Depuis soixante-dix ans, le Septembre Musical de Montreux-Vevey est le rendez-vous des mélomanes sur la Riviera vaudoise, et en premier lieu des amateurs d’orchestre. Après le Russian National Orchestra dirigé par Hartmut Haenchen, l’Orchestre National de France placé sous la baguette d’Emmanuel Krivine et le European Philharmonic of Switzerland sous la direction de John Fiore, la manifestation vaudoise a accueilli l’Orchestre Français des Jeunes dirigé par son nouveau directeur musical, le chef américain David Zinman qui a longtemps présidé la destinée des Orchestres de Rotterdam et de la Tonhalle de Zürich.
Après le tour de chauffe que constitue le fameux Carnaval Romain d’Hector Berlioz, réalisé avec autant de sensibilité que de brio, la phalange hexagonale s’attaque à la Quatrième symphonie de Ludwig van Beethoven, opus plutôt discret entre les célébrissimes Troisième et Cinquième symphonies. Cette symphonie évoque un peu, par son romantisme délicat et sa poésie souriante, le Schubert de la Cinquième symphonie, avec ce même sentiment de mystère qui baigne les mesures de l’introduction lente, puis cette impression d’esprits errants dans l’Allegro vivace. Quant à l’Adagio – en référence aux sentiments amoureux qui auraient inspiré Beethoven à propos de ce thème -, Berlioz avait dit : « ce mouvement surpasse tout ce que l’imagination la plus brûlante pourra jamais rêver de tendresse et de pure volupté ». Le moins que l’on puisse dire, c’est que David Zinman et l’OFJ rendent parfaitement justice à ces différentes atmosphères… avec un son qui subjugue l’oreille des auditeurs !
En seconde partie, le pianiste Jean-Frédéric Neuberger vient faire montre de son talent dans le Concerto pour piano N°2 de Johannes Brahms. Contrairement au Concerto N°1, l’opus 83 associe aussitôt l’orchestre et le pianiste. Neuberger déploie d’emblée un son profond et un phrasé parfaitement équilibré. Il fait ensuite preuve de beaucoup de fougue dans l’Allegro appassionato qui suit, s’avérant parfaitement en phase avec Zinman qui donne à son orchestre des couleurs automnales. L’Andante génère lui beaucoup d’émotion grâce à la longueur des phrases, étirées jusqu’à l’infini par le pianiste français.L’Allegretto grazioso conclusif est une conversation aussi aimable qu’enlevée, et si Neuburger fait encore preuve de moments d’éclats, il soigne surtout les transitions, offrant un babillage à la fois serein et optimiste. Après de nombreux rappels, il remercie le public en exécutant, en bis, une des nombreuses Etudes de Debussy.
En guise de conclusion, signalons au lecteur que Zinman et l’OFJ reprendront ce même programme le 18 décembre prochain à la Philharmonie de Paris – mais avec Nelson Freire comme soliste dans le Concerto de Brahms…
Compte-rendu, concert. Montreux, Auditorium Stravinsky. Le 8 septembre 2015. Hector Berlioz : Carnaval Romain. Ludwig van Beethoven : Symphonie n° 4 en si bémol majeur op. 60. Johannes Brahms : Concerto pour piano et orchestre n° 2 en si bémol majeur op. 83. Jean-Frédéric Neuburger (piano) ; Orchestre Français des Jeunes ; David Zinman (direction).