CD, compte rendu,première impression. Sibelius / Tchaikovsky : Concertos pour violon. Lisa Batiashvili, violon. Staatskapelle Berlin. Daniel Barenboim, direction (1 cd Deutsche Grammophon). Voici nos premières impressions d’un programme très séduisant dont la haute valeur dérive directement de la connaissance qu’on les interprètes des partitions, de leur complicité… C’est surtout dans un premier temps, à la suite d’une écoute première, le Concerto de Sibelius qui affirme une saisissante compréhension musicale. D’abord le Concerto de Tchaikovsky… Belle urgence du premier mouvement où l’orchestre de la Staatskapelle de Berlin, l’orchestre de Barenboim, sonne avec une élégance de ton d’une irrésistible séduction : le préambule est idéal pour l’éloquence feutrée de la sublime Lisa (Batiashvili), violoniste attachante qui vit à Munich : ondine serpentant dans un paysage orchestral superbement suggestif : la direction du chef éblouit par sa réserve caressante et détaillée. L’intelligence du chef et de son orchestre s’était révélé, affirmé au delà de nos attentes dans les Symphonies de Elgar, – superbe révélation couronnée par un CLIC de CLASSIQUENEWS.
Le violon de Lisa Batiashvili partage avec quelques rares confrères et consœurs, une grâce ténue, mesurée, nuancée (Vadim Repin, Isabelle Faust) qui font toute la différence avec les performers plus médiatisés mais indésirables. Son articulation d’une grande finesse exprime cette élégance lovée dans l’orchestration de Tchaikovsky. On se souvient d’un précédent disque BACH qui offrait la même intensité filigranée d’un son d’une subtilité impériale (LIRE notre critique du cd BACH de Lisa Batiashvili, 1 cd deutsche Grammophon, CLIC de CLASSIQUENEWS de novembre 2014).
Si le Concerto de Tchaikovsky affirme une virtuosité flamboyante, l’opus de Sibelius s’inscrit dans l’énigme et le scintillement d’une enivrante fragilité. Le premier mouvement est d’une bouleversante confession elle aussi filigranée qui exige des instrumentistes, soliste et musiciens de l’orchestre en présence, un sens de l’écoute et de l’équilibre global, … idéal, magicien. Le son de Lisa Batiashvili se révèle d’une rare incandescence, immédiatement solaire. C’est un embrasement d’une subtilité d’intonation d’une irrésistible souplesse. Le souffle tragique y est comme sublimé par l’hypersensibilité du compositeur à la nature et son miracle salvateur : il faut visiter en Finlande, sa propriété de Jarvenpaa pour saisir le lien indéfectible du musicien avec le motif naturel, source de révélations comme d’éblouissement. Le Concerto pour violon s’inscrit dans cette expérience et cette relation privilégiée.
Le Concerto est pour la violoniste son pain béni et une pièce familière, de grande intimité : elle le joue depuis au moins plus de 10 ans déjà, avec une profondeur et un son éthéré d’une sidérante expressivité. L’opus 46 en ré majeur fut composé en 1903 et, après révision, créé sous la direction de Richard Strauss en 1905 à Berlin. L’oeuvre est contemporaine de l’installation du compositeur dans la villa “Aïnola”, à Jarvenpaa, en pleine forêt, à 30km d’Helsinki. Longtemps minimisé en raison d’une apparente et “creuse” rigueur, le Concerto s’imposa néanmoins en raison des difficultés techniques qu’il exige du soliste. Mais en plus de sa virtuosité exigeante, le Concert de Sibelius demande tout autant, concentration, intériorité, économie, justesse de la ligne musicale.
Autant de qualités qui se sont révélées grâce à la lecture des plus grands violonistes dont il est devenu le cheval de bataille. D’une incontestable inspiration lyrique néo-romantique, la partition développe une forme libre, rhapsodique, même si elle respecte la traditionnelle tripartition classique en trois mouvements: allegro moderato, adagio di molto, finale. Même si l’inspiration naturelle, panthéiste, du compositeur s’exprime avec clarté, en particulier d’après le motif naturel des forêts de sa Finlande natale, les souvenirs enrichissent aussi une imagination personnelle et intime. A ce titre, le deuxième mouvement pourrait convoquer les impressions méditerranéennes vécues pendant son séjour en Italie.
Barenboim magicien des atmosphères, et son elfe enivré, tracent des accents d’une intensité idéale, dans un cheminement qui frappe par son intériorité et par contrastes, ses résonances panthéistes, excroissances symphoniques et déflagrations électrisées.
Le parcours emprunté par Lisa Batiashvili s’enrichit d’un engagement superlatif a voce sola dans la résolution du premier mouvement, à a fois, solitaire, éperdu, mais d’une pudeur intacte (que vient adoucir le chant fugace des bassons puis des violoncelles). C’est une course progressive contre les ténèbres, – un combat pour conserver la lumière : la rondeur âpre, le chant du violon se fait ici chant de résurrection : dans les mains expertes d’une telle interprète, le violon Joseph Guarneri “del Gesu” de 1739, produit une finesse et un moelleux, d’une sidérante activité. Le second mouvement est un chant d’amour d’une classe intérieure : quelle richesse suggestive du son. Opulence aux pianis arachnéens… Nous tenons là l’une des meilleures versions récentes du Concerto de Sibelius : scintillements de l’orchestre, chant intérieur, déchirant du violon soliste. Magistral.
CD, compte rendu, première impression. Sibelius / Tchaikovsky : Concertos pour violon. Lisa Batiashvili, violon. Staatskapelle Belrin. Daniel Barenboim, direction (1 cd Deutsche Grammophon). Grande critique développée à venir dans le mag cd dvd livres de classiquenews.com. CLIC de CLASSIQUENEWS de novembre 2016
TCHAIKOVSKY / SIBELIUS
TCHAIKOVSKY: Violin Concerto in D major, op. 35
SIBELIUS: Violin Concerto in D minor, op. 47
Lisa Batiashvili, violon
Staatskapelle Berlin
Daniel Barenboim, direction
Int. Release / parution internationale : 4 Nov. 2016
1 CD / Deutsche Grammophon 0289 479 6038 6