vendredi 19 avril 2024

Compte-rendu critique, opéra. Barcelone, Liceu, le 27 mai 2017. DONIZETTI : La Fille du Régiment. Puértolas, Camarena… Finzi / Pelly. 

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Compte-rendu critique, opéra. Barcelone. Gran Teatre del Liceu, le 27 mai 2017. Gaetano Donizetti : La Fille du Régiment. Sabina Puértolas, Javier Camarena, Ewa Podles, Simone Alberghini. Giuseppe Finzi, direction musicale. Laurent Pelly, mise en scène. Interminable et tonitruante, l’ovation qui salue les neuf contre-uts éclatants lancés par Javier Camarena résume à elle seule toute la soirée. Quatre minutes de trépignements, de bravi et d’applaudissements, quatre minutes récompensées par un bis triomphal, lui-même achevé dans une véritable hystérie collective de la part de toute la salle en délire. Que dire de plus ? Sinon que, dès qu’il apparaît, le ténor mexicain fait fondre le public par sa candeur et son sourire, exactement cette maladroite et tendre naïveté que nous chuchote la musique.

 

 

 

Le beau-fils du Régiment

 

 

donizetti liceu fille du regiment javier camarena podles critique par classiquenewsDans le rôle de Tonio, toute son incarnation, tant physique que vocale, respire l’évidence : présence chaleureuse, timbre de velours, phrasé délicat et aigus irrésistibles de facilité. Mais surtout, au-delà de la performance spectaculaire dans le grand air tant attendu, une infinité de nuances qui fait de son « Pour me rapprocher de Marie » un moment inattendu où le temps se suspend à son chant. L’émotion à fleur de cœur, ciselée en de miraculeux pianissimi ainsi que des notes diminuées jusqu’à l’inaudible et jusqu’à la fêlure, ces quelques minutes bouleversantes de sincérité ont tout simplement fait couler nos larmes.
Autour de lui, la distribution offre de splendides moments. Parvenant à assumer le lourd héritage scénique de Natalie Dessay, la Marie de Sabina Puértolas prend peu à peu ses marques et s’affirme au fur et à mesure de la représentation, d’autant plus là où ne l’attendait pas. Si la voix manque parfois de puissance et d’impact dans les passages éclatants, le suraigu étonne par sa facilité et la musicienne nous prend par surprise dans les longues cantilènes, lentement phrasées sur le souffle et couronnées d’aigus piano stupéfiants. A ce titre, « Il faut partir » et « Par le rang et par l’opulence » demeurent les plus beaux moments de la soprano espagnole, de ceux qu’on a envie de garder longtemps en mémoire.
DONIZETTI fille du regiment camarena tenor review critique par classiquenews top-left-1Irrésistible, Ewa Podles ne fait qu’une bouchée du rôle de la Marquise, offrant toujours à un public médusé sa célèbre gamme descendante au début de son air d’entrée, taquinant malicieusement et avec beaucoup d’humour le contre-si bémol grave ! Sa présence magnétique et l’autorité naturelle de sa voix parlée font le reste, on regrette seulement qu’elle n’ait pas davantage à chanter. Car la voix demeure absolument intacte, avec son inimitable grain reconnaissable entre mille et ce registre de poitrine légendaire dont on se délecte à chacune de ses apparitions.
Bougon et attachant, le Sulpice de Simone Alberghini se révèle parfaitement à sa place, tandis qu’Isaac Galán croque un inénarrable Hortensius étonnamment à l’aise avec l’accent autrichien. Quant à Bibiana Fernandez, célèbre comédienne espagnole, elle donne à la Duchesse, du haut de sa longue silhouette, un relief presque inquiétant qui la rend plus détestable encore.
Tout ce petit monde évolue avec un naturel sans cesse renouvelé au sein de la production imaginée par Laurent Pelly et qui fête cette saison ses dix ans d’existence. Dix ans durant lesquels ces décors, ces costumes et ses attitudes chères au metteur en scène français ont voyagé à travers le monde, s’affirmant presque comme la seule vision actuelle de l’ouvrage. Et force est de constater que tout fonctionne toujours aussi bien et que les gags qui parsèment la scénographie font toujours mouche, pour la plus grande joie des spectateurs qui s’esclaffent de bon cœur.
A la tête d’un orchestre invariablement superbe – magnifique solo de violoncelle dans l’introduction du second air de Marie –, Giuseppe Finzi se met tout entier au service des chanteurs et du compositeur, avec une direction claire et précise, manquant certes parfois de personnalité mais menée d’une baguette efficace et enjouée.
Au rideau final, c’est la liesse générale et le héros de la soirée se voit fêté passionnément par un public conquis et heureux.

 

camarena Javier dans la fille du regiment de Donizetti critique review par classiquenews

 

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Barcelone. Gran Teatre del Liceu, 27 mai 2017. Gaetano Donizetti : La Fille du Régiment. Livret de Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges et Jean-François-Alfred Bayard. Avec Marie : Sabina Puértolas ; Tonio ; Javier Camarena ; La Marquise de Berkenfield : Ewa Podles ; Sulpice : Simone Alberghini ; Hortensius : Isaac Galán ; La Duchesse de Crakentorp : Bibiana Fernández ; Un Caporal : Carlos Daza ; Un Notaire : Olivier Decriaud.  Chœur du Gran Teatre del Liceu ; Chef de chœur : Conxita Garcia. Orquestra Simfònica del Gran Teatre del Liceu. Direction musicale : Giuseppe Finzi. Mise en scène : Laurent Pelly ; Reprise : Christian Räth ; Assistant à la mise en scène : Albert Estany ; Scénographie : Chantal Thomas ; Costumes : Laurent Pelly ; Assistant aux costumes : Jean-Jacques Delmotte ; Lumières : Joël Adam ; Chorégraphie : Laura Scozzi ; Assistante à la chorégraphie : Karine Girard ; Réécriture des dialoues : Agathe Mélinand / illustrations : photos © A Bofill).

 

 

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