D’un événement politique et militaire assez sec historiquement – l’opposition entre l’impérial Jules César et le républicain Caton vers 49 BC / avant JC, Vivaldi élabore un drame amoureux où les passions affrontées suscitent de formidable portraits psychologiques et sentimentaux.
Parmi les derniers opéras de Vivaldi, Catone in Utica, créé en 1737 à Vérone, est d’une rare élégance intérieure – ce que comprend idéalement le chef Federico Maria Sardelli dans cette production. On retrouve la réussite du Farnace de Vivaldi présenté en déc 2021 par le Teatro Comunale di Ferrara « Claudio Abbado » : homogénéité d’une distribution dont les chanteurs soignent autant les airs que les recitativi, vitalité d’un orchestre qui se montre heureusement souple et dramatique. Se distingue aussi la belle mise en scène (signée Marco Bellussi), néo pompéienne et d’une pureté antiquisante habile, dessinant la galerie aérée d’une villa romaine patricienne (celle de la veuve de Pompée, Emilia), soit un fond net pour que la passion des protagonistes au premier plan, tels les figures d’un bas relief greco-romain, se détachent idéalement. La distribution est plutôt convaincante, regroupant plusieurs tempéraments vocaux parmi les plus séduisants de la scène italienne, dont évidemment le formidable Cesare, – rôle travesti, défendu par l’agile, flexible et dramatique Arianna Vendittelli, aussi martiale que tendre (photo ci dessous).
César est pris entre l’éclat contrasté de deux amoureuses opposées l’une à l’autre Marzia la douce (et pulpeuse) ; Emilia, lionne qui rugit, chacune conférant à son personnage respectif la profondeur et la vérité requise. Tous les chanteurs déploient un chant ardent et vif, au diapason d’une direction sensible et affûtée, attentive à chaque enjeu dramatique. De fait, le maestro Federico Maria Sardelli cisèle chaque séquence avec une conviction fiévreuse, un sens de la caractérisation qui montre aujourd’hui combien l’opéra de Vivaldi sur le mode nerveux et passionnel peut être nuancé, divers, miroitant. Sa direction renouvelle certaines postures actuelles pourtant reconnues et qui s’entêtent à ne restituer du Rosso, qu’un stantor excité, à l’érnégie frénétique et répétitive. Piège réducteur contredit par la souplesse expressive défendue ici par le chef et les formidables chanteuses.
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VOIR – En REPLAY jusqu’au 17 sept 2023 sur operaVision :
https://operavision.eu/fr/performance/catone-utica
distribution
Catone : Valentino Buzza
Cesare : Arianna Vendittelli
Emilia : Miriam Albano
Marzia : Valeria Girardello
Fulvio : Chiara Brunello
Arbace : Valeria La Grotta
Orchestra Barocca Accademia dello Spirito Santo
Federico Maria Sardelli, direction