mardi 16 avril 2024

CD, compte rendu critique. CPE Bach / Homilius : Passion selon Saint-Luc. Il Fondamento, Paul Dombrecht (1 cd Il Fondamento, 2013)

A lire aussi

homilius cpe bach il fondamento paul dombrecht cd review compte rendu account of cd CLASSIQUENEWS Lukas_Passion-minCD, compte rendu critique. CPE Bach / Homilius : Passion selon Saint-Luc. Il Fondamento, Paul Dombrecht (1 cd Il Fondamento, 2013). BELLE REVELATION : HOMILIUS, ardent représentant de l’esthétique Empfinsamkeit à Hambourg au temps de CPE BACH. Enregistré par les effectifs du groupe musical bruxellois Il Fondamento de  Paul Dombrecht, en Belgique en juillet 2013, cette Passion selon Saint-Luc inédite, est bien d’Homilius, personnalité ici révélée ; la partition éblouit par son unité et la science suave de son écriture, livrées par le fils Bach pour la cité de Hambourg, laquelle en 1775, c’est à dire en pleine esthétique Empfindsamkeit, ne se passionne par encore pour la forme oratorio-Passion mais lui préfère la forme de la passion liturgique. Ainsi Bach livre-t-il une nouvelle Passion dans la ville où il avait succédé à Telemann, et ce pendant 21 ans ! Pour assurer une certaine « originalité » ou à défaut un caractère nouveau à sa livraison, CPE Bach utilise selon le principe du pasticcio à l’opéra,  des mélodies d’auteurs différents (son père Jean-Sébastien, Benda, Telemann naturellement et aussi Homilius, qui fut l’élève de son père et lui écrivit une bonne partie de la musique de cette passion selon Saint-Luc). Ainsi Homilius est non seulement le poète chargé du texte mais surtout le compositeur de la Passion livré par CPE pour le Carême 1775. Présentée comme l’oeuvre totale du Direktor Musices de Hambourg soit CPE Bac h, la Passion ainsi révélée est bien l’oeuvre d’Homilius, son contemporain qui avait appris son métier dans l’atelier paternel. Peu doué pour respecter les délais et d’un tempérament créateur plutôt lent, CPE préféra déléguer à son confrère et proche, le soin de composer la musique des Passions que lui imposait sa charge de directeur de la musique à Hambourg.

renglet amelie soprano wp8353adb1_1aLa place de l’assemblée des croyants étant centrale dans le culte protestant, la Passion débute immédiatement, – sans ouverture, par un choral puis enchaîne, récitatif du ténor (récitant) et air déchirant de Jésus qui appelle son Père (recitatif accompagné pour basse). Le récit et l’action sont conduits par le timbre lisse, précieux, éteint (décevant) de Reinoud van Mechelen -, le raffinement dramatique de l’écriture d’Homilius s’impose dès le premier air pour soprano (plage 5 : rayonnante Caroline Weynants idéalement accordé au cor), contrastant avec la délicatesse plus méditative voire grave de l’air d’alto qui suit (et le plus long : tenue laborieuse et pas souvent juste de Clint van der Linde, un peu trop sage voire d’un ennui persistant). En revanche, l’élégance plus engagée de la basse Lieven Termont (air 9), à l’articulation plus naturelle, tire son épingle du jeu par l’impact de son texte, la facilité de l’émission; d’autant que le relief des instrumentistes lui apportent un écrin / tapis musical des plus finement expressifs. Un régal enfin, exprimant l’exquise sensibilité du style Empfinsamkeit dont Homilius est un représentant passionnant. On goûte tout autant le soprano agile et très coloré, d’une belle franchise d’émission et sans affèterie de la soprano II, originaire de Namur, Amélie Renglet (notre photo ci dessus, air n°19), petite voix mais d’une belle intensité ardente et dramatique. Le style raffiné, d’une pudeur expressive illustre parfaitement l’écriture d’Homilius, vive et palpitante, en cela très proche de CPE Bach.

Pièce maîtresse du drame, le Trio n°21, de plus de 7mn : pour sopranos et ténor ; un épisode saisissant par la profondeur et la justesse de son effusion à trois, à la fois suspendu et méditatif (belle prestation du ténor sorti du chœur, Thibaut Lenaerts… que les connaisseurs ont déjà repéré dans les choeurs des plus grands ensembles actuels du Chœur de chambre de Namur aux Arts Florissants…

Gottfried_August_Homilius

 

En artisan fédérateur, d’une intuition sûre et convaincante  Paul Dombrecht cisèle en orfèvre de l’esthétique néoclassique et galante, une sonorité riche en rebonds et accents d’une réelle subtilité, rendant justice à l’écriture très élaborée et pourtant directe et franche d’Homilius. Le geste est précis, souple, d’un raffinement fouillé, d’une simplicité noble et retenue, qui parle évidemment en faveur d’Homilius. Un compositeur extrêmement mûr, doué d’une exquise science dramatique se révèle ici. Belle découverte. Seule réserve : l’affectation terne et bien peu engagée du ténor qui atténue sa partie de narrateur (R van Mechelen).

CLIC_macaron_2014CD, compte rendu critique. CPE Bach / Homilius : Passion selon Saint-Luc. Il Fondamento, Paul Dombrecht (1 cd Il Fondamento, 2013). Par la qualité de la partition hambourgeoise des années 1770 ainsi dévoilée en première mondiale, le présent enregistrement décroche le CLIC de classiquenews d’avril 2016.

A l’adresse de l’éditeur du cd : merci de bien vouloir grossir la police des caractères des textes du livret, illisibles d’autant que l’encre d’un gris pâle sur le fond blanc gêne considérablement la lecture… Dommage aussi que le texte allemand de la Passion selon Saint-Luc ne soit ni traduit en anglais ni en français, nous rendant définitivement étrangère l’intelligibilité de l’action liturgique et musicale.

Illustration : © Amélie Renglet

- Sponsorisé -
- Sponsorisé -
Derniers articles

BOULOGNE-BILLANCOURT, La Seine Musicale, les 23, 25 et 26 mai 2024. Insula Orchestra : BEETHOVEN WARS.

BATAILLES INTERGALACTIQUES POUR LA PAIX  -  Création mondiale à La Seine Musicale, le spectacle « Beethoven Wars » fusionne...
- Espace publicitaire -spot_img

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img