vendredi 29 mars 2024

Benjamin Grosvenor, piano (Chopin, Liszt, Ravel, 2011)1 cd Decca

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Une sensibilité pleinement aboutie, étonnante pour son jeune âge (19 ans), le jeune pianiste britannique Benjamin Grosvenor, nouvelle recrue de l’écurie Decca, fait mouche dans ce programme difficile et pourtant jubilatoire, qui mêle Scherzos et Nocturnes de Chopin et un Gaspard de la nuit tout aussi fantasque, déluré, onirique, halluciné, qui montre combien l’interprète maîtrise l’agilité incandescente de Ravel, sans omettre la vibration visionnaire et habitée de ses Liszt. Un premier disque qui est un coup de maître. Le signe d’une pensée musicale d’une rare pertinence, à l’image du programme dont les enchaînements sont d’une rare et exquise pertinence: ici, Liszt, contemporain de Chopin, passe le flambeau vers Ravel dont il a exercé une forte influence…

Le jeune prodige anglais ne cesse de gravir les marches de la reconnaissance depuis un passage révélateur à la BBC en 2004. la trépidation des Scherzos chopinien sont exaltants et éruptifs, à peine assagis et tempérés par les Nocturnes intercalaires qui leur servent de tampons apaisants: la flamme du jeu s’embrase littéralement et démontre l’extrême souplesse du jeune artiste. Le feu de Grosvenor articule les moindres nuances et un souci et une délicatesse hagogique récréative. Qu’il a d’idées, et qu’elles sont intelligemment énoncées, sans ostentation mais avec profondeur et finesse.
Pour mes joies et souhaits d’une jeune fille de Chopin/Liszt, l’ivresse sonore atteint des miroitements spirituels d’une étonnante maturité.

Ravélien facétieux, transcendant

Passeur enivré et fiévreux, porteur de visions fantastiques et d’atmosphères surnaturelles, « BG » nous assène un Gaspard ravélien (1908) à la fois lumineux et terrifiant, d’une finition orfévrée: tel un lutin évanescent, doué d’une fulgurante énergie, Benjamin Grosvenor parcourt la lande ravélienne, inspirée d’Aloysius Bertrand, parsemée de visions, d’éclairs, de personnages enchanteurs/vénéneux (Ondine, liquide, ondulante, provocatrice et mystérieuse), héroïques et délurés (le nain démoniaque Scarbo); le triptyque est furieusement inventif, sans éclats factices, sans calculs démonstratifs, mais au coeur du conte musical, avec une audace de ton et une électricité juvénile, neuve et splendide (intensité poétique glaçante et captivante du Gibet et ses teintes chaudes à la Véronèse). Révélation d’un nouveau très grand tempérament artistique. A suivre.

Benjamin Grosvenor, piano. Chopin: Scherzos et Nocturnes. Liszt : En rêve; (d’après Chopin: Mes Joies. Souhaits de la jeune fille). Ravel: Gaspard de la nuit. 1 cd Decca. Enregistrement réalisé à Londres en avril 2011.

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