résidence du Banquet Céleste à l’Opéra de Rennes, s’inscrit dans la continuité de ses réussites précédentes dont entre autres évidemment les Cantates de JS BACH, et précisément l’oratorio de Caldara, La Maddalena ai piedi di Christo, autre fulgurant oratorio baroque qui révèle les grands interprètes… L’aventure continue ; elle se poursuivra la saison prochaine (2025 – 2026), toujours à l’Opéra de Rennes, avec l’oratorio romain qui précède La Resurezzione : Il trionfo del Tempo e del Disinganno (1707).

 

 

 

 

 

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Programme repris dans le cadre d’une tournée : annoncé à TOURCOING, (Théâtre municipal Raymond Devos, le 24 avril 2025 à 20h – Plus d’infos : https://www.atelierlyriquedetourcoing.fr/haendel-la-resurrezione-05-05-25/ )
programme
Georg Friedrich HAENDEL (1685-1759)
La Rezurrezione HWV 47, oratorio sur un livret de Carlo SIGISMONDO
par ordre d’apparition
Nardus Williams, Angelo
Thomas Dolié, Lucifero
Céline Scheen, Maddalena
Paul-Antoine Bénos-Djian, Cleofe
Thomas Hobbs, San Giovanni
Le Banquet Céleste

 

 

 

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